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Un homme, un stade : Gottlieb Daimler

Par Côme Tessier
Un homme, un stade : Gottlieb Daimler

À Stuttgart, pendant quinze ans, le stade a porté le nom de l'inventeur le plus célèbre de la ville, qui a contribué à son développement à partir du début du XXe siècle. Un choix loin du football, mais qui ne doit rien au hasard, car chez les Souabes, on vit au rythme de la voiture et de l'industrie Mercedes-Benz depuis l'invention de Daimler.

C’est l’histoire d’un chemin, ou plutôt d’un trajet qui paraît aujourd’hui banal, facile à faire et qui dure moins de dix minutes quand on est motorisés, à en croire les services d’itinéraire en ligne. Le tout ne fait que trois kilomètres, pour rejoindre Cannstatt, dans la périphérie de Stuttgart, à Untertürkheim, un autre quartier le long du fleuve Neckar. En novembre 1885, Gottlieb Daimler pose son fils sur un drôle d’engin et parcourt les 3 km. Cette machine qui permet de passer d’un quartier à l’autre est l’ancêtre de la moto, une invention de Gottlieb Daimler, qu’il teste pour la première fois en grandeur nature. Aujourd’hui, le long de cette rue, quelque part entre Cannstatt et Untertürkheim, le VfB Stuttgart joue régulièrement au football dans un stade de 60 449 places. Un stade qui a porté le nom de Gottlieb Daimler, c’était inévitable. À Stuttgart, personne ne peut éviter d’être sous les roues de Daimler et ses successeurs.

De Cologne au Neckar

Au milieu de l’année 1882, Gottlieb Daimler change de crèmerie. Jusqu’alors directeur technique chez le fabricant de moteur Deutz, Daimler s’embrouille avec la direction et l’inventeur Otto et préfère se mettre à son compte et travailler sur un progrès technique sans cesse renouvelé. L’histoire aurait sa place dans un épisode à part entière d’Il était une fois les découvreurs. Car Daimler repart presque de zéro. Grâce à ses économies et ses parts dans Deutz, il peut s’offrir une villa à 75 000 marks-or et installer un atelier dans le jardin, quelque part entre Stuttgart et le Neckar, au niveau de la ville de Cannstatt. Ici, avec son ancien collègue Wilhelm Maybach, il s’attelle à son immense tâche : l’amélioration des moteurs à combustion, pour avoir des moyens de locomotion puissants « sur terre, sur mer et dans les airs » . Loin de l’usine, c’est avec les moyens du bord et dans la discrétion que le duo Maybach-Daimler s’échine à améliorer ses moteurs. Une discrétion nécessaire pour ne pas éveiller l’intérêt de la concurrence, raconte désormais le site de Daimler. Cela intrigue cependant le voisinage, perturbé par le bruit provenant du jardin. Ainsi, un jardinier, Weinbuch, prévient même la police en pensant qu’il s’agit de fabrication de fausse monnaie. Quand les policiers viennent, pas d’imprimante, seulement des moteurs et des outils. À l’abri de tout soupçon, Daimler et Maybach reprennent leurs recherches et parviennent à faire rouler différents engins : en 1885 un prototype proche de la moto, en 1887 un engin ressemblant à une voiture et même en 1899 un moteur pour un zeppelin. La machine Daimler est lancée et c’est tout un quartier de Stuttgart qui en est changé. Une usine de vingt-trois personnes est créée dans Cannstatt dès 1887, avant la fondation de DMG (Daimler Motor-Gesellschaft) en 1890.

Le quartier benz-benz-benz

Dès lors, autour de Cannstatt, Daimler devient incontournable. Les usines pullulent, le fils Daimler prend la suite et l’entreprise grandit au rythme des fusions et des coups commerciaux : lancement de la Mercedes, la prise en main par Ferdinand Porsche de l’entreprise, puis la fusion en 1926 avec Benz. Le monstre de l’industrie automobile s’établit solidement et permet à Stuttgart de connaître une croissance importante. La ville vit au rythme de la voiture à compter de cette fusion. Aujourd’hui, dès l’arrivée dans la gare de Stuttgart, le logo Mercedez-Benz est incontournable. En rejoignant le coin de Bad Cannstatt, l’importance de la firme est plus flagrante encore. Mercedes-Benz est partout : noms des salles de spectacle (Hans-Martin-Schleyer-Halle, du nom de l’ancien PDG de Benz assassiné par la Fraction armée rouge en 1977), un musée de l’automobile et de la Mercedes, le siège de la mutuelle Daimler. Surtout, on y retrouve une Benzstraße dans la continuité de la Mercedesstraße, qui forment à elles deux le parcours originel de Daimler sur sa moto du XIXe siècle. Personne n’y échappe. Pas même le stade, construit pourtant dans les années 30. Dans un premier temps, il reçoit un patronage d’époque : Adolf-Hitler-Kampfbahn. Le nom de baptême est évidemment vite effacé après la Seconde guerre mondiale, d’abord en recevant l’influence de l’armée américaine qui contrôle la zone (Century Stadium), puis un nom parfaitement neutre et plus géographique : le Neckarstadion, d’après le nom du fleuve qui passe à quelques mètres.

Un naming discret

Pendant des années, ce nom de Neckarstadion tient et trouve sa place comme le nom fixe pour certains supporters de Stuttgart. Toutefois, sa rénovation au début des années 90 engendre une petite révolution. Stuttgart doit accueillir les championnats du monde d’athlétisme de 1992 et entreprendre d’importants travaux dans son grand stade à cette occasion. C’est alors que la firme Daimler pointe le bout de son nez. Elle paye une partie des travaux, notamment la passerelle qui mène directement de la salle Hans-Martin-Schleyer au stade. Officiellement, cela n’a aucune influence sur le changement de nom du stade, voté alors par le conseil municipal de Stuttgart. Toutefois, un accord secret est passé entre la mairie de Daimler-Benz. Le constructeur automobile s’octroie un droit à durée indéterminée sur le nom que portera désormais l’enceinte du VfB Stuttgart. S’il doit y avoir un changement à l’avenir, il se fera uniquement avec l’autorisation de la firme. Malin, ce naming est le premier pour un stade de Bundesliga, et le seul qui échappe au conflit avec la FIFA au moment de la Coupe du monde 2006. Si certains reprennent pour un mois leur nom historique, pour cause de concurrence avec les sponsors officiels du tournoi, Gottlieb Daimler échappe à la règle. Avant qu’un naming plus offensif ne soit décidé en 2008, officiellement pour trente ans, au moment de retirer la piste d’athlétisme de 1993. Le chemin n’était de toute façon pas très long et difficile pour arriver jusqu’à Mercedez-Benz. À Stuttgart, depuis 1885, toutes les voies mènent vers Daimler et son héritage.

Comment aurait pu s’appeler le stade de Stuttgart :

Le Fritz-Walter-Stadion, car le football allemand ne compte pas que celui de Kaiserslautern et du miracle de Bern. À Stuttgart, Fritz Walter est à la fois celui qui a relancé le football et le VfB dès la fin de la Seconde guerre mondiale, et aussi le meilleur buteur de Stuttgart au début des années 90, quand le VfB a de nouveau gagné le Meiterschale. Un Fritz Walter peut en cacher deux autres. Le Mayer-Vorfelder-Stadion, du nom du président indétrônable de Stuttgart lors d’une époque faste, de 1975 à 2000. Également homme politique, député puis ministre (CDU) de la région Bade-Wurtemberg, il a marqué la ville de Stuttgart de son empreinte jusqu’à sa mort en 2015. Le Karlheinz-Förster-Stadion, car avant de partir pour l’Olympique de Marseille, il a su remettre Stuttgart d’aplomb, d’une remontée en première division au titre de Bundesliga en 1984. Le stade Sami Khedira. Mais ce nom-là, on le sait d’avance, est réservé au futur stade de 2053 après trente ans de titres en folie sous sa présidence. Khedira est le seul à pouvoir surpasser les voitures à Stuttgart.
Un homme, un stade : Michel d’Ornano

Par Côme Tessier

Un homme, un stade
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