- Equipe de France
Chèque en Blanc ou la clé Deschamps ?
Raymond Domenech n'a pas déjà trépassé que déjà les chacals se disputent sa dépouille ou plus exactement la place de ladite dépouille. Aujourd'hui, deux favoris émergent loin devant les autres pour lui succéder après le Mondial : Laurent Blanc et Didier Deschamps. Petit comparatif entre les deux anciens comparses de l'Equipe de France.
Charles de Gaulle avait un jour déclaré qu’après lui, ce qui menacerait ne serait pas le vide mais le trop plein. Comprenez, trop plein de candidats à sa succession. Raymond Domenech pourrait récupérer cette antienne mais, à dire vrai, on ne voit guère que deux options crédibles aujourd’hui pour prendre sa relève. Pourtant, c’est pas faute d’essayer de refiler des idées, jusqu’aux plus farfelues (Le Guen, Giresse, et puis quoi encore ?) mais Ray doit se rendre à l’évidence : malgré son peu de goût (d’aucuns diraient son aversion) pour la génération 98, le poste tant convoité ne devrait pas échapper à Laurent Blanc ou Didier Deschamps, l’affaire paraît presqu’entendue. Ici la rumeur d’un accord tacite avec le coach de Bordeaux, là Dassier prêt à libérer le mentor de l’Olympique de Marseille. Pas de doute : bien plus que les régionales, la campagne pour la place de sélectionneur de l’Equipe de France est lancée.
PASSÉ DE JOUEUR : avantage Deschamps
Face au plus grand vainqueur de l’histoire du football français, le CV de Blanc ne fait pas le poids. Faut pas se raconter de fable, les douze premières années de la carrière de Blanc (débutée en 1983 à Montpellier), c’est surtout dans des clubs à la con, son passage à Naples post-Maradona excepté (1991-1992). Pour le reste, un squat dans l’Hérault (1983-91), des traquenards à Nîmes et à Sainté avant l’improbable relance à Auxerre (doublé en 1995-96). Le reste ? Des passages sans grand relief à Barcelone, Marseille, l’Inter et Manchester United. Du standing mais peu de perfs significatives et un palmarès très relatif : une C2 avec le Barça sans jouer la finale et un titre de champion avec MU en étant essentiellement remplaçant (19 apparitions). Non, l’essentiel de ses victoires, le Président l’a glané avec les Bleus aux côtés de… Deschamps, forcément. Faisons très court : le Basque a ratissé large partout où il est passé ou presque. Premier capitaine d’un club français à soulever la Ligue des Champions avec l’OM, avant de doubler la mise avec la Juventus (1996) en garnissant le tout de scudetti (3) et de coupes qui vont bien (Intercontinentale, Supercoupe d’Europe, une coupe nationale), puis de glaner, en pré-retraite, une petite FA Cup avec Chelsea. No comment. Même au scrabble ce type doit s’accrocher comme un dément.
CARRIÈRE D’ENTRAÎNEUR : égalité
Encore que… La Dèche tire surtout avantage d’avoir enquillé le premier, quasiment au lendemain de sa retraite de joueur en 2001. Car il faut le rappeler, l’ancien capitaine des Bleus a galéré au début avec Monaco avant de trouver la bonne formule (finale de C1, avec Rothen et Giuly, ça vous pose un savoir-faire). La remontée de la Juventus en Serie A est aussi à mettre à son crédit. Mais que dire de Blanc ? Un vrai sans faute pour l’instant. Et vas-y que je prends Bordeaux, que je fais le match avec l’intouchable OL dès la première saison (jusqu’à la dernière journée) avant de déboulonner la statue rhodanienne en place depuis sept piges, le tout agrémenté d’une Coupe de la Ligue et d’un Trophée des champions. Cette saison, les Girondins sont leaders et en piste dans toutes les compétitions pendant que l’OM de Deschamps pointe à 12 longueurs tout en s’étant fait dégager de la C1 dès la phase de poules (survolée par Bordeaux). En clair, plus d’expérience pour Deschamps mais une bien meilleure dynamique côté Blanc.
STYLE : avantage Blanc
Bordeaux pratique le meilleur football de France, c’est entendu. Pas nécessairement le plus spectaculaire mais le plus cohérent, le mieux posé. L’idée directrice de Blanc ? Garder le contrôle de la balle même si on est loin du toque version Barça. Bordeaux s’appuie davantage sur un impeccable quadrillage du terrain et sur la polyvalence extrême de l’ensemble de ses joueurs. Les offensifs ne rechignent pas à défendre et les récupérateurs (milieux et défenseurs, notamment les latéraux) sont suffisamment habiles pour s’impliquer avec succès dans la création. Pour sa part, Deschamps est plutôt un adepte du bloc défensif situé bas pour privilégier le contre. Sa recette ? Du muscle et de la vitesse. Si le cocktail a plutôt bien marché à Monaco, il tarde à s’imposer sur la Canebière. Dans l’optique d’une prise de fonction à la tête des Bleus, la patte Blanc (blanche ?) aurait sans doute les faveurs des décideurs après des années sans réelle maîtrise du jeu sous la férule de Domenech.
IMAGE : avantage Blanc
C’est bizarre la vie parfois. Didier Deschamps a beau pratiquer la langue de bois à la quasi perfection, il traîne une image de gars pas facile à gérer. La faute à des départs houleux de Monaco et de la Juve et aussi peut-être à cette façon qu’a longtemps eu la Dèche d’imposer ses vues en matière de management ( « Je viens avec mon staff italien qui en sait bien plus que vous les gars » , enfin en substance hein). Suffisant pour que Lyon, un temps intéressé, écarte sa candidature en 2007. Après des années à jouer les pompiers face aux incendies du pyromane Domenech, sûr que la FFF aimerait souffler un coup. Et pour cela, quoi de plus reposant que le roi du consensus. Calme, réfléchi, rarement dans le fight, Blanc dégage une vraie sérénité. Son secret ? Voir avec un ou deux temps d’avance pour mieux anticiper et amener tranquillou ses idées, sans heurts. Mais attention : Blanc la joue placide mais dur sur l’homme et en cela, la Fédé ne doit pas s’imaginer prendre un mouton adepte du consensus mou. Le bonhomme sait ce qu’il veut. Dernier exemple en date, la pression “amicale” mise sur ses dirigeants pour développer le club en agrandissant le stade, au lendemain de la qualif haut la main pour les huitièmes de la Champions’, donc en position de force. En clair, Blanc, peut-être plus encore que sur le pré, s’avère en coulisses un remarquable tacticien. Du genre à faire regretter Domenech ?
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