Comment est né ton amour pour le foot ?
Je dirais que mon histoire avec le foot a commencé le soir de France-Allemagne à Séville, en 1982. J’avais sept ans et je me souviens avoir vu ce match avec mon père. Je n’ai pas de souvenirs précis du match en lui-même, mais je me rappelle encore l’état d’hystérie dans lequel se trouvait mon père devant cette rencontre, c’est quelque chose qui m’a profondément marqué. Après ça, je m’y suis de plus en plus intéressé et, dès huit ans, j’ai commencé à jouer tous les jours, que ce soit dans la cour de l’école ou en dehors avec mes potes. J’ai même joué en club de 10 à 25 ans. Jeune, le foot était vraiment ma priorité absolue, avant les filles et tout le reste. C’était, et c’est encore aujourd’hui, une vraie passion.
Et est-ce que tu avais un niveau qui te permettait de viser une carrière professionnelle ?
Je pense que j’avais plutôt un niveau correct. Après, il faut aussi avoir des parents qui acceptent de te laisser choisir cette voie très jeune. Pour moi, ça a bloqué très rapidement. Je me rappelle avoir passé les sélections pour jouer en équipe des Yvelines. Bon, ce n’était pas le top niveau, mais c’était déjà cool, on était 500 au départ, et j’avais terminé dans les trente derniers ce qui me permettait de faire un stage derrière, mais mes parents n’ont jamais voulu que je le fasse. Il devait y avoir un truc de prévu chez mes grands-parents ce week-end-là, donc je n’ai pas eu mon mot à dire (rires). Au final, je n’ai jamais eu de réelles ambitions, même si je pense que j’avais mon petit niveau.
Quelle équipe te faisait vibrer à l’époque ?
Bordeaux ! Quand j’ai commencé à m’intéresser au foot, j’ai tout de suite cherché à soutenir une équipe, et comme j’étais né à Bordeaux, mon cœur a penché pour les Girondins. C’était pendant les années 80, ce qui correspond à l’une des grandes périodes du club, donc ça tombait super bien. Depuis, je ne les ai jamais lâchés, et ça fait trente piges que je supporte les Girondins.
Et l’idole absolue, c’était qui ?
Platini, évidemment ! Tu ne peux même pas imaginer l’amour que j’ai pour ce type. Gamin, ce n’était même pas une idole, c’était presque une raison de vivre. J’étais littéralement fou de ce gars-là, je connais toute sa vie : né à Jœuf le 21 juin 1955, fils d’Anna et Aldo, tu peux y aller, je suis incollable (rires). Pendant des années, je suis allé à l’école avec une pochette en cuir, et quand tu l’ouvrais, il y avait une photo de Platini à la Juve et une autre de lui en équipe de France. Pour son dernier match en Serie A avec la Juve, le 17 mai 1987 contre Brescia, j’avais les larmes aux yeux, c’est vraiment un truc de malade. Pour moi, il représentait tout ce que j’aimais dans le foot : la classe, le côté meneur d’hommes, bref, il avait tout.
C’est quoi ton meilleur souvenir footballistique ?
Putain, il y en a trop, c’est pas possible. L’un des plus ouf, c’est évidemment Bordeaux-Milan, en 1996 il me semble, avec cette victoire 3-0 alors qu’on avait perdu 2-0 à l’aller. Je mettrais peut-être le PSG-Real de 1993 avec la tête de Kombouaré à la dernière seconde. Et tu sais pourquoi ? Tout simplement parce que Michel Platini, qui est aux commentaires, annonce à ce moment précis que le PSG va marquer le but de la qualification. Et j’ai chialé, juste parce que Platini l’avait annoncé (rires). Le pire, c’est que je ne suis même pas supporter du PSG, hein. Bon après, forcément, il y a la finale de l’Euro 2000 avec ce but égalisateur de Wiltord à la dernière seconde. France 98, aussi, c’était merveilleux, mais la finale était pliée à la mi-temps, donc on n’a pas connu la même émotion que lors de la victoire à l’Euro, deux ans plus tard. Et puis, je ne vais pas oublier l’Euro 1984, où Michel Platini marche sur l’eau, tout simplement. Putain, c’est beau, le foot, quand même.
Et la plus grosse déception ?
Il y en a beaucoup aussi, mais la plus grosse, et de très loin, c’est la finale de 2006. Il n’y a rien au-dessus de ça, c’est clair. En plus, je commençais tout juste à me remettre de Séville 82. Après 24 ans, j’avais presque fait mon deuil, j’allais de moins en moins chez mon psy, et là, bim, ils nous foutent cette défaite absolument terrible. Le pire dans tout ça, ce qui hante encore mes nuits, ce n’est pas le coup de boule de Zidane contre Materrazzi, c’est vraiment cette putain de tête qu’il met quelques minutes avant et que Buffon sort miraculeusement. Imagine si Buffon ne la sort pas, c’est un truc de malade, Zizou devient président, c’est une statue de lui dans toutes les cours d’école, c’est des collèges à son nom. Ça aurait été formidable, il aurait mis deux doublés en deux finales, remporté les deux finales, avec une panenka au milieu, putain…
Comment est-ce que tu en es venu à écrire une chronique sur le foot dans Le Monde ou à intervenir sur L’Équipe 21 ?
Je sais pas trop. Avec ma visibilité, ça a commencé à se savoir que j’étais un fan absolu de foot, j’ai commencé à faire des matchs pour des œuvres caritatives, des trucs comme ça, et puis un jour, Damien Dubras, qui travaille à L’Équipe, m’a branché pour venir faire un truc avec eux, et j’ai donc fait ça pendant une saison avec Olivier Ménard. Pour Le Monde, c’est Sophia Aram, qui écrivait une chronique pour eux, qui m’a branché en disant au patron des sports, Stéphane Mandard, qu’elle connaissait quelqu’un qui était fan de foot, en l’occurrence moi, et puis ça s’est fait comme ça. Et voilà, je continue à écrire une chronique mensuelle dans les pages du Monde. C’est super car j’ai carte blanche, j’essaie de ne pas être trop plat dans ce que je dis, mais ça passe plutôt bien. En tout cas, c’est un exercice qui me plaît vraiment.
Tu me parles des matchs caritatifs, avec qui tu as eu l’occasion de jouer lors de ces rencontres ?
J’ai joué avec Lizarazu, Blanc, Pirès, pas mal de mecs de 1998. C’était vachement impressionnant pour moi. Et celui qui m’a le plus impressionné, je pense que c’est Laurent Blanc, il est encore vraiment fort. Je me souviens que lorsque j’ai joué avec lui, je jouais milieu de terrain, et à un moment donné, il me fait une superbe passe bien appuyée, et là dans ma tête, je me dis : « Putain, t’es en train de recevoir une relance de Laurent Blanc, quoi. » Et forcément, le ballon est passé sous ma semelle, et je me suis tapé la honte (rires). Je peux même te dire que j’ai marqué un but pour l’association ELA sur une passe décisive de Christian Karembeu, c’est la classe quand même. C’est vraiment un énorme kif d’avoir pu jouer avec ces mecs-là.
Pardon d’avoir douté, Rayan Cherki