- Coupe du monde 2018
A-t-on été trop sévère avec l’Italie ?
En novembre dernier, le cataclysme de l'élimination de la Squadra Azzurra face à la Suède avait fait rire la planète entière. Sauf qu’aujourd’hui, les joueurs de Janne Andersson sont en quarts de finale d’une Coupe du monde et ne font plus rire grand monde.
On en viendrait presque à se demander si les Italiens n’ont pas le don pour, à chaque fois, rencontrer l’équipe surprise lors des grandes compétitions. Depuis le début du millénaire, lorsqu’elle n’a pas gagné ou terminé les yeux pleins de larmes comme en 2000 et 2012, elle a plus que souvent trébuché sur un caillou qui n’avait rien à faire là. Avec la Corée du Sud en 2002, le Paraguay huit ans plus tard seulement sorti en quarts 0-1 par le futur champion du monde et l’inattendu Costa Rica en 2014, le refrain a d’ores et déjà pris des allures de gimmick indémodable.
Et puis est donc arrivé le tour de la Suède en novembre 2017. Une formation sans stars, orpheline de Zlatan Ibrahimović, dirigée par un sélectionneur sans expérience majeure hors de Suède qui n’aurait pas dû poser problème sur le papier. Même à une Italie malade. Mais cette fois, pire qu’en 2010 ou 2014 où elle avait été invitée à quitter la fête dès la fin de l’apéritif, l’Italie a tout simplement été privée d’invitation par ces grands gaillards solidaires. Tout le monde s’est ému, les Italiens les premiers, de ne pas participer à l’événement de l’année qu’ils n’avaient plus loupé depuis 1958. Cette année-là, d’ailleurs, ces ogres suédois se hissaient jusqu’en finale de leur Coupe du monde pour écrire les plus belles lignes de leur histoire. Troublante coïncidence.
Chronique d’une présence annoncée
Au-delà de cette analogie, il ne faut pas non plus faire passer cette Suède pour un cador favori à la victoire finale. Seulement rappeler qu’à défaut d’avoir un nom ronflant et des têtes d’affiche alléchantes, la Suède est quand même loin de l’image d’équipe de bras cassés qui lui était parfois prêtée. À titre d’exemple, elle est la seule équipe depuis la finale de l’Euro à avoir battu les Bleus en match officiel. Certes sur une bourde monstrueuse d’Hugo Lloris, mais quand même. Longtemps, les Suédois ont fait trembler les Bleus en vue de la première place du groupe, eux qui avaient flanqué un 8-0 cinglant au Luxembourg trois jours seulement après que les protégés de DD ne concèdèrent un piteux 0-0 face à ces mêmes Luxembourgeois au Stadium.
Depuis le début du Mondial, les Jaune et Bleu n’ont concédé que les réalisations allemandes chanceuse puis magnifique de Reus et de Kroos en guise de points noirs à leur actif. Le reste ? Une victoire plutôt maîtrisée face à la Corée du Sud d’entrée, une taule infligée à la hype mexicaine et enfin un match remporté au bout de l’ennui face à la Suisse. Les réseaux sociaux s’amusent du fait que depuis la boulette de Lloris, la Suède aurait donc éliminé les Pays-Bas, l’Italie et l’Allemagne. Si dans les faits, la théorie est un peu discutable par rapport à la Mannschaft, elle est loin d’être dénuée de sens. Parmi les huit dernières équipes encore en lice pour toucher du doigt le Saint Graal, il n’y a ni l’Espagne, ni l’Allemagne, ni le Portugal ou encore l’Argentine. La Suède, elle, est encore présente.
La Suède, et personne d’autre
Bien sûr, tout cela ne serait probablement pas arrivé si l’Italie avait tenu son rang, n’avait pas loupé son virage générationnel ou ne s’était pas lourdement trompée sur le choix de son sélectionneur. Si l’Italie avait su marquer au moins un but lors de cette double confrontation où elle n’a jamais réussi ou presque à créer de danger, tombant comme d’autres aujourd’hui sur un bloc compact et solidaire. On se dit même qu’elle aurait peut-être pu potentiellement faire quelque chose, ou tout simplement se ramasser comme la plupart de ses compagnons d’armes habituels. En attendant, un pays tout entier profite du moment, tandis que l’autre regarde ça avec des yeux remplis d’envie. Avec au passage, un début de vérité qui commence à se dessiner pour tout le peuple italien : oui, la Suède méritait bien sa place pour ce Mondial. Et sûrement plus que son équipe.
Walid Regragui ne sait pas qui est l’attaquant de l’ItaliePar Andrea Chazy