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Didier Deschamps, seul dans l’ennui

Pour la premiÚre rencontre des Bleus post-Euro raté, Didier Deschamps a confirmé face à la Bosnie (1-1) qu'il n'allait pas tout changer, au point parfois de s'enfermer dans ses lubies, et surtout que l'ennui serait toujours de la partie avec l'équipe de France. Le sélectionneur aurait-il dû passer la main cet été ? La question finira par se poser dans les prochaines semaines en cas de nouveaux résultats décevants, alors que le double champion du monde sera automatiquement plus fragilisé aprÚs chaque contre-performance française.
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Ne lui parlez plus de lâEuro, le tournoi itinĂ©rant de lâĂ©tĂ© dernier est dĂ©sormais dans le rĂ©tro de Didier Deschamps. La soirĂ©e cauchemardesque face Ă la Suisse remonte Ă un peu plus de deux mois, mais elle doit dĂ©jĂ se transformer en un lointain souvenir. «âJâai Ă©tĂ© amenĂ© Ă communiquer en fin de semaine derniĂšre par rapport Ă ce quâil sâĂ©tait passĂ© Ă lâEuro en sĂ©parant ce quâil sâest passĂ© et ce qui nous attend, qui est le plus important, rĂ©pĂ©tait mĂ©caniquement DD en confĂ©rence de presse quelques jours aprĂšs avoir accordĂ© un long entretien Ă LâĂquipe. Cet Euro fait partie de notre historique. Maintenant, lâimportant, câest ce quâil y a devant nous.â» Vraiment ? Ce mercredi soir, la rentrĂ©e des classes de lâĂ©quipe de France, tenue en Ă©chec par la Bosnie Ă Strasbourg (1-1), est venue rappeler que le grand changement nâĂ©tait pas pour maintenant.
Ramener le doute Ă la maison
Didier Deschamps nâest de toute façon pas un adepte des rĂ©volutions, que ce soit sur le terrain ou en dehors. Les 20 000 supporters dĂ©chaĂźnĂ©s prĂ©sents dans les travĂ©es de la Meinau ont eu le droit Ă un copier-coller de lâEuro : le mĂȘme trio offensif indĂ©boulonnable (MbappĂ©-Benzema-Griezmann) â il a fallu attendre le dernier quart dâheure pour voir entrer Martial et Coman, souvent bon en sĂ©lection â qui fait davantage rĂȘver dans les gazettes que sur le terrain ; la mĂȘme prestation catastrophique de KoundĂ©, dĂ©finitivement pas fait pour jouer latĂ©ral droit ; les mĂȘmes agacements ; la mĂȘme charniĂšre centrale bancale ; les mĂȘmes entĂȘtements de MbappĂ© ; les mĂȘmes discours ronronnants ; le mĂȘme costume sombre du technicien français. La mĂȘme histoire, en somme. Les bizuths Veretout, TchouamĂ©ni et Diaby, qui a eu le droit Ă une poignĂ©e de secondes en fin de rencontre, nâont pas eu le temps dâapporter un vĂ©ritable vent de fraĂźcheur sur une Ă©quipe assurĂ©ment marquĂ©e par lâĂ©chec du dernier Ă©tĂ©. «âIl y a toujours des pages qui se tournent, oui, Ă moins que les joueurs la tournent eux-mĂȘmes, mais câest rare, expliquait Deschamps dans LâĂquipe en aoĂ»t, prĂ©parant ainsi lâabsence attendue de Giroud. AprĂšs les compĂ©titions, il y a des relais Ă prendre.â» Une rĂ©flexion qui aurait pu sâappliquer au sĂ©lectionneur, aussi titrĂ© et important dans lâhistoire du football français soit-il.
Deschamps, lâĂ©preuve dâinconfort
Didier Deschamps connaĂźt le ballon par cĆur, lĂ nâest pas la question. Quand il a envie, il paraĂźt mĂȘme que lâancien capitaine des Bleus peut ĂȘtre passionnant quand il abandonne sa traditionnelle langue de bois pour parler de jeu. Mais cela ne lâempĂȘche pas dâinsister avec des lubies qui lui appartiennent. «âQuand je vois que ça ne marche pas, je change, je ne vais pas mâentĂȘterâ», balayait-il la semaine derniĂšre. Comment expliquer alors le positionnement de Jules KoundĂ© face Ă la Bosnie quand on se souvient de son match infernal contre le Portugal au mois de juin ? Comment justifier la prĂ©sence automatique du trident offensif, certes sĂ©duisant sur le papier, mais qui nâa presque rien changĂ© aux problĂ©matiques de jeu des Bleus ? Surprise : Olivier Giroud nâĂ©tait pas le responsable des maux français ni des parties ennuyeuses proposĂ©es aux amoureux des Tricolores ces derniĂšres annĂ©es.
Ă force de sâaccrocher Ă un poste quâil aurait pu quitter de lui-mĂȘme en conservant son aura, le double champion du monde ne risque-t-il pas de perdre ses derniers dĂ©fenseurs ? Ces derniĂšres semaines, Deschamps a rĂ©pĂ©tĂ© quâil nâavait pas perdu «âsa forceâ» ni «âson envieâ». «âJe ne veux pas continuer pour continuer, assurait-il. LâĂ©quipe de France, câest la plus belle chose qui me soit arrivĂ©e professionnellement, et en tant que joueur, jâai pris lâinitiative de tirer le rideau moi-mĂȘme. Je veux continuer parce que mon envie et ma dĂ©termination sont intactes, parce que je connais bien ce groupe et que je suis convaincu quâil peut faire de belles choses.â» AprĂšs quasiment une dĂ©cennie dans son costard bleu marine, Deschamps aurait pu se servir des expĂ©riences rĂ©centes de Vicente del Bosque, Joachim Löw ou Fernando Santos pour comprendre Ă quel point la mission de rebondir aprĂšs avoir connu lâĂ©chec Ă©tait pĂ©rilleuse, voire impossible. Les deux premiers en ont fait les frais trop tardivement, le troisiĂšme est dans une situation similaire. ProgrammĂ© pour sâemparer du poste un jour ou lâautre, ZinĂ©dine Zidane patiente discrĂštement dans son coin, sans que lâon ne puisse garantir quâil puisse transformer lâennui en excitation avec cette Ă©quipe de France. Deschamps, lui, est toujours lĂ , et son totem dâimmunitĂ© pourrait bien ne plus suffire dans les semaines Ă venir si les Bleus ne renouent pas avec la notion de plaisir.
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Par Clément Gavard