120 millions encaissés en 13 jours
En réalité, la vraie fin de l’Anzhi a commencé le 22 juillet dernier, lorsque Guus Hidink, qui a flairé le mauvais coup, prend la décision de démissionner. L’entraîneur néerlandais est alors remplacé par son adjoint, René Meulensteen, qui est lui-même viré deux semaines plus tard. De fait, les résultats de l’Anzhi, en ce début de saison 2013/14, sont catastrophiques. Après quatre journées, le club du Daguestan ne compte que deux points, et est déjà relégable. C’en est trop pour Kerimov, qui s’est déjà lassé de son joujou. Lui aurait voulu gagner le championnat russe dès la première saison, et briller en Ligue des Champions la suivante. Bah oui, pourquoi le PSG pourrait-il gagner dès la deuxième saison avec les Qataris et pas lui ? Peut-être parce que Paris n’est pas parti de zéro, et que le recrutement parisien était, au fond, cohérent. Kerimov n’a pas souhaité attendre et, le 7 août 2013, il annonce que tous les salaires des joueurs vont être baissés, et que le bilan financier du club sera désormais de 50 millions de dollars par an.
Ainsi, lors des jours qui suivent cette annonce, c’est l’exode, pour le plus grand bonheur des autres clubs russes, et plus particulièrement des formations moscovites. Zhirkov, Denisov, Gabulov, Samba, Ionov et Kokorin se tirent au Dinamo Moscou, Boussoufa, Diarra et Logashov au Lokomotiv, Joao Carlos au Spartak. Enfin, Willian et Eto’o signent tous les deux à Chelsea. En tout, l’Anzhi encaisse 120 millions d’euros en treize jours. Il reste alors quatre jours avant la fin du mercato, et l’équipe n’a pratiquement plus de joueurs. Les dirigeants font alors n’importe quoi, et recrutent douze joueurs (dont la star est l’ancien Citizen Abdul Razak, c’est dire), pour une somme totale de 8 millions d’euros. Mais, forcément, changer l’intégralité de son équipe en cours de saison n’est pas une idée lumineuse. Les résultats le prouvent. L’Anzhi prend des raclées face au Zénith (3-0) et au Rubin Kazan (5-1) mais, surtout, est incapable de gagner le moindre match de championnat. A ce jour, le bilan est catastrophique : 17 matches de championnat, 7 nuls, 10 défaites, pas la moindre victoire. Et une série en cours de cinq rencontres sans marquer le moindre but. La lose totale.
L’Europa League pour exister encore un peu
Dernier du classement, avec déjà cinq points de retard sur les barragistes, et onze sur le premier non-relégable, l’Anzhi file tout droit vers l’endroit d’où il vient : la deuxième division. Une situation dingue pour un club qui aura tout connu en accéléré, en l’espace de quatre ans. Petite aubaine (si l’on peut dire ça comme ça), l’Anzhi a encore un moyen de s'offrir un baroud d’honneur avant de retomber complètement dans l’anonymat. L’Europa League. Bizarrement, en Europe, l’Anzhi s’en tire bien. Grâce à ses deux victoires étriquées lors de la double confrontation face à Tromsø (1-0 à domicile et 1-0 à l’extérieur grâce à un but inscrit à l’ultime seconde par Mkrtchyan, une copie de la gâchette arménienne), le club au maillot jaune est actuellement deuxième de sa poule, derrière Tottenham. Ce soir, il leur suffit d’un match nul, à domicile, face au Sheriff Tiraspol, pour décrocher mathématiquement leur billet pour les seizièmes de finale.
Mais le leader du championnat moldave, qui n’avait pas réussi à faire mieux que 0-0 lors du match aller, vendra cher sa peau. L’Anzhi le sait, mais sait aussi que cette Europa League est la dernière occasion de s’offrir un frisson. Car, concrètement, et à moins d’un miracle, le club sera relégué en deuxième division à la fin de saison. Suite à sa dernière relégation, en 2002, l’Anzhi a mis sept ans avant de remonter. Or, après l’ivresse connue lors des trois dernières saisons, ces achats sans limite, ces millions jetés en l’air, il sera difficile de se replonger dans la réalité, d’autant plus si cette réalité, c’est la D2. L’Europa League comme ultime échappatoire, donc. Et comme dernière façon d’exister. Voilà ce dont les joueurs de Gadzhi Gadzhiev (joli nom) devront être conscients, ce soir, au moment d’entrer sur la pelouse. Rien que ça.
Par Eric Maggiori
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