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Ricardo de Rubeis : « J’ai battu un record, un triste record… »

Propos recueillis par Martin Grimberghs
Ricardo de Rubeis : «<span style="font-size:50%">&nbsp;</span>J&rsquo;ai battu un record, un triste record&#8230;<span style="font-size:50%">&nbsp;</span>»

Le 20 septembre dernier, Ricardo de Rubeis, arbitre en première provinciale le week-end et avocat au barreau de Bruxelles en semaine, acceptait de descendre d'un étage pour aller siffler un derby chaud de deuxième provinciale hennuyère. Le match tourne court puisque Ricardo renvoie les 22 acteurs aux vestiaires après seulement 18 minutes.

Commençons par le début. Pourriez-vous nous expliquer ce qu’il s’est exactement passé en quelques mots ?

Déjà, il faut savoir, et même si cela n’excuse rien, que ce sont deux villages séparés par cinq tout petits kilomètres. C’est un derby, tout le monde se connaît, c’est un peu la guerre des clochers entre Binche et Trivières. Et puis ce sont deux équipes qui ont le niveau pour jouer plus haut. Bref, tout commence quand je sors une première carte jaune (un carton jaune en version belge, ndlr) à un joueur pour un tacle très en retard. Là-dessus, le gardien visiteur parcourt 50 mètres pour venir m’expliquer sa façon de penser. J’aurais déjà dû le sanctionner, mais je lui ai juste dit de regagner son but et de se concentrer sur son match. Cinq minutes plus tard, je remets une carte jaune au même gars. À ce moment-là, on est à la 17e minute. C’est alors que ça va s’emballer sérieusement. L’entraîneur des gardiens de Trivières commence à m’insulter. Sauf qu’on est en province ici et que tout le stade entend ce qu’il crie. Et je vous jure que ce ne sont pas que des amabilités. Afin de rester cohérent, je n’ai d’autre choix que de l’exclure. Ensuite, le gardien commence lui aussi à m’insulter. Lui va plus loin. Il me traite d’enculé, de connard, le tout en m’applaudissant. Je n’avais plus de solutions, donc je lui donne une carte rouge direct. On joue depuis 17 min et 30 secondes. Le gardien entre dans une rage folle, enlève ses gants et court vers moi. S’il n’y avait pas eu ses défenseurs pour le retenir, je n’ose imaginer ce qu’il se serait passé. Il est revenu plusieurs fois à la charge. C’était assez impressionnant, d’autant que personne ne bougeait.

Il n’y a pas des personnes censées être en charge de votre sécurité ?

Si, c’est le rôle des délégués. Ils sont censés être le garant de notre sécurité. C’est à eux de venir directement me protéger dans ces cas-là. Ce qui n’a pas été le cas. En tout, cela a duré 3-4 minutes. Le gardien voulait me sauter dessus. Donc j’ai sifflé la rentrée au vestiaire. J’étais obligé. Faut bien savoir qu’en provincial, les arbitres n’ont pas de juge de lignes, j’étais donc tout seul. Personne n’est intervenu. Les joueurs de Binche ne se sont pas réellement bougés non plus. Il regardait la scène. Par la suite, ils ont été blanchis, et je ne me l’explique pas encore. Après, qu’un délégué de 50 ans n’ose pas venir se frotter à un énergumène pareil, je peux évidemment le comprendre. Le mec était rentré dans une colère folle. Mais que personne ne bouge autour, ça je ne me l’explique pas.

Que se passe-t-il ensuite ?

Je décide de renvoyer les équipes aux vestiaires. Cela ne m’empêchait pas de pouvoir reprendre le match, après. Mais les deux équipes ne sont pas rentrées aux vestiaires. Le gardien est revenu à la charge pour une cinquième fois, me reprochant d’avoir foutu la merde alors que c’est bien lui qui était en train de le faire. Il restait 73 minutes, je me sentais en insécurité, personne ne me protégeait. Je ne me voyais plus du tout reprendre la partie. Et puis, le premier joueur que j’avais exclu a encore la bonne idée de venir me dire que leurs supporters étaient des fous et qu’il valait mieux pour moi que la partie reprenne. J’ai alors demandé qu’on appelle la police. J’ai attendu dans le rond central une bonne vingtaine de minutes que celle-ci arrive. Là, j’étais, enfin, entouré des délégués. À l’arrivée de la police, les choses étaient calmées. Si bien que les joueurs espéraient que je reprenne la partie, mais ma décision était prise. Moi, j’attendais juste la police pour qu’il me ramène aux vestiaires. D’expérience, je savais qu’aller s’enfermer sans sécurité dans un endroit confiné comme un vestiaire n’était pas la meilleure chose à faire. Du coup, j’ai pris ma douche, pendant que la police bloquait la porte. Les policiers m’ont ensuite escorté jusqu’à ma voiture et m’ont ouvert la route pour me mettre sur mon trajet. Parce que cela, c’est la spécialité chez nous, coincer les arbitres sur la route du retour. C’est même conseillé de ne pas se garer trop près du stade en Belgique. On m’a déjà bloqué entre deux voitures après un match. Pendant plus de 30 minutes !

À quel moment vous êtes-vous dit que vous étiez en train de vivre un truc un peu dingue ?

Au moment de la cinquième charge du gardien, j’ai vu le délégué regarder en l’air en sifflant… Après, il y a une autre anecdote marrante, c’est quand la femme du délégué, qui est aussi la tenancière de la buvette, est venue au bord du terrain pour dire à son homme de ne pas prendre le moindre risque pour me défendre…

Ensuite, vous rentrez chez vous et fin de l’histoire ?

Après l’arrivée de la police, le gardien est venu s’excuser à l’entrée de mon vestiaire. Je lui ai serré la main, parce que je ne voudrais jamais m’abaisser à ce qu’il a été capable de faire. Je pense qu’il s’est rendu compte de l’impact de ce qu’il a fait. Faut savoir que Trivières, c’est quand même un drôle de club. Les dirigeants essaient de racheter une virginité au club et ont déjà fait un bon nettoyage par rapport à l’année dernière, mais il reste encore des pommes pourries. C’est des mecs qui sont là pour la castagne et du coup, ça dérape encore.
Si j’avais été mieux encadré par les deux délégués, le match aurait peut-être repris

Et qu’a dit le comité répressif (la commission de discipline, version belge, ndlr) en charge du jugement ?

Il a décidé de suspendre le gardien jusqu’au 3 décembre. Mais ce n’est pas tout, le club de Trivières a aussi reçu une grosse amende et a perdu le match sur le score de 5-0. Le fait qu’il n’y ait que deux mois de suspension, à la limite, ça me soulage. Parce qu’au vu de l’énergumène, j’aurais peut-être été moins à l’aise s’il avait pris deux ans de suspension. Et puis, moi, je ne vais pas gâcher ma vie pour un match de P2 pour lequel je gagne 60 euros. Même si, je le précise, je ne fais pas cela pour l’argent, mais par passion.

D’un point de vue plus objectif, que pensez-vous de la sanction ?

Je pense que le joueur a fait amende honorable et que, pour lui, c’est déjà beaucoup. Même s’il aurait pu prendre plus. En revanche, j’aurais aimé une plus grande sanction pour le club de Trivières. Une sanction au niveau des points ou bien les priver de supporters pour les prochains matchs. Le club n’a pas été sanctionné comme il se doit alors que ce n’est pas la première fois.

Avez-vous craint des représailles ?

J’étais un peu inquiet parce que, le soir du match, un ami m’a téléphoné pour me dire qu’il connaissait ces gens–là et que ce n’était pas des rigolos. C’était un geste d’amitié de sa part, mais cela ne m’a pas rassuré. Après, je sais que j’ai juste relaté les faits. Je n’ai pas gonflé mon rapport pour le plaisir. Certains le font. Moi, je n’ai dit ni plus, ni moins, dans mon rapport.

Le président de la RUS binchoise, Rudy Maudoux, a confié qu’il avait senti que l’ambiance était tendue dès le départ. Aviez-vous le même ressenti ?

Je le savais la veille. Depuis que j’avais reçu ma désignation en fait. Ce n’est pas pour rien qu’ils envoient un arbitre de provincial 1 pour ce type de match. Moi, je suis presque rompu à l’exercice des matchs un peu chaud. Mais que ça dégénère autant verbalement, c’est une première. Je crois que j’ai aussi battu un record. Un triste record. Mais si j’avais été mieux encadré par les deux délégués, peut-être que le match aurait repris. Après, Rudy parle beaucoup à la presse, mais je ne l’ai pas vu non plus s’agiter au moment des faits. C’est aussi lui qui a remboursé les tickets de tous les supporters. Je ne sais pas si c’est la bonne décision, mais je pense que s’il ne l’avait pas fait, les supporters auraient saccagé son stade. Parce que l’ambiance délétère, les premiers à la faire ressentir, c’était bien les supporters.

Le club de Binche a déjà prévenu que si le jeu n’en valait pas la chandelle, le club n’effectuerait pas le déplacement pour le match retour. Vous, que vous faudrait-il pour accepter de l’arbitrer ?

J’accepterais sans problème, mais on ne me le donnera jamais, ce serait de la provocation. Je suis curieux de voir si Binche ira ou pas, parce que ce ne sont pas des enfants de chœur non plus, il ne faut pas croire. Moi, j’ai arbitré encore ce week-end, j’arbitre le week-end prochain. Ça me dégoûte de voir ça, mais ce n’est pas ça qui me fera arrêter. Sinon, ce serait ces gens-là qui gagneraient et il n’y aurait plus de foot. Il y a 60 % des matchs qui se passent bien, 30% pour lesquels on n’est pas content sur l’arbitre et 10% comme celui-ci. Des matchs arrêtés, c’est un par mois. Moi, perso, c’est mon deuxième.
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Propos recueillis par Martin Grimberghs

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