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On était à Charleroi-Saint-Trond avec le peuple zébré

Par Giuliano Depasquale
On était à Charleroi-Saint-Trond avec le peuple zébré

Charleroi, en Belgique, a bon dos en ce moment, entre son titre officieux de ville la plus laide du monde et les nombreuses affaires de terrorisme qui y sont liées. Mais cela n’empêche pas les supporters du Sporting de mettre le feu à chaque match.

La Belgique, sa population accueillante et ses paysages ornés de terrils, ses collines datant de la période dorée du charbonnage. C’est ce qu’on peut voir à Charleroi, aka le « Pays noir » , métropole de l’ouest de la Wallonie, la partie francophone du royaume, et tristement célèbre pour ses vieilles usines abandonnées qui lui ont valu son titre de « ville la plus laide du monde » par la presse néerlandaise. Il est 19h30 au stade du Pays de Charleroi, plus communément appelé le Mambourg. Le match de ce samedi soir du Sporting contre Saint-Trond – valant pour la deuxième journée des Playoffs 2 en Jupiler Pro League – ne débute que dans une heure. Pourtant, les rues sont déjà teintées de blanc et de noir, les couleurs du club, avec la masse de supporters qui se rend aux bars des alentours afin de boire une, deux, si ce ne sont pas trois, petites bières, avant de pénétrer dans l’enceinte. Mais on ne parle pas forcément de la prochaine rencontre, entre « Carolos » . Les discussions portent plutôt sur la semaine de travail écoulée ou de leur passage à la fête foraine présente comme chaque année après Pâques. Écharpe au cou et maillot délavé à force d’avoir côtoyé la tribune 4, celle du peuple, chacun attend pourtant ce match avec impatience depuis le coup de sifflet final, samedi passé. « Chaque semaine, on a hâte que ce soit le week-end pour aller voir le Sporting » , explique fièrement Danny, bien présent comme à chaque journée. « Toute la semaine, je bosse et je casse les couilles à mes collègues parce que je n’arrête pas de chanter les chants de Charleroi et parce que j’en parle tout le temps. C’est dans les tripes. » Malheureusement, les récents attentats survenus à Bruxelles retardent de quelques minutes l’entrée du public. La sécurité a été renforcée et chacun doit être fouillé sous les regards attentifs d’une dizaine de policiers. Une fois à l’intérieur, certains passent devant les magnifiques fresques du club pour aller faire une vidange avant le coup d’envoi, d’autres s’en vont commander leur(s) bière(s) pour ne pas mourir de déshydratation pendant la première mi-temps, l’un n’empêchant pas l’autre. Dans le kop, les ultras sont installés tout devant, les drapeaux sont sortis, les écharpes brandies et ça chante déjà. « Si on est les meilleurs supporters de Belgique ? » , répète Danny, amusé. « On n’a pas besoin de parler, écoute simplement… »

La fierté carolo

Le Sporting Charleroi et ses Zèbres n’est pas en forme : cela fait six matchs de suite qu’ils ne gagnent plus et les Playoffs 2, qui peuvent tout de même mener à une qualification pour la Ligue Europa, ont dû coup mal commencé la semaine précédente avec une défaite contre Lokeren 1-0. Il est donc préférable de remporter les trois points ce soir pour ne pas prendre trop de retard. « À chaque fois, on a 18 occasions et on n’en met qu’une, et encore. Les autres en ont trois et c’est dedans. C’est toujours la même chose » , se plaint Audric alors que l’arbitre vient de donner la permission de commencer la partie. Les Storm Ultras donnent le ton dans la T4 et les chants s’enchaînent sans interruption, même si tout le monde n’y met pas du sien. Il faut dire que l’affluence n’est pas terrible en ce moment, à cause des résultats. Le stade, pouvant contenir un peu plus de 14 000 personnes après plusieurs réductions du nombre de places, n’est même pas rempli à moitié. « Dans les années 90, quand on était vraiment forts, on était serrés l’un contre l’autre dans un petit stade, il n’y en avait pas un qui savait bouger. Quand on marquait, on se faisait emporter, on se retrouvait tout devant. À l’époque-là, t’avais 23 000 personnes dans un stade de 15 000 places. Il y avait même des gens qui montaient sur des poteaux. Puis, il y a une gestion catastrophique et les gens sont partis avec les résultats » , regrette Alexandre, supporter pur et dur des Zèbres. « On est nés à Charleroi, c’est notre identité. Et, quand t’as le blason dans ton cœur, tu ne sais rien faire. Puis, il y a une ambiance à Charleroi que tu ne trouveras pas ailleurs. Le Mambourg, c’est comme une maison. » Malheureusement pour les Carolos, ce n’est pas tout de suite qu’ils retrouveront leur gloire d’antan, vu comment l’équipe actuelle joue. On approche alors de la pause et le score est toujours vierge. Bien sûr, ça râle beaucoup, ça siffle même, mais les rengaines ne cessent pas et le chef ultra persévère à inciter ses troupes à donner davantage de voix pour soutenir les Zèbres. « Avec le potentiel de Paris à Charleroi, le stade serait archicomble et, en plus, t’entendrais plus rien, tellement on chante à fond » , affirme Tim, la passion dans les yeux.

Une bande de kopains

Ouf ! La première mi-temps est enfin terminée, c’est l’occasion de recharger son stock de houblon et de débriefer au sujet de ces 45 pénibles minutes. « Pour l’instant on est nulle part. C’est le manque de réalisme devant le goal, sinon on a une bonne équipe » , analyse Christopher, les mains prises au retour du bar situé au sommet de la tribune. « Ici, on a sifflé les joueurs, mais ça n’arrive jamais » , reprend son camarade, Colson. « C’est que ça ne va pas du tout. » Mais on ne baisse pas les bras aussi facilement à Charleroi. La défaite, on la connaît, trop bien d’ailleurs.

En apparence, on peut penser que rien ne va, que la rupture peut survenir d’un moment à l’autre, mais la réalité en est bien différente. « On vient représenter le meilleur club de Wallonie, où il y a toujours de l’ambiance, même dans la défaite. On est toujours là pour notre club. On n’est que quelques milliers, mais on fout plus le bordel que des stades qui ont 50 000 supporters. La meilleure ambiance de tout le pays, c’est à Charleroi que tu la trouveras » , s’exclame non sans une pointe d’orgueil David, venu avec plusieurs de ses amis. Pourtant, il y a bien le Standard de Liège comme autre club wallon réputé pour son public de feu au stade de Sclessin, un véritable enfer selon ses partisans. Mais attention à cette équipe dont le nom est tabou au Mambourg, car on ne veut pas entendre parler des ennemis liégeois ici. « Il n’y a pas d’ambiance au Standard, ce sont des supporters de la victoire. Ça ne chante pas là-bas, c’est mort. Sclessin, c’est un cimetière » , déballe Kevin, sans langue de bois. Ne pas parler du Standard à un Carolo, c’est noté.

La guindaille à Charleroi

Ça y est, les Zèbres ont enfin débloqué le marquoir après plusieurs ratés et un bon millier de blasphèmes dans les tribunes. Ce but, signé Amara Baby, fait évidemment énormément plaisir à tout le monde, mais beaucoup ne l’espéraient plus. « Aujourd’hui c’est un peu pourri parce qu’ils jouent comme des moules, mais bon. Sinon, d’habitude c’est vraiment bonne ambiance. Pour moi, ce sera une victoire de Saint-Trond ou une égalité. Ce n’est pas pour être méchante, mais je ne nous vois pas gagner » , avait confié Mégane, juste avant que le score ne penche en faveur de Charleroi. Dès lors, les chants reprennent de plus belle et les écharpes tournent comme les serviettes de Patrick Sébastien. Au beau milieu de ce public au caractère majoritairement défaitiste, certainement forgé par l’expérience, Sacha, 8 ans et émerveillé devant ce spectacle, n’avait pas perdu espoir. « On va gagner 2-0. Ndongala et Ninis vont marquer. » Et alors que tous les enfants de son âge vénèrent à juste titre Neymar, Messi et Cristiano Ronaldo, Sacha, lui, a un idole d’un tout autre niveau, même si son amour pour la vedette argentine de Barcelone est mal dissimulé. « Mon joueur préféré, c’est Benavente, parce qu’il est un peu comme Messi, toujours fourré dans les petits coins, il dribble et tout. J’aime bien aussi des grands clubs comme le Real de Madrid, le PSG et Manchester City, mais à côté Charleroi ça représente la moitié de moi. »

Le kop entier aurait signé pour que le pronostic plein d’insouciance de ce jeune supporter soit vrai, tellement l’équipe rame. Bien sûr, ce qui devait arriver arriva et Saint-Trond finit par égaliser, balayant les derniers espoirs d’Europe à un public qui s’était déjà fait une raison la semaine passée. « La saison est terminée pour Charleroi » , sort Hervé avec nonchalance, avant de se diriger vers la sortie. Mais c’est mal connaître les Carolos de penser que la soirée s’arrête là, même avec la douleur d’une désillusion. Non, à Charleroi, on guindaille quelles que soient les circonstances. On fait la fête, quoi. « On n’a rien à dire, le nul est logique pour moi » , avoue Fabrice, déjà devant le Royal Nord, son bar favori. « Mais on vient pour l’ambiance, pour les copains et tout ça. On n’arrête pas de chanter et tout le bazar, c’est ça l’important. Maintenant on est partis jusqu’aux petites heures du matin pour faire encore la fête. On sera toujours derrière l’équipe quand même. Ça fait 25 ans qu’on suit le Sporting et ça fait 25 ans qu’on fait la guindaille. » Pas si noir, finalement, ce pays.

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