Ciao, calcio
Cette soudaine mise au placard du foot transalpin n'a sûrement rien de bien mystérieux. L'Équipe a même partiellement défini les contours du problème. D'un, des négociations seraient en cours au sujet de l'indemnisation réclamée par beIN Sports à la Lega Serie A, pour compenser le préjudice causé par l'épidémie de Covid-19 depuis le mois de mars. Elles n'ont néanmoins débouché sur encore rien de concret. De deux, le football italien fait désormais affaire avec l'Arabie saoudite, où se joue depuis l'exercice 2018-2019 la finale de la Supercoupe d'Italie. Un rapprochement que goûterait fort peu la chaîne qatarie, dont les programmes sont toujours notoirement piratés par un canal illégal, beoutQ. Une chaîne dont « le signal pirate est transmis par le fournisseur satellite basé à Riyad, Arabsat, dont le principal actionnaire est le Royaume d'Arabie saoudite » , détaille Tom Keaveny, le directeur général de beIN Media Group.
Fort bien, mais, au milieu de tout ça, les abonnés de beIN peuvent légitimement se sentir floués. Plus que l'absence effective de la Serie A, c'est la communication minimaliste de la chaîne qatarie à ce sujet qui interpelle. Au lieu de prévenir ses abonnés à renfort de messages sur les médias sociaux et de communiqués à destination de la presse généraliste ou spécialisée, beIN s'est enfoui la tête dans le sable, en faisant presque comme si de rien n'était. C'est seulement quand ses abonnés, excédés, ont fini par demander des explications sur Twitter, que ces derniers ont eu droit à un retour gêné et peu explicite : « Bonjour, nous vous informons que les matchs de la Serie A n'ont pas été diffusés ce week-end, et nous nous excusons pour ce désagrément. Bien cordialement. »
Bonjour, Nous vous informons que les matchs de la Serie A n'ont pas été diffusés ce week-end et nous nous excusons pour ce désagrément. Bien cordialement.
— beIN SPORTS (@beinsports_FR) June 22, 2020
Ni satisfaits ni remboursés
Voilà qui ne risque pas d'améliorer le rapport déjà tendu qui existe entre les diffuseurs et les spectateurs français. L'hyper morcellement de l'offre télévisuelle n'est déjà pas à l'avantage des seconds, qui doivent souscrire à plusieurs abonnements onéreux pour regarder du football, mais à celui-ci s'ajoute désormais la compétence discutable des ayants-droit. Le fiasco de RMC Sport, lorsque la chaîne avait commencé à diffuser la C1 en 2018, ne sera pas oublié de sitôt, l'impasse de beIN sur la Serie A non plus. Dans un tel contexte, l'arrivée de Mediapro sur le marché français s'annonce pour le moins rock 'n' roll, alors que la chaîne proposera huit matchs de Ligue 1 par journée et la diffusion de la Ligue 2, pour 25 euros par mois.
L'alternative de l'offre illégale semble dès lors de plus en plus séduisante, face à des diffuseurs dont le contenu semble pour la plupart aussi onéreux que peu fiable. Nul besoin d’être un grand explorateur de l'internet pour trouver des streaming en qualité HD de nos jours, et l'IPTV semble déjà avoir convaincu un bon paquet de fans de foot, lassés de mettre chaque saison encore un peu plus la main au porte-monnaie. Reste à voir si les ayants-droit en France finiront pas réagir, en améliorant leur contenu et leur communication. Dans le cas contraire, on ne s'étonnerait pas que les diffuseurs finissent par payer leurs ratés successifs, en voyant leur nombre d'abonnés diminuer, d'année en année.
Par Adrien Candau
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