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Petit manuel à l’usage du derby lorrain

Par Mathieu Rollinger et Maxime Brigand
Petit manuel à l’usage du derby lorrain

Il y a cinq mois, Nancy balayait le FC Metz à Marcel-Picot (4-0) pour le premier derby lorrain de la saison. À l'heure du retour entre ces deux villes distantes de 60 kilomètres, un petit manuel.

La rivalité historique

Pascal Raggi, maître de conférence en histoire contemporaine à l’université de Lorraine. « Au départ, on était plutôt dans une égalité entre Metz, ville d’évêché, et Nancy, ville ducale. Mais dès l’annexion de l’Alsace-Moselle par l’Empire germanique en 1870, Nancy a changé de statut puisqu’elle est devenue frontalière et donc une vitrine pour la France. Quand Metz est redevenue française, une rivalité a commencé à réellement se formaliser. On a souvent opposé Metz l’industrieuse à Nancy la bourgeoise. À partir des années 70, la concurrence entre les universités ou le choix de Metz comme préfecture régionale en 1982 ont engendré des frustrations. On a mis la gare TGV-Lorraine pile entre les deux villes pour ne froisser personne. Aujourd’hui, reste la compétition économique et les caricatures du style « Metz c’est l’Allemagne » . Sinon, la rivalité s’est nivelée, y compris dans le foot. Elle existait parce que les joueurs du cru la faisaient vivre. Il y a eu la fameuse affaire Platini, qui avait été refusé à Metz pour finalement jouer à Nancy. Avec la libéralisation du marché du foot, les joueurs viennent de partout, donc c’est une tradition qui se perpétue hors sol. »


La rivalité politique

À la mairie de Nancy, on siffle tout de suite la fin de la rivalité dans un éclat de rire : « Je vous assure qu’ici, désormais, on est dans une démarche de collaboration plus que d’affrontement. » Même son de cloche du côté de Richard Lioger, premier adjoint au maire de Metz. « Metz a actuellement une mairie socialiste, Nancy est à droite, mais électoralement, les villes sont semblables, souffle l’élu. Au premier tour des présidentielles, Emmanuel Macron est arrivé largement en tête dans les deux communes. Sauf qu’à Metz, Le Pen et Mélenchon ont eu plus de voix qu’à Nancy, traditionnellement plus centriste. » Bon, historiquement, les tensions politiques ont toujours été très fortes. Mais tout ça s’est aujourd’hui calmé, les deux villes ayant un poids finalement assez limité à l’échelle nationale. Richard Lioger : « Ce sont deux agglomérations de taille comparable, autour de 230 000 habitants, alors que les métropoles qui comptent ont au moins 400 000 habitants. » Finalement, le derby est la dernière résurgence des bisbilles entre les deux villes. Ouf.


La rivalité culturelle

Le peintre Georges de La Tour versus Majorelle, Patricia Kaas face au grand Charlélie Couture, Helmut Fritz versus Karine Le Marchand… Qu’on se le dise, ce n’est pas dans le domaine culturel que les duels sont les plus acharnés. Seule l’architecture prête à discussion et donc au chauvinisme local. « Tous les Nancéiens sont si fiers de leur place Stanislas alors que c’est le seul truc joli chez eux, néglige le groupe d’électro messin Grand Blanc. Chez nous, on a plein de beaux bâtiments ! » Si bien que Saint-Symphorien chante : « On a l’Arsenal, la cathédrale / Metz capitale, Metz capitale / Ils ont Picot, la place Carnot / C’est des charlots, c’est des charlots. » Pour Grand Blanc, ces querelles sont surtout un prétexte pour se vanner entre voisins. « C’est de la chambrette quoi. Au foot, c’est pareil : c’est la bataille des losers, donc on va pas commencer à s’exciter. On se fait deux-trois fuck de loin et on est contents. Quand on supporte Metz, on espère autant se maintenir que Nancy descende. Surtout qu’il y a un autre derby qui pourrait s’annoncer l’an prochain avec Strasbourg. Cette rivalité a un peu plus de gueule. Et puis c’est cool, on sera entre demi-Boches, ça parlera allemand, etc. »


La rivalité culinaire

Côté assiette, Nancy et Metz sont obligés de se partager la quiche en deux. Difficile de se détacher d’une tarte qui représente autant l’ensemble de la région. Si le nord de la région emprunte la plupart de ses spécialités à l’Allemagne ou l’Alsace, Nancy a mieux intégré la gastronomie française. S’ils devaient partager leurs lunchbox, les voisins devraient s’échanger charcutailles et saucisses en tout genre contre des plats un peu plus raffinés tels que les bouchées à la reine (en référence à Marie Leszczynska, fille du duc Stanislas). Pour finir sur une note sucrée, il y a le choix entre mirabelles arrosées de schnaps d’un côté, bergamotes et macarons de l’autre. Allez, pour honorer la mémoire de Jean-Pierre « C’est de la merde » Coffe, on donnera le point à Nancy.


La rivalité des tribunes

Sylvain Hoff (président des Grenats et Blancs) : « Nancy, c’est l’équipe à battre. Il n’y a rien d’autre à dire. Si les joueurs ne prennent pas conscience de l’importance du match de samedi, je n’y comprends plus rien. Le problème, c’est qu’il y aura moins d’ambiance que d’habitude, les Nancéiens n’ayant pas le droit de se déplacer. Ça fait quarante ans que je suis le FC Metz. J’ai vu des Metz-Nancy alors que la tribune Est n’était encore qu’un tas de sable. Pour moi le derby, c’est synonyme d’une ambiance de fou. À l’époque, on pouvait être assis les uns à côté des autres, ça nous arrivait d’échanger des maillots. Aujourd’hui, on n’a même plus le droit de se croiser. »

Jean-Michel Goncalvès, dit Minus (président de l’ASNL Fans Connection) : « Notre derby concerne moins de monde que des Lyon-ASSE ou PSG-OM, mais la ferveur est la même. Ne pas pouvoir y assister, c’est comme si on nous privait du droit de vote avant l’élection présidentielle. Le dernier derby disputé à Picot en présence des supporters messins, c’était incroyable. Moi ce que j’aime, c’est chambrer le voisin. Nous sommes opposés par nos idées, ça ressemble à une guéguerre de clocher, mais au fond, on est les mêmes. La seule chose qui nous sépare, ce sont nos couleurs. C’est quelque chose à vivre quoi. Là, ça n’aura aucune saveur. Cette semaine, j’ai très bien dormi alors que d’habitude, je me fais le match quinze fois dans la tête avant qu’il ne commence. »


L’expertise des frères Borbiconi

Stéphane Borbiconi (Formé au FC Metz – au club de 1999 à 2001, 2002 à 2006 et 2009 à 2011)

« J’ai grandi dans le bassin sidérurgique, proche de la frontière du Luxembourg. Au café du village, on supportait le FC Metz. Dans les années 80-90, on y trouvait surtout une population issue des mines, de la sidérurgie, des immigrés italiens. C’est aussi l’histoire de notre famille, celle du président Carlo Molinari. Dès que tu portes le maillot du FC Metz, le premier match dont les supporters te parlent en début de saison, c’est le derby. Après, je n’ai jamais considéré l’ASNL comme un ennemi. Je suis dans une démarche positive. Je préfère perdre le derby et me maintenir en fin de saison. Sur le terrain, c’est aussi une pression différente. J’ai gagné une fois 4-0 à domicile, une fois 1-0 à l’extérieur où je marque, et les supporters m’en ont longtemps parlé. Je serai avec mon frère au match, que je commenterai pour DirectFM. Ils ont pris le match aller, ils peuvent nous laisser le retour. »

Christophe Borbiconi (Formé à Nancy – Au club jusqu’en 1995)

« Nancy est le club qui m’a donné la chance d’être professionnel. Je me suis blessé avant de signer pro et ils m’ont gardé quand même. C’était un geste fort. C’est un club différent parce qu’il a une grosse histoire avec Platini, les années 70-80, la Coupe de France, ses épopées… Le derby, fallait le gagner, c’est dans la culture. À mon époque, l’ASNL n’était pas dans sa meilleure phase. On a surtout subi le FC Metz. Je n’ai pas eu la chance de jouer beaucoup de derbys, j’étais souvent blessé ou prêté. En jeunes, on avait gagné la Coupe de Lorraine en éliminant le FC Metz en demi-finale. Il y avait Vairelles, Lécluse, Rabesandratana, Biancalani… Quand tu gagnes, tu deviens la capitale de la Lorraine pendant un week-end. Ne pas voir de supporters à Saint-Symphorien, ça me rend triste. Avant, c’était bon enfant, il y avait juste quelques voitures rayées. Là, il y a de l’agressivité qu’on ressent dans les autres gros derbys en France. On se demande parfois si ce n’est pas dangereux. »

Dans cet article :
László Bölöni : « Mon carnet, c'est une manière de prévoir les problèmes  »
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Par Mathieu Rollinger et Maxime Brigand

Tous propos recueillis par MR et MB

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