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Blind, l’amour aveugle

Par Romain Duchâteau
Blind, l’amour aveugle

Dans la magnificence déployée par Manchester United cet été, entre des grands noms (Di María, Falcao) et des promesses (Shaw, Herrera), Daley Blind est arrivé sur la pointe des pieds. Le Néerlandais, acheté pour environ 18 millions d'euros, s'est pourtant déjà rendu indispensable. Parce qu'il apporte maîtrise, équilibre, consistance. Et s'inscrit pleinement dans la philosophie prônée par Louis van Gaal.

Ce fut le premier frisson du dernier Mondial. Peut-être même le plus grand. Un vol aussi soudain qu’esthétique dans le ciel de Salvador. Un saut de l’ange majestueux de Robin van Persie pour conclure d’une tête aérienne et amorcer le long calvaire d’une Roja aux abois. Si d’aucuns s’appesantiront longuement sur l’envolée du capitaine des Pays-Bas, les amoureux de la passe, eux, préféreront s’émouvoir de l’offrande qui lui fut destinée. « La beauté de ce but tient autant dans la réalisation de Van Persie que dans la qualité et la précision de la passe de Blind. Je suis très impressionné par ce garçon » , avait commenté l’ancienne idole brésilienne Zico, totalement charmé. Comment ne pas l’être ? Le long de sa ligne de touche, Daley Blind a su deviner l’appel et le déplacement de RVP pour lui adresser cette merveille de transversale, laissant la défense espagnole et Casillas abasourdis. Une inspiration lumineuse qui vaut alors à l’actuel joueur de Manchester United une mise en lumière légitime. Mais celui-ci n’a pas attendu le Brésil et une Coupe du monde majuscule afin de se faire un prénom. Car chez lui, aux Pays-Bas, il était déjà devenu quelqu’un.

Un lourd héritage paternel

C’est à l’Ajax Amsterdam qu’ont eu lieu ses premiers émois. Des débuts qui se sont révélés plus que tumultueux. Parce que Daley Blind a toujours dû cohabiter avec l’ombre de son père, Danny, ancienne pièce inamovible amstellodamoise (1986-1999) notamment pendant l’ère triomphante de Van Gaal. L’ombre a ensuite cumulé les postes éminents au sein du club, au lourd héritage à porter (17 titres majeurs dont la Champions League). Et cela, dès l’arrivée de Daley à l’âge de huit ans, à De Toekomst. Le bambin est confronté à la défiance des autres, lesquels jugent sa présence essentiellement due à l’influence de son paternel. Ces critiques ne vont que s’accentuer après ses débuts professionnels, en décembre 2008. Pourtant formé comme numéro 6 en catégorie des jeunes, le Néerlandais commence sa carrière ajacide comme latéral gauche. Un choix qui, au départ, s’avère calamiteux. « Il a commencé en tant que latéral gauche et on voyait vraiment qu’il n’avait pas été formé à ce poste, appuie Édouard Duplan, milieu de terrain du FC Utrecht depuis 2010 et qui a eu l’occasion de l’affronter à maintes reprises. Il n’est pas très rapide, pas forcément très costaud, des qualités que tu attends normalement de la part d’un latéral gauche. Il n’était pas franchement impressionnant. » Très peu utilisé durant le mandat de Martin Jol (mai 2009-décembre 2010), Blind doit attendre un prêt fructueux de six mois à Groningen, puis l’avènement de Frank de Boer et les départs successifs d’Emanuelson, Vertonghen et Anita pour prendre davantage d’envergure. Avant de devenir une pierre angulaire incontournable. Et de n’être plus que le « fils de » auprès des supporters de l’Ajax, qui lui consacrent ce chant : « Daley Blind, qui ne le connaît pas ? Daley Blind, Daley Blind est un vrai gars de l’Ajax » .

L’archétype du joueur intelligent

Au sein de l’immuable 4-3-3 ajacide et d’un style de jeu qui n’est pas sans rappeler le totaalvoetbal mis en place par de Boer, le gamin d’Amsterdam fait valoir ses qualités. Il s’érige comme l’un des acteurs majeurs du renouveau de son club, qui décroche en 2011 son premier championnat après sept ans de disette. Irréprochable dans son couloir gauche lors de l’exercice 2012/2013, Blind se voit offrir sa première sélection avec les Oranje en mars 2013. Une récompense logique au regard de sa progression continue. « Je l’ai clairement vu se développer. Il a appris à se positionner au fur et à mesure du temps pour devenir un vrai défenseur. Sa très bonne vision de jeu l’a également grandement aidé » , soutient Duplan, qui a été spectateur de l’évolution du Batave. « La technique est vitale et l’intelligence est fondamentale. Vous devez avoir des joueurs qui connaissent et comprennent le jeu, qui peuvent aussi s’adapter et ne pas simplement se contenter d’avoir une seule qualité ou caractéristique » , professait, un jour, l’élégant Xabi Alonso. À l’instar de l’Espagnol ou de Philipp Lahm, l’intelligence, la compréhension du jeu, c’est justement dans ce registre que Daley Blind excelle. Des aptitudes dont il a surtout fait étalage la saison dernière. Repositionné au poste de sentinelle devant sa défense, le fils de Danny a transfiguré le jeu de l’Ajax. Tout en simplicité. « Il a cette culture de l’Ajax. Cette façon de combiner, cette exigence aussi. Ce n’est pas un magicien, mais il a une « technique fonctionnelle » : contrôle-passe, rien de plus, explique le milieu d’Utrecht. Il ne part jamais dans des choses alambiquées. À l’instar de Strootman, par exemple. Quand on le regarde, on pourrait dire qu’il ne fait rien de spécial. Mais il a une telle importance dans le système de son équipe. Il se place parfaitement bien, se facilite la tâche et rend le jeu extrêmement simple. Blind, c’est exactement la même chose. » Épurer le jeu, le réguler, le simplifier, l’orienter, « l’oxygéner » aussi. Telle était sa tâche assignée et dont il s’acquittait avec une confondante aisance. Le Barça s’en souvient notamment, un soir de novembre 2013 en C1, où le Néerlandais éteint presque à lui seul le milieu catalan formé par Xavi, Iniesta et Song.

La relève de Carrick ?

C’est au terme d’une saison de patron où il remporte l’Eredivisie pour la quatrième fois d’affilée et empoche le Gouden Schoen (Soulier d’or récompensant le meilleur joueur de l’année en championnat) que le fils de Danny choisit de s’émanciper du cocon ajacide. Séduit par le profil du joueur qu’il a utilisé à bon escient comme piston gauche dans son 3-5-2 en sélection, un Louis van Gaal fraîchement nommé à la tête de Manchester United le convainc de le rejoindre dans les dernières heures du mercato estival. Frank de Boer l’assure alors, Blind est le joueur idoine pour les Red Devils : « Blind est un joueur d’équipe qui rend meilleurs ses coéquipiers. Tout ce qui fait a l’air facile, mais ce n’est pas le cas. United a désespérément besoin de ça. » Ses premières apparitions sous la tunique mancunienne viennent corroborer l’avis du coach néerlandais. « Sur ce que j’ai vu, il a bien rempli son rôle de sentinelle dans le milieu en losange aligné par Van Gaal en 4-4-2 (ou 4-3-1-2), constate Marc Keller, consultant à Canal + qui a commenté les deux premiers matchs du néo-Mancunien. Ce n’est pas quelqu’un qui prend énormément de risques. Il a vraiment ce rôle d’essuie-glace devant la défense. Au lieu de se contenter de faire des passes latérales, il n’hésite pas aussi à tenter de briser les lignes adverses. »

La « Tulipe de Fer »

Joueur polyvalent (défenseur central, latéral gauche ou milieu défensif), Blind semble destiné à s’épanouir en tant que numéro 6 à United. De là à en faire le successeur naturel de Michael Carrick, aujourd’hui sur le déclin mais joueur ô combien mésestimé durant ses plus belles années ? Le Batave pourrait s’inscrire dans la lignée de ces unsung heroes précieux qu’on ne remarque pas forcément quand la machine est bien huilée, mais dont l’absence se fait cruellement ressentir. « Il joue dans un registre similaire à celui de Carrick, conforte l’actuel président du RC Strasbourg. Il s’illustre davantage par la passe que par l’engagement, comme pouvait le faire par exemple Roy Keane à l’époque. Pour ses débuts, il semble s’être parfaitement acclimaté à la Premier League. Il a un rôle important à jouer et, pour le moment, il le remplit plutôt bien. » Les chiffres soulignent d’ailleurs la ressemblance avec son homologue anglais. Sur ses quatre premiers matchs*, Blind a, en moyenne par rencontre, joué énormément de ballons (83), réussi 87,3% de ses passes (dont 78,9% dans le camp adverse), puis réellement contribué aux tâches défensives (3 interceptions, 5 ballons récupérés et 3 tacles). Si l’élégant gaucher doit encore s’étoffer physiquement (58,3% de duels gagnés), la « Tulipe de Fer » , qui a toujours martelé que sa « manière d’entraîner passe par le cerveau et non les jambes » , s’en est déjà amouraché. « C’est un joueur qui peut voir les situations en avance, louait-il en septembre. Il est aussi capable de courir 90 minutes sans perdre de sa lucidité. Peut-être que c’est un meilleur joueur que son père, mais ce n’est pas encore un leader. Toutefois, c’est une chose qui se travaille. » À vingt-quatre ans, il a encore tout le temps afin de le devenir. Pour éblouir l’Angleterre, aussi. Histoire de faire honneur à son prestigieux patronyme.

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Par Romain Duchâteau

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