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Daniel Gómez : « À Aix-la-Chapelle, on est dans une région qui vit, à Cottbus, dans une région qui survit »

Propos recueillis par Julien Duez
Daniel Gómez : «<span style="font-size:50%">&nbsp;</span>À Aix-la-Chapelle, on est dans une région qui vit, à Cottbus, dans une région qui survit<span style="font-size:50%">&nbsp;</span>»

La nouvelle est tombée comme un coup de tonnerre. L'Alemannia Aix-la-Chapelle est de nouveau en faillite, quatre ans après une première demande de mise sous tutelle, sanctionnée par une rétrogradation administrative en D4. Si la direction a garanti que la saison sera menée à son terme et les salaires payés sans faute, l'avenir est, quant à lui, inconnu. Difficile d'imaginer qu'il y a douze ans, le club recordman de saisons passées en 2. Bundesliga jouait la C3 avec un certain succès. Dans l'équipe, un Français : Daniel Gómez, témoin du dernier âge d'or du club rhénan.

Vous avez passé deux saisons à Aix-la-Chapelle, entre 2003 et 2005, après avoir commencé votre carrière à Virton, en D2 belge. Comment s’est faite la transition ?C’était une énorme inconnue, car à l’époque, la Bundesliga était peu médiatisée à l’étranger, alors imaginez la D2. Les dirigeants de l’Alemannia me voulaient en renfort de leur attaquant vedette Erik Meijer (une sélection avec les Pays-Bas, passé entre autres par Leverkusen, Liverpool et Hambourg, ndlr) et m’ont invité à voir un match pour en discuter. J’ai vu le public et ça a été le coup de foudre immédiat. Là-bas, la 2. Bundesliga est aussi populaire que la première et l’engouement du public est à peu près similaire. Sportivement, j’ai retrouvé les exigences de ma formation au FC Metz que j’avais un peu perdues à Virton, où le niveau est plutôt semi-professionnel.

En deuxième division allemande, l’Alemannia est connue comme le loup blanc. Quelle place au classement visiez-vous en début de saison ?Comme chaque année, la direction voulait au minimum le haut de tableau. Lors de la saison 2003-2004, les choses se sont mieux passées que prévu puisque nous avons terminé champions d’automne avant de réaliser un parcours exceptionnel en Coupe d’Allemagne (victoires entre autres contre le Bayern Munich et le Borussia Mönchengladbach, ndlr). Malheureusement, c’est cette performance qui a gâché notre saison, puisque nous sortons de la course à la montée à seulement trois journées de la fin.

En Pokal, vous perdez 3-2 en finale face au Werder Brême. Forcément déçu ? Pas tant que ça, j’ai quand même pu jouer une vingtaine de minutes, c’était sympa. Il faut savoir qu’en Allemagne, il n’y a pas la même culture de la coupe qu’en France. Il est très rare que des petits poucets fassent un gros parcours, donc notre finale était déjà un exploit. Et puis le règlement était différent à l’époque : Brême ayant réalisé le doublé coupe-championnat, c’est nous qui avons empoché le ticket européen.

À l’intersaison, un certain Dieter Hecking débarque au club en tant que nouvel entraîneur. Si tout le monde connaît son nom aujourd’hui, il était encore à l’époque un jeune coach débutant. C’est quelqu’un qui vous a marqué ?Oh oui, bien plus que son prédécesseur (Jörg Berger, ndlr). Il arrivait de Lubeck, un autre club de D2 (aujourd’hui en D4, ndlr) et on ne le connaissait que de nom. C’était un entraîneur avec de très bonnes idées, qui voulait vraiment apporter un jeu offensif, moderne, moins basé sur le physique que sur la technique. Cela m’a servi personnellement, car je ne suis pas un bagarreur qui va courir quinze kilomètres pendant le match. Je préfère accélérer, faire des appels ponctuellement et me donner pour l’équipe, ce qui collait bien avec son schéma de jeu qu’il voulait basé sur le plaisir et le spectacle.

Ce sont les coupes qui nous ont fait rater la montée à chaque fois. La Coupe d’Allemagne en 2004, la Coupe d’Europe en 2005. La preuve, quand ils sont montés en 2006, ils n’étaient concentrés que sur le championnat.

Venons-en à l’aventure européenne de la saison 2004-2005, le point culminant de votre carrière sportive. Quelles étaient vos ambitions en tant qu’équipe de deuxième division ?Une fois que nous avons réussi à passer le tour préliminaire contre les Islandais du FH Hafnarfjördur, nous voulions avant tout être avec de belles équipes dans notre groupe pour faire plaisir au public. On ne s’en est pas trop mal tiré puisque nous avons hérité du Zénith Saint-Pétersbourg, du FC Séville, de l’AEK Athènes et du LOSC. On a commencé par battre Lille (victoire 1-0, ndlr) avant de perdre 2-0 contre Séville, mais sans être ridicules. Alors on s’est dit qu’il y avait peut-être moyen de croire à la qualification.

La phase de groupes est assez houleuse et la qualification pour les seizièmes de finale intervient in extremis à la dernière journée… grâce à vous.C’était un but à Athènes qui nous a permis d’atteindre la troisième et dernière place qualificative. Pour autant, cela ne reste pas mon meilleur souvenir, car le stade était relativement vide, puisque l’AEK était déjà éliminé. Je préférais largement les matchs à domicile que nous jouions à Cologne, étant donné que notre stade n’était pas aux normes européennes. Contre le Zénith, c’était devant quarante mille personnes !


Malheureusement, l’aventure prend fin dès les seizièmes de finale face à l’AZ Alkmaar.(Il soupire) C’est vraiment ma plus grande déception parce qu’on aurait dû gagner. Au match aller, on était ultra-dominé chez nous, mais on est quand même parvenu à faire 0-0. Et au match retour, on mène très vite 0-1 avant qu’ils n’égalisent à l’heure de jeu et que Thomas Stehle ne se fasse expulser avant le dernier quart d’heure. Ils en ont profité pour en marquer un de plus. Je suis certain qu’à onze contre onze, on passait. En plus, cela nous a miné le reste de la saison en championnat, comme la Coupe d’Allemagne l’année précédente. On a terminé sixièmes, et mon histoire à Aix-la-Chapelle s’est arrêtée là.


Finalement, qu’est-ce qui manquait à l’Alemannia pour avoir le profil d’une équipe de première division ?Vraiment pas grand-chose, si ce n’est un peu de réussite contre les équipes plus faibles, car contre les gros, on répondait toujours présent. Comme je le disais, ce sont les coupes qui nous ont fait rater la montée à chaque fois. La Coupe d’Allemagne en 2004, la Coupe d’Europe en 2005. La preuve, quand ils sont montés en 2006, ils n’étaient concentrés que sur le championnat.

À Aix-la-Chapelle, on est dans une région qui vit, à Cottbus, dans une région qui survit. Les gens là-bas ont une autre approche de la vie, en partie à cause du fort taux de chômage.

Vous aviez signé trois ans, mais partez au bout de deux. Que s’est-il passé ?L’Energie Cottbus est venu me trouver pour me proposer un challenge intéressant : celui de la promotion en Bundesliga. C’est aussi ce que voulait Aix-la-Chapelle, mais Cottbus était plus ambitieux. Ils avaient l’équipe pour monter, alors je me suis dit, pourquoi pas. Et j’ai eu du flair puisque cette saison, on finit troisièmes… derrière l’Alemannia.

Quelles différences y avait-il entre la Rhénanie et l’ex-Allemagne de l’Est ?Je dois avouer que je ne m’attendais pas à trouver ce que j’ai trouvé. La RDA, c’est un pays que je ne connaissais qu’à travers les livres d’histoire, et la région n’a pas tellement évolué. À Aix-la-Chapelle, on est dans une région qui vit, à Cottbus, dans une région qui survit. Les gens là-bas ont une autre approche de la vie, en partie à cause du fort taux de chômage. En dehors du centre-ville qui est plutôt sympa, il n’y a rien. À Aix-la-Chapelle, vous avez la cathédrale, les rues pavées, les vieilles bâtisses de l’époque gothique, plein d’endroits pour sortir, c’est un super endroit pour habiter. On me reconnaissait dans la rue, je n’ai jamais vécu ça ailleurs. Les gens vivent pour le club, pas pour les résultats, mais pour ce qu’il représente. Qu’on gagne ou qu’on perde, on ne s’est jamais fait siffler, les gens revenaient toujours.

Les choses ont bien changé depuis votre passage. Après une première banqueroute en 2012, le club évolue depuis en D4 et s’est annoncé de nouveau en faillite il y a quelques jours. Vous l’aviez vu venir ?Non, parce qu’à l’époque, le club avait des bases stables. Les installations étaient super, tout le monde était payé en temps et en heure, le stade était toujours plein, à l’époque où je jouais, on avait douze ou treize mille abonnés, rien ne pouvait laisser présager ça. Après, de que j’ai compris, c’est leur nouveau stade qui a plombé les comptes (32 000 places, construit en 2008 pour quarante-six millions d’euros et racheté par la ville pour un euro symbolique lors de la première faillite, ndlr). Je l’ai vu, il est pas mal, mais ça ne vaudra jamais l’ancien.

Qu’est-ce qui peut sauver l’Alemannia aujourd’hui ?Repartir de zéro. Depuis quatre ans, ils luttent juste pour s’en sortir et ils n’y arrivent pas, malgré le fait qu’ils arrivent encore à attirer pas mal de monde pour un club de quatrième division. À ce niveau-là, peu peuvent prétendre faire aussi bien.

En 2010, j’ai signé un an à Chypre parce que je voulais absolument passer ma dernière saison pro au soleil. Le championnat n’était pas terrible, que ce soit au niveau sportif ou de la corruption. Mais niveau vacances, c’était génial.

Votre carrière professionnelle (1997-2011) s’est effectuée dans sa grande majorité au sein d’équipes de D2. C’est à Aix-la-Chapelle que vous gardez les meilleurs souvenirs ?Sportivement, oui. Mais humainement, je me suis plus éclaté dans des clubs comme Virton ou Maastricht. Après, j’avoue que je n’ai jamais attaché trop d’importance au fait de jouer en deuxième division. Le plus important, c’était de jouer. Et je préférais jouer les premiers rôles en D2 que d’être un anonyme en D1.

Vous n’avez aucun regret aujourd’hui ?Non, j’ai trente-huit ans, je travaille désormais dans l’immobilier au Luxembourg et je joue dans un club amateur en Belgique pour garder la forme car je suis devenu un habitué de la troisième mi-temps (rires) ! Globalement, j’ai eu une belle carrière, même si elle ne m’a pas rapporté beaucoup d’argent. En 2010, j’ai signé un an à Chypre parce que je voulais absolument passer ma dernière saison pro au soleil. Le championnat n’était pas terrible, que ce soit au niveau sportif ou de la corruption. Mais niveau vacances, c’était génial.

Une dernière chose : après votre saison avec Cottbus, vous finissez troisième, une place synonyme de montée en Bundesliga. Pourquoi être parti ?(Il soupire.) Ah… c’est le cœur qui a parlé. Metz, mon club formateur, m’a rappelé pour me proposer le pari de la montée en D2. C’était Francis De Taddeo, mon coach chez les jeunes, qui avait pris les rênes de l’équipe, alors j’ai dit oui… avant de me blesser six mois. C’est peut-être mon seul vrai regret au fond. J’aurai dû tenter l’expérience en Bundesliga, au moins pour voir, et puis j’aurais plus d’argent sur mon compte en banque !

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Propos recueillis par Julien Duez

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