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15 juin 1915 : Charles Simon, mort pour la France, le foot et Dieu…

Par Nicolas Kssis-Martov
15 juin 1915 : Charles Simon, mort pour la France, le foot et Dieu…

Le 15 juin 1915 s'effondrait sur le front d'Artois, quelque part du coté d'Écurie dans le Pas-de-Calais, un certain Charles Simon. Ce simple soldat du 205e régiment d'infanterie, un parmi les plus de 100 000 morts français de cette terrible bataille, va pourtant laisser son nom dans l'histoire. En effet, la première Coupe de France sera dotée en son honneur d'un trophée portant son patronyme. Surtout ce Parisien de naissance, ancien joueur de l'Étoile des Deux Lacs, illustre l'importance des catholiques à crampons dans l'essor initial du foot français. Et aussi l'avènement de la nouvelle religion du ballon rond.

Charles Simon est né en 1882, dans une famille bourgeoise de la capitale, plutôt portée sur la messe. Il fréquente donc très tôt les patronages, notamment celui de la paroisse de Saint-Honoré d’Eylau (dans le 16e arrondissement). L’église catholique a fait de ces « œuvres » le ferment de sa résistance face à cette gueuse de République qui est en train d’emporter le morceau et « sa fille aînée » par la même occasion. Les temps sont au changement, et certaines soutanes le comprennent fort bien. Le pape Léon XIII publie son encyclique « Rerum novarum » en 1891 pour inciter les chrétiens à se confronter aux enjeux des temps modernes, ceux du capitalisme triomphant, plutôt que de rêver d’un éternel retour à l’ordre ancien. Dans cette lancée, quelques audacieux pensent que la reconquête d’une jeunesse désormais obligée de se scolariser (depuis 1882) dans les écoles des hussards noirs de Jules Ferry, passe par la conversion non seulement des esprits, mais aussi des corps. La nouvelle mode des sports, souvent d’inspiration anglo-saxonne, s’impose petit à petit à la fin du dix-neuvième, début vingtième, comme un viatique incontournable pour accomplir cette ambitieux projet d’évangélisation (ainsi le pape Pie X reçoit le très conservateur baron de Coubertin dès 1905 et fournit son appui moral à des Jeux olympiques à Rome).

Football balbutiant et footeux laïcs

Parmi ces disciplines athlétiques, le Football Association (encore largement à l’ombre du football rugby dans l’Hexagone) récolte en particulier les faveurs des patrons. Dans le club de l’Étoile des Deux Lacs (ceux du bois de Boulogne), le jeune Charles Simon, accompagné d’Henri Delaunay (qui disputera plus tard à Jules Rimet la paternité de la Coupe du monde) se prend d’un amour profane et exalté pour les matchs à onze contre onze. Il grimpe vite les échelons au sein de la Fédération sportive et gymnique des patronages de France (fondée en 1898, aujourd’hui FSCF) ou il prend la responsabilité de la commission Football (tout en militant au niveau international en faveur du sport catholique). Mais l’histoire rattrape ce football balbutiant d’à peine quelques milliers de pratiquants forcenés et convaincus.

La loi concernant la séparation des Églises et de l’État est en effet promulguée le 9 décembre 1905. C’est le début d’une guerre entre les footeux laïcs (tout est relatif) et la fédé des patros, chacun excluant l’autre. Toutefois, l’USFSA va commettre une erreur stratégique, dont Charles Simon saura tirer profit. La FIFA avait été instaurée en 1904 à Paris sous l’impulsion des Français. Cependant, ces derniers la quittèrent sous prétexte que le Royaume-Uni pouvait y inscrire ses quatre structures (anglaise, galloise, écossaise et irlandaise), et non une seule comme les statuts le prévoyait. Charles Simon y sent une incroyable opportunité pour « son » CFI (Comité français interfédéral) qu’il avait lancé en 1907 afin de sortir les footballeurs de la FGSPF de leur isolement, leur permettant d’y rencontrer d’autres équipes de petites fédérations elles aussi en difficulté (dont par exemple la FCAF, Fédération cycliste et athlétique de France, qui organisait un championnat de foot depuis 1905). Il se déplace alors à Londres, au siège de la FIFA, en décembre 1908 et obtint pour le CFI le statut d’unique représentant tricolore reconnu par la FIFA. Ce choix s’avère finalement payant et solidifiera au fil des années sa mainmise croissante sur le foot français.

Hommage posthume

En 1910, Jules Rimet, chrétien affirmé lui aussi, mais ancien du sillon et surtout fondateur du Red Star, rejoint en 1912 le CFI avec sa Ligue de football association (LFA). En 1913, l’USFSA doit capituler et demander son inscription. Charles Simon est quelque part à ce moment le premier président d’une Fédération française de football réunissant (presque, puisqu’il y manque les « socialistes » de la FSAS), toutes ses diverses familles et tendances. Il ne verra malheureusement pas l’accomplissement de son projet, dont il ne devait sûrement mesurer la portée, ni peut-être anticiper le visage actuel. D’un commun accord, la FGSPF et le CFI donneront certes son nom à la Coupe de France créée dans la suite de l’ancienne compétition du CFI. En 1919, la finale se déroulera le 5 mai 1918, avant même la fin du conflit, dans le XVe à Paris. L’Olympique Pantin domina le FC Lyon 3-0.

En brandissant le trophée, son capitaine et international Louis Darques sait-il qu’il rend finalement un hommage posthume à celui qui est remercié de la sorte ? L’Union sacrée a converti définitivement l’église à la République. Sur les terrains de foot, où de nombreux convertis affluent, souvent contaminés au front par la passion des Tommies, la discorde religieuse ou laïcarde se révèle désormais caduque. Le 3 mars 1919, le CFI se transforme en une Fédération uniquement vouée au foot, et rien d’autre. L’ancien modèle omnisport, quelle que soit son obédience, reçoit la première pelletée sur sa tombe. Le 11 avril, Jules Rimet est désigné président de la Fédération française de football association (FFFA). Le sport catholique défendu par Charles Simon avait gagné la bataille, cependant ce fut le « football seul » qui gagna la guerre. Et il n’avait plus de raison de bosser pour les curés.

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Par Nicolas Kssis-Martov

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