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Barzagli, le roc qui fait pleurer les vagues

Par Markus Kaufmann
Barzagli, le roc qui fait pleurer les vagues

Et s'il était le seul vrai dernier défenseur à l'italienne ? Depuis maintenant quatre saisons et demie à la Juve, le buste droit et la posture élégante d'Andrea Barzagli gagnent des duels tous les week-ends sans transpirer. Propre, fort, intelligent et précis, Barzagli n'a jamais besoin de se jeter ou de monter en attaque pour se montrer brillant. Un profil qui contraste avec les centraux modernes à la Sergio Ramos et David Luiz. Un profil à l'ancienne que le football voit disparaître. Parce que le roc n'est plus à la mode.

« Je dis toujours que l’attaquant est un fantaisiste que le défenseur doit annuler. À l’époque, le défenseur avait vraiment un second rôle : il bougeait seulement en fonction de son attaquant. Eux, ils faisaient. Et nous, on les empêchait de faire » , raconte aujourd’hui Tarcisio Burgnich sur ce football moderne qu’il aime observer avec l’expérience d’un vieux rocher. Surnommé la Roccia (le roc) dans les années 1960, l’Italien était le stoppeur de la grande Inter de Herrera à une époque où les défenseurs devaient se contenter de défendre. Condamnés à annuler, ils étaient alors jugés sur leur faculté à contenir leurs adversaires sans faire de faute ni d’erreur. Le défenseur devait être méchant, sobre et précis : c’était un bouclier désarmé. Puis, bien aidé par l’envol du libéro, le rôle a évolué. Et en 2015, cette évolution a mis au monde des défenseurs centraux fantasques, de Sergio Ramos à David Luiz en passant par Gerard Piqué. Armé d’accessoires offensifs exubérants et de qualités athlétiques parfois hors normes, le défenseur moderne aime compenser une erreur, un espace égaré, une faute de trop.

À la suite du match nul entre l’Inter et la Juve hier soir, Allegri a déclaré en conférence de presse que « si on avait été des tueurs en attaque comme Barzagli l’a été en défense, c’est certain qu’on aurait gagné » . Andrea Barzagli est lui aussi surnommé la Roccia. Un roc d’1m87 pour 87 kilos, très terre à terre, bâti pour encaisser les assauts des vagues sans broncher. Mais s’il n’a pas le physique aérien de ces défenseurs étoilés capables de survoler les lignes, Barzagli a le sens du jeu du stoppeur italien à l’ancienne. Et aujourd’hui, à 34 ans, ses performances parfaites ressemblent fortement aux vestiges de ce défenseur qui éloignait le ballon en touche avec le sourire de celui qui a accompli sa mission. Celui qui était là pour annuler, et pour rien d’autre. Sauf que Barzagli a aussi le goût de conserver élégamment les ballons qu’il vole avec autorité.

De la Serie D à la Coupe du monde 2006

Avant d’atterrir dans la Juve de Delneri en janvier 2011, à 30 ans, Barzagli a connu sept clubs : Rondinella, Pistoiese, Ascoli, Piacenza, Chievo, Palerme et Wolfsburg. Une carrière qui a tout connu, en somme. La Coupe du monde à Berlin en 2006 en tant que remplaçant (il joue un match et demi du fait de la blessure de Nesta et de l’expulsion de Materazzi en huitième), mais aussi une promotion en Serie C2 (quatrième division italienne) à 18 ans avec le club de Rondinella. Lorsqu’il débute en Serie A avec le Chievo, à 22 ans, le défenseur a tout simplement joué dans toutes les divisions inférieures : Serie B, Serie C1, Serie C2 et même Serie D (Dilettanti). À travers toutes ces catégories aux pelouses plus ou moins cabossées, Barzagli a dû rencontrer toutes sortes d’attaquants plus ou moins extraordinaires. Des ersatz de Roberto Baggio à l’accélération motrice, des géants à la Luca Toni, des promesses qui n’ont finalement pas été entendues, et des espèces de renards diverses et variées. Peu importe, mais c’est bien face à cette diversité offensive du terroir italien que Barzagli a forgé sa lecture du jeu, son sens de la position et sa concentration.

Une recette qui l’a mené à se faire repérer par Maurizio Zamparini. Direction la Sicile. À Palerme, Barzagli arrive avec le numéro 43, mais devient rapidement le capitaine d’une escouade avide d’escapades européennes. Aux côtés de Christian Zaccardo, Barzagli part au Mondial 2006, puis signe à Wolfsburg en 2008 pour la belle somme de 11 millions d’euros. Barzagli et Zaccardo sont alors inséparables. Repérés en Sicile, champions du monde sur le banc, champions de Bundesliga comme des grands. Mais alors que Barzagli participe au 0-3 de l’Euro 2008 contre les Pays-Bas, le droitier est banni de la Nazionale de septembre 2008 à octobre 2011. Quand il revient en Italie en janvier 2011, le football italien se remet péniblement des adieux de Paolo Maldini et Fabio Cannavaro. Et il croit donc accueillir un Zaccardo qui a apprécié son séjour germanique, c’est-à-dire un second couteau de 30 ans, en quelque sorte.

Vieux et méticuleux

Mais à Turin, Barzagli redevient la Roccia. Un défenseur intransigeant capable de rassurer les milieux les plus craintifs. Au fond à gauche, là où l’ailier gauche a l’habitude d’établir sa loi, Barzagli marque son territoire avec la concentration minutieuse d’un démineur. Défenseur central dans une défense à quatre, défenseur central droit dans une défense à trois, voire latéral droit, Barzagli impose le même régime à la spontanéité de ses adversaires : des duels gagnés sans transpirer, des anticipations malignes et une relance rarement spectaculaire, mais toujours ingénieuse. Et les vagues s’écrasent, encore et encore. Alors qu’il couvre un Lichtsteiner qui passe son temps à se gaver des courbes de Pirlo, Barzagli est logiquement élu parmi l’équipe type de Serie A en 2012, 2013 et 2014. Après deux saisons, l’importance de sa présence se chiffre de façon spectaculaire : la Juve comptabilise 2,14 points gagnés et 0,58 but encaissé par match avec lui (87 rencontres, 9 défaites), et 1,67 point gagné et 1,13 but encaissé sans lui (30 rencontres, 6 défaites). Bonucci est follement audacieux (à lire : Bonucci, vice-Pirlo et libéro moderne), Chiellini est diablement besogneux, Barzagli est sobrement méticuleux.

En quatre saisons, le Toscan ne passe jamais au-dessus de 0,7 faute par match. La saison passée, il commettait même seulement une faute tous les trois matchs, soit quatre fois moins que Giorgio le gorille. Absent des terrains de juillet 2014 à mars 2015 à cause d’une cheville capricieuse (10 rencontres de Serie A disputées l’an dernier), Barzagli ne devait plus jamais retrouver son niveau de jeu. Mais cette saison, la solidité du roc est de retour. Et le positionnement de Cuadrado à droite du 3-5-2 a même bouleversé la structure de la possession de la Juve : à 34 ans, Barzagli est devenu la première option de relance de la manœuvre turinoise (71 passes par match). Contre l’Inter, c’est sa polyvalence tactique qui a une nouvelle fois permis à la Juventus de passer aisément du 3-5-2 (et même 3-4-3) au 4-4-2. Parce que Barzagli ne se perd jamais et sait toujours où trouver ses coéquipiers. Les vagues ont beau s’élever par milliers, la mer a beau se déchaîner, les matelots ont beau aboyer, le roc ne cède pas un centimètre. Intransigeant, incorruptible, impassible. Méchant, même. Il ne sèche même pas leurs larmes.

Dans cet article :
Gerard Piqué : la révolution en pantoufles
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