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Aliadière : même joueur, nouvelle partie
Une course, un saut et un sourire qui en disent long. Acteur principal du match totalement fou entre Lorient et Ajaccio hier (4-4), sur la pelouse du Moustoir, Jérémy Aliadière s’offre, à 29 ans, une nouvelle jeunesse. Sa première, en fait.
On aime excuser les premières bêtises des joueurs qui ont passé leur jeunesse dans les centres de formation du fait qu’une adolescence passée à jouer à la Playstation et à s’entraîner n’épanouit pas vraiment. Jérémy Aliadière n’a pas eu le temps de faire ce genre de conneries. Sorti de Clairefontaine où il était la pépite de sa génération, le Lorientais fait partie de ces types qui ont grandi un peu trop vite et à qui la vie a décidé de mettre une grosse claque. Des sous, une reconnaissance du milieu footballistique et un exil précoce vers Arsenal, une trajectoire ascendante avant une chute vers les abysses, que Red Bull aurait très bien pu sponsoriser. Treize ans après son arrivée surprise chez les Gunners, c’est un peu plus au sud, en terres bretonnes, qu’Aliadière profite de sa première vraie jeunesse. Celle du plaisir, de l’insouciance et surtout, du football. Très loin des blessures et de cette éternelle poisse qui a miné la carrière d’un joueur brillant.
Une belle poisse
De la finesse sur le premier, une belle détente sur le second et toujours ces cris et ce regard de celui qui donne tout car il n’a plus rien à perdre. Hier, en scorant un doublé important lors d’un match fou fou fou face à Ajaccio, Jérémy Aliadière a rallumé le poste radio sur la fréquence 90.4 : Nostalgie raisonnait dans le Moustoir. L’histoire du natif de Rambouillet, c’est celle d’un type qui, par la force des choses, a appris à ne pas être pressé. Si tout est parti très vite dans la carrière de l’ancien de Clairefontaine, le destin s’est chargé d’appuyer sur le frein. Au final, à 29 ans, Aliadière compte moins de 200 matchs chez les professionnels. C’est peu, trop peu pour un type qui éclipsait ses jeunes partenaires sur le synthétique couvert du centre de formation situé dans les Yvelines. Mais c’est aussi logique quand on sait que la poisse a choisi d’épouser la courbe de progression d’un joueur fragile, qui ferait passer Abou Diaby pour monsieur Indestructible. En fait, cela fait à peine quatre ans qu’Aliadière a cessé d’être intermittent du spectacle. Trois saisons à Middlesbrough entre 2007 et 2010 – les premières de sa carrière où il dispute plus de 20 matchs – et enfin, un retour en France. Un retour qui sonne comme une arrivée, une découverte, pour un type qui n’a jamais foulé une pelouse française avant son transfert à Lorient. Un exotisme certain qu’il aurait pu découvrir avant quand, après des essais convaincants mais sans pouvoir décrocher de contrat, à West Ham et Blackpool notamment, on lui proposait d’exiler ses pansements en Iran, en MLS, en Thaïlande ou en Corée du Sud.
Son record de buts…
En bon père de famille, Jérémy a choisi la stabilité. L’Angleterre et donc la France, à Lorient où, en marquant ce doublé décisif, il atteint avec 5 buts en une saison, le plus haut total de sa carrière (à égalité avec la saison 2007-2008). S’il a déjà tiré un trait sur la possibilité de disputer pour la première fois de sa carrière une saison pleine, la faute à une blessure à la cuisse, Aliadière, 8 matchs cette saison, espère bien atteindre la barre des 30, à 29 ans. Un souhait que partagent nombre de ses coéquipiers, ravis d’avoir un attaquant mobile et adroit à qui filer des ballons. Car depuis le départ de Gameiro et malgré toute l’affection que l’on peut avoir pour les coups de pagaie de Marama Vahirua, cette équipe, que l’on a décidé de catalaniser, se cherche un type capable de conclure des actions et les temps forts. Et à vrai dire, ce n’est pas tous les jours qu’un type conquérant comme un jeune de 20 ans mais expérimenté comme un trentenaire a l’occasion d’écrire sa première vraie page sportive à la pointe de votre attaque.
Par Swann Borsellino