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Top 10 : Pays-Bas–France

Par Matthieu Rostac
Top 10 : Pays-Bas–France

Le Pays-Bas–France de ce soir ne constitue que la vingt-cinquième opposition entre deux pays séparés par seulement 150 kilomètres. De surcroît, il ne s'agit que du sixième affrontement direct en compétition officielle. Ce qui n'empêche pas d'avoir quelques histoires à raconter, entre une inondation meurtrière, la nuque de Dominique Dropsy, les larmes de Seedorf et un adieu à Johan Cruyff.

10 mai 1908 (Pays-Bas 4-1 France) : le premier affrontement Ce match amical offre un bon tour de chauffe aux sélections française et néerlandaise, toutes deux qualifiées pour les Jeux olympiques de Londres. Surtout, c’est l’occasion pour la France de faire la rencontre d’Edu Snethlage, étudiant en médecine de vingt-deux ans venu des Indes orientales néerlandaises (aujourd’hui l’Indonésie), qui mettra deux des quatre buts oranje qu’encaissera le gardien français Maurice Tilliette. Snethlage marquera dix buts en onze sélections avant de prendre sa retraite à vingt-trois ans, en raison d’un genou récalcitrant. Juste le temps d’obtenir une médaille de bronze à Londres avec les Pays-Bas. La France, elle, se mangera un 17-1 contre le futur médaillé d’argent danois (dont un décuplé du seul Sophus Nielsen).

2 avril 1923 (Pays-Bas 8-1 France) : le grand huit En ce début de XXe siècle, les Pays-Bas ne réussissent vraiment pas à l’équipe de France. Après un premier match perdu 4-1, puis un second 5-0 en 1921, les Bleus continuent de jouer les punching balls pour Bataves en subissant un 8-1 dans le Oude Stadion d’Amsterdam au printemps 1923. Quatre doublés de Jaap Budler, Evert van Linge, Wim Addicks et surtout, Wim Roetert qui célèbre alors son unique sélection en équipe des Pays-Bas à l’âge de trente et un ans. Enfin, 8-1, ça en fait toujours neuf de moins que face au Danemark.

10 mai 1934 (Pays-Bas 4-5 France) : et un, et deux et Jean Nicolas Cinquième confrontation entre les Pays-Bas et la France, mais surtout, première victoire tricolore. Un 10 mai presque parfait. À l’Olympisch Stadion, malgré la présence de Kick Smit et Beb Bakhuys, les Bleus parviennent à en mettre un de plus aux Oranje. Le grand artisan de cette victoire ? Jean Nicolas, auteur d’un hat trick. L’attaquant du FC Rouen marquera à nouveau contre les Bataves en 1937, toujours à l’Olympisch Stadion (victoire française 2-3). À l’heure actuelle, Jean Nicolas est toujours le meilleur buteur de l’équipe de France face aux Pays-Bas. Le record tombera ce soir si Blaise Matuidi se décide à claquer un triplé.

12 mars 1953 (Pays-Bas 2-1 France) : le Watersnoodwedstrijd Nul besoin de chercher ce match dans les archives de la KNVB, il n’existe pas. Et pour cause : cet affrontement n’est pas une rencontre officielle, encore moins un amical entre les sélections française et néerlandaise. Mais en fait, si. À l’époque, le football professionnel est interdit aux Pays-Bas. De fait, la majorité des joueurs bataves qui ont choisi de taper dans un ballon à plein temps, surnommés les « ordures » dans leur pays d’origine, ont choisi la Division 1 française comme terre d’asile et sont interdits de sélection internationale. Ce qui n’empêchera pas Bram Appel et Theo Timmermans, respectivement joueurs du Stade de Reims et de l’Olympique de Nîmes, de réunir une dream team hollandaise made in France – plus Frans de Munck, gardien du FC Cologne – pour affronter l’EDF dans un match servant à récolter des fonds pour les victimes du Watersnoodramp, des inondations qui auront fait plus de 2500 morts et immergé près de 10% des fermes du pays. D’où le nom de Watersnoodwedstrijd, le « match de l’inondation » .

25 mars 1981 (Pays-Bas 1-0 France) : Dropsy, c’est fini Pour la première fois de leur histoire, la France et les Pays-Bas se rencontrent en match officiel dans le cadre des éliminatoires de la Coupe du monde 1982 en Espagne. Dans le groupe 2 où l’on retrouve également la Belgique et l’Irlande, les Pays-Bas du fraîchement nommé Kees Rijvers (champion d’Europe avec le PSV) ne font pas figure de favoris, complètement déplumés de leurs Oranje mécaniques des seventies. Pourtant, c’est bien les Bataves qui l’emportent à De Kuip ce soir-là. La faute à un coup franc d’Arnold Mühren qui viendra mourir sur l’arête droite du but français, puis rebondir sur la nuque de Dominique Dropsy. 1-0. Le score en restera là, tout comme la carrière en bleu du gardien strasbourgeois qui, remplacé dans les cages par Jean-Luc Ettori, Jean Castaneda ou Dominique Baratelli malgré deux derniers matchs contre la Belgique et le Brésil, verra Battiston se faire casser les dents à Séville par Schumacher depuis son écran de télévision.

19 novembre 1981 (France 2-0 Pays-Bas) : « Ouiii Michel ! » Même si la défaite de l’aller relevait plus de l’accident de parcours qu’autre chose, les Français sont prêts à obtenir réparation au Parc des Princes. La réparation, Michel Platini en est à la limite de la surface lorsqu’il enroule un coup franc dans le petit filet de Hans van Breukelen en début de seconde mi-temps. Thierry Roland exulte : « Oui Michel ! Ouiii Michel ! » Pourquoi tant d’emballement ? Parce que pour aller au Mondial 82, l’EDF doit absolument gagner. Didier Six doublera la mise en toute fin de match. Une victoire française qui élimine de facto les Néerlandais, qui verront eux aussi Battiston se faire casser les dents à Séville par Schumacher depuis leur écran de télévision.

23 juin 1996 (France 0-0 Pays-Bas, 5 tirs au but à 4) : Seedorf inconsolable Sortis in extremis du groupe A parce qu’ils n’ont perdu qu’avec « seulement » une différence de trois buts contre l’hôte anglais, les Pays-Bas de Guus Hiddink se retrouvent en quarts de finale de l’Euro face à la France d’Aimé Jacquet qui a eu, elle, plus de facilité à se débarrasser de la Bulgarie et de la Roumanie en poules. Pourtant, les deux formations se neutralisent et finissent à 0-0. Viennent alors les tirs au but, cet exercice que les Pays-Bas n’ont pas encore appris à détester. Toutes les tentatives sont transformées au moment où Clarence Seedorf, vingt piges, s’élance. Bernard Lama arrête la frappe au centre du but. Derrière, les Bleus marquent leur dernier tir au but par l’entremise de Laurent Blanc. Même si les Pays-Bas sortent avec les honneurs, même si son poteau de la Sampdoria Karembeu lui fait un gros câlin, Seedorf est aussi sec qu’un raisin de Corinthe après avoir éclusé toutes les larmes de son corps. C’est moche, un enfant qui pleure.

21 juin 2000 (Pays-Bas 3-2 France) : Bernard Lama, c’est fini (aussi) Déjà qualifiés pour les quarts de finale de l’Euro 2000, c’est un véritable match de gala qui se profile entre les Oranje et les Bleus sur la pelouse de l’Amsterdam ArenA. Pour ce dernier match de la poule D, les coiffeurs français sont à l’honneur, mais côté néerlandais, interdit de perdre à la maison. Alors, Frank Rijkaard sort l’artillerie lourde – à l’exception de Sander Westerveld, doublure de Van der Sar. Aussi lourde que la sacoche qu’envoie Frank de Boer dans la lucarne de Bernard Lama pour son dernier match en équipe de France. En même temps, y a plus dégueu comme départ à la retraite, non ?

13 juin 2008 (France 1-4 Pays-Bas) : un 4-1 mais pas des poètes Problème de riche dans cette poule C de l’Euro suisso-autrichien : les première, deuxième, quatrième et huitième nations européennes au classement FIFA de l’époque – soit l’Italie, la France, les Pays-Bas et la Roumanie – se disputent deux places en quarts. Et si la France galère lors d’un premier match aux airs de purge face aux Tricolorii, les Néerlandais de Marco van Basten roulent en contre-attaque sur la défense italienne championne du monde. Confirmation lors du second match : 4-1 pour les Oranje avec notamment un tir tout en force dans un angle presque impossible de Robben face à Grégory Coupet, puis une frappe de plage de Sneijder (que Landreau aurait probablement arrêté). On se demande bien ce qui peut arrêter les Néerlandais. Un autre Néerlandais, pardi ! Précisément, Guus Hiddink et sa Russie supersonique qui battent les Bataves 3-1 en quarts de finale. Ou comment passer du Oranje au rouge sans souci.

25 mars 2016 (Pays-Bas 2-3 France) : l’adieu à Cruyff L’intérêt de ce match, qui s’est soldé par une victoire de la France, se situait clairement dans les tribunes d’une Amsterdam ArenA en pleine souffrance. La veille, l’annonce de la mort de Johan Cruyff des suites d’un cancer du poumon a bouleversé tout le pays – même les mecs de Rotterdam. Hasard du football, par le biais de Giroud, l’équipe de France marque son second but à la 13e minute du match. Dans la foulée, le public néerlandais déploie un énorme tifo de Johan Cruyff avec le numéro 14 dans le dos. L’arbitre attend quelques secondes avant de redonner le coup d’envoi pour laisser les 46 000 spectateurs applaudir comme il se doit celui qui a définitivement pris sa retraite. Frissons.
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