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Cyrille Pouget : « Je n’étais pas un tendre »

Propos recueillis par Christophe Gleizes
8 minutes
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En marge du Marseille-Metz de ce soir, Cyrille Pouget, 42 printemps hier, livre ses vérités sur le choc du dimanche. En plus de bavarder sur son duo avec Pirès, son contrôle positif à la nandrolone et ses transferts hivernaux.

Cyrille, tu as joué à Metz et à l’OM, comment vois-tu le match de ce soir ?

Sur le papier, c’est une opposition très déséquilibrée, surtout un dimanche soir au stade Vélodrome. Marcelo Bielsa montre que le rôle de l’entraîneur a une importance capitale. L’effectif est pratiquement identique à la saison dernière et pourtant les résultats diffèrent. C’est un coach qui fait l’unanimité. De son côté, le FC Metz reste sur deux montées successives, c’est une équipe qui s’est très bien débrouillée sur le début du championnat et qui s’est renforcée avec les arrivées de Malouda et N’Daw. Ils ont connu un petit coup de pompe avant de se relancer contre Bordeaux. Faute de moyens, le maintien reste l’objectif principal des Messins, mais on n’est jamais sûr du résultat avant que le match ne se joue.

Tu vas pas te mouiller ?

Si, je vais être chauvin, je vais annoncer une victoire de Metz 1-0, avec un but de Sylvain Marchal sur corner. J’espère quand même pouvoir rentrer au Vélodrome derrière (rires). Quand je vois le nouveau stade, j’ai vraiment hâte d’y être, il a l’air magnifique à la télé. Il fallait vraiment le couvrir pour ne plus laisser entrer le mistral. Marseille, c’est une ville de foot avec des supporters exceptionnels, passionnés à l’extrême dans les bons comme les mauvais moments…

Un monde très différent de Metz, où tu as débuté ta carrière…

La principale différence, c’est le nombre de spectateurs dans le stade, l’engouement est beaucoup plus chaud du côté de Marseille. À l’image de Paris, tu y es toujours exposé. Dans les grands moments, la pression et les émotions sont multipliées par dix. Metz est un club beaucoup plus familial, où tout est mis en place pour l’épanouissement du joueur. Le club a beaucoup compté pour moi. Je suis né à Metz, j’y ai été formé, ce sont eux qui m’ont fait passer professionnel alors que rien ne m’y prédestinait. Grâce à eux, j’ai même connu mes premières sélections en équipe de France…

À l’origine, il y a cette association folle avec Robert Pirès, les fameux P-P flingueurs…

C’est vrai qu’on s’entendait bien, il y avait une véritable alchimie. C’est le journaliste Pierre Ménès qui nous a surnommés comme ça. On avait une très bonne entente sur le terrain, mais on évoluait surtout dans une très bonne équipe, qui a fini 4e du championnat en 1996. On n’avait pas le meilleur effectif, mais on a lutté pour le titre pendant toute la saison.


Tu as tout de suite senti son talent ?

Oui, j’ai surfé sur sa célébrité (rires). Robert était beaucoup plus fort que moi, techniquement et physiquement il était au-dessus. J’ai joué dans des bons clubs, je suis allé en équipe de France, et pour moi, il reste toujours dans les deux ou trois meilleurs que j’ai croisés. Il n’y a pas beaucoup de différence entre Pirès et Zidane. Robert, c’est un joueur de classe mondiale. Il a eu la carrière et les succès qu’il méritait, mais selon moi, il n’est encore pas assez reconnu en France malgré son parcours.

Grâce à votre duo, Metz remporte la Coupe de la Ligue en 1996…

Je me souviens de la finale contre Lyon, en milieu d’après-midi, à 17h. C’était un match compliqué qui s’est terminé aux tirs au but. Je me revois surtout revenir avec la coupe sur la tête, avant de sortir en boîte pour la soirée. À l’époque, je me disais que ma carrière était bien lancée ! J’avais signé mon premier contrat pro en 1994 et au bout de deux ans, on gagne déjà une coupe. En fin de compte, ça a été été le seul titre de ma carrière… Comme quoi, il faut savoir profiter des moments heureux quand ils se présentent.

Attends, tu as quand même été champion du Luxembourg en 2004 !

Le Luxembourg, c’est un championnat semi-amateur, ça n’a rien à voir avec le championnat français. 90% des joueurs ont un métier à côté du football, dans ma tête je n’étais déjà plus professionnel… J’ai vécu trois belles années au Luxembourg, cela m’a permis de jouer et de découvrir le monde du travail en même temps. C’était une bonne opportunité pour terminer ma carrière tranquillement, je ne voulais pas m’arrêter du jour au lendemain. C’est un luxe rare que tout le monde ne peut pas se permettre.

Tu quittes finalement le FC Metz après cette victoire en coupe, pour le Servette Genève. Pourquoi ce choix ?

Je ne vais pas mentir, à mon époque on était obligés de s’exiler pour obtenir une vraie reconnaissance financière… J’avais la possibilité d’aller en Angleterre, mais c’était difficile. Traverser la Manche, ce n’était pas comme aujourd’hui… Je suis allé en Suisse, car le club avait une très bonne réputation, ils avaient notamment réussi à sortir Sonny Anderson. À l’époque, le Servette était dirigé par Paul-Annik Weiller, quelqu’un d’une intelligence extrême, une des personnes qui m’ont le plus marqué dans le milieu. Cette expérience réussie m’a servi de tremplin pour signer au PSG, car Canal + détenait les deux clubs à l’époque.

Dans ton année au PSG, on retient surtout ce parcours en Coupe des coupes…

Mon plus grand regret ! Je me retrouve contre Barcelone avec Ronaldo en face, il ne nous a pas manqué grand-chose pour entrer dans l’histoire ! Finalement, on perd 1-0 sur un penalty de Ronaldo… C’était dur à avaler, mais bon, je me console en me disant que j’ai fait partie de l’épopée. Nous avons vécu des matchs incroyables, contre Liverpool ou l’AEK Athènes, c’étaient des moments fabuleux.

Derrière, tu n’es pas conservé et tu rebondis au Havre…

Le Havre, ça a été une très bonne expérience, j’étais capitaine, je m’y suis épanoui. C’est un club qui a une philosophie comparable au FC Metz, avec un grand président à l’époque, M. Jean-Pierre Hureau. Seul point noir, j’y ai connu un moment très difficile avec mon contrôle positif à la nandrolone. Je n’étais pas seul, il y avait des joueurs comme Guérin, Dugarry, Arribagé… Je ne sais pas pourquoi j’ai été contrôlé positif alors que je ne me suis jamais dopé, vous pouvez le marquer, c’est clair, net et précis.


Tu crois que ce coup dur t’a pénalisé pour l’équipe de France ?

Non, si je n’y suis jamais retourné, c’est simplement parce d’autres étaient meilleurs que moi. En 1996, pourtant, je n’étais pas loin de faire partie de l’Euro, je finis 23 ou 24e sur la liste… Six ans après ma carrière, je me rends compte que je n’ai pas assez profité de ces moments, c’est énorme de porter ce maillot, même pour trois petites sélections. C’est le rêve de tous les joueurs français.

Qu’est-ce qui t’a manqué ? Comment te décrirais-tu en tant qu’attaquant?

Je n’étais pas très grand, pas très rapide non plus, pas bon du pied gauche, moyen du droit, maladroit de la tête… et au final, j’ai quand même mis cinquante buts en Ligue 1. Je me décrirais donc comme assez opportuniste et malin. J’étais très intelligent dans mes déplacements, j’arrivais à me trouver au bon endroit au bon moment. Et surtout, je ne me posais pas de questions devant le but, quitte à tenter des frappes en une touche de balle à la JPP. Au niveau de l’état d’esprit, je n’étais pas un tendre. J’étais très bagarreur, mais ça m’a aussi pénalisé, car j’ai reçu pas mal de cartons rouges.


Opportuniste, tu l’étais aussi au niveau des transferts !

J’étais un vrai spécialiste du mercato hivernal (rires). Je quittais assez souvent les clubs en cours de saison, mon agent savait que c’était un moment où le poste d’attaquant était très recherché. C’est comme ça que j’ai pu connaître Marseille…

Quand tu signes à l’OM, c’est pour reformer le duo avec Pirès ?

À l’époque Courbis est mis de côté, il y a la CAN qui se profile pour Bakayoko, c’est la pénurie, Marseille cherche un attaquant. Et voilà que l’OM me choisit… Peut-être que Robert a facilité les choses, je ne sais pas. On a essayé de reformer le duo, mais ce n’était pas simple, le contexte était particulier. On s’est battus toute la saison pour ne pas descendre, il y a eu des problèmes à la commanderie avec les supporters. Sur le plan personnel, j’ai fait six bons mois en tant que titulaire, j’ai mis des buts, mais la saison du club était moyenne. Robert est lui parti à Arsenal…

L’expérience tourne assez vite au vinaigre…

C’est la période où j’ai commencé à sentir la fin, j’ai commencé à faire des mauvais choix. J’ai été prêté à Bellinzona en Suisse pour une pige de trois mois. Derrière je suis revenu à l’OM, mais le club a pris une autre direction en recrutant des Brésiliens. J’ai donc atterri en Ligue 2 à Saint-Étienne. Je pensais pouvoir me relancer, car Antonetti me voulait vraiment, mais pour être honnête, je n’ai pas été très bon. Je n’ai pas su retrouver mon niveau et mon contrat n’a pas été renouvelé.

Du jour au lendemain, tu te retrouves au chômage…

C’est dans ces moments qu’on se rend compte que le milieu est beau et pervers à la fois. Tu as beau faire tous les entraînements, tous les stages UNFP que tu veux, mais la compétition n’est jamais remplacée. Heureusement, le FC Metz m’a tendu la main, et Jean Fernandez m’a fait signer jusqu’à la fin de la saison. J’ai eu une pubalgie, mais l’année a été bonne, on a fini dans les trois premiers, on était promus en division 1. Mais je n’ai pas réussi à me mettre d’accord avec la direction sur un nouveau contrat. D’où le Luxembourg.

Maintenant que le foot est fini, tu fais quoi pour t’occuper ?

Je me suis reconverti ! (rires) Je dirige un magasin d’ameublement sur la région messine, l’enseigne Mobilier de France pour ne pas la citer. C’est un métier prenant, ça me plaît. Le seul souci, c’est que je m’étais promis qu’après le foot, j’éviterais de travailler le samedi. Manque de pot, c’est le plus gros jour dans le commerce… On ne fait pas toujours ce qu’on veut dans la vie !
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