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Capone, l’âme barbue de Furiani
Mais qui es-tu vraiment, Capone, supporter le plus emblématique du SC Bastia ?
Quand on a connu le Furiani d’antan, on ne peut pas vraiment comprendre les stades aseptisés d’aujourd’hui. On parle d’une enceinte où l’on taquinait le juge de touche, et où une clameur rugissante se faisait entendre lorsque la micheline – le RER modèle réduit local – klaxonnait aux abords du stade. Modernité oblige, cet univers-là s’est forcément estompé. Cependant, au moins un élément subsiste : Capone. Sourire rieur, bonnet bleu, barbe de père Noël, et écharpe du Sporting noué sur les épaules, ce supporter particulier ne loupe pas une rencontre du SCB. Et ses chiens non plus.
Aujourd’hui, les canins se nomment Cahuzac, Palmieri, Squillaci et Croc-Blanche. Le nom d’un d’entre eux n’ayant aucun rapport avec les joueurs du club. Précédemment, Capone étaient accompagné de Laslandes, Vairelles et Ronjak (en l’honneur d’Anto Drobjnak, attaquant monténégrin passé par Bastia et Lens, NDLR), tous levés en triomphe en cas de but de leurs homonymes bipèdes. La cinquantaine, Jean-Pierre Capone de son nom complet vient de Lupinu, le quartier défavorisé du sud de Bastia où ont également grandi des joueurs comme François Modesto. Dans l’incapacité de financer un abonnement, Capone fait l’objet d’un passe droit rare dans le football moderne. Depuis des décennies, celui qui prétend avoir été ramasseur de balles « pieds nus » lors de la victoire du Sporting face au Torino en 1978, est un invité permanent.
Côté supporter, on retrouve la même tendresse. Dès ses premiers pas dans les travées d’Armand Cesari, on apprend ainsi à respecter ce personnage touchant. Plus que du respect, Capone est aimé, et soutenu par la communauté turchina. Ainsi, quand Capone ne se rend pas à Furiani en train et décide de faire le chemin à pied, une voiture s’arrêtera souvent sur le bas côté. Pareil pour le chemin retour. « Il y a toujours quelqu’un pour le ramener du stade » témoigne Lionel Dumas-Perini, ancien prestataire vidéo pour le club. « Personne ne se moque de lui, on l’aide. Une fois on l’a pris à Ajaccio pour faire les trois heures de route après le derby. C’était un bon moment, il a des milliers d’histoire à raconter. »
Des légendes sur Capone, il y en a assez pour faire un livre. Malgré ses maigres finances, le supporter n°1 du Sporting se débrouille aussi pour faire certains déplacements. Comme lors de la finale de la Coupe de la Ligue de 2015, où des fans se sont cotiser pour lui payer un billet d’avion. Lors d’un déplacement à Monaco en 2013, 400 Bastiais refusèrent aussi de quitter Louis II avant que le commissaire local ne restitue son chien à l’intéressé, après l’avoir confisqué au début de la rencontre. Mais son aventure la plus symbolique se déroula un peu plus au sud de la Côté d’Azur. À l’époque où les Aiglons squattaient toujours le stade du Ray, Bastia affronte Nice pour le fameux derby de la Méditerranée. Comme souvent, les supporters corses sont interdits de déplacement suite à un arrêté préfectoral. Personne ne sait exactement pourquoi ni comment, mais Capone décide de s’y rendre quand même. Emmitouflé de bleu, son chien mollement tenu en laisse, Capone se retrouve ainsi seul dans le parcage visiteur. Comme un symbole. Si un jour Bastia devient un club comme les autres, des éclats de rire incontrôlés se feront toujours entendre en tribune Claude Papi. Car, comptez sur lui, Capone trouvera toujours un moyen de rentrer à Furiani.
Thomas Andrei