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On a lu « Les attaquants les plus chers ne sont pas ceux qui marquent le plus »

Par Benjamin Laguerre
On a lu «<span style="font-size:50%">&nbsp;</span>Les attaquants les plus chers ne sont pas ceux qui marquent le plus<span style="font-size:50%">&nbsp;</span>»

Petite fiche de lecture sur ce livre qui se pose beaucoup de questions, des plus farfelues aux plus sérieuses.

Les attaquants les plus chers ne sont pas ceux qui marquent le plus (et autres mystères du football décryptés) revient avec une deuxième édition en français (chez De Boeck supérieur, sorti en janvier 2016), après celle de 2012, pour répondre à une série de questions footballistiques improbables et revisitées pour l’occasion : « L’entraîneur sert-il vraiment à quelque chose ? » , « Le fair-play financier est-il vraiment une bonne chose ? » , « Les joueurs noirs sont-ils moins bien payés ? » , « Les supporters sont-ils polygames ? » Des interrogations plus surprenantes les unes que les autres et qui, sur presque 500 pages, vont enfin trouver des réponses et ainsi éclairer notre vision du football moderne. Les auteurs, Stefan Mourmansk, universitaire spécialiste de l’économie du sport, et Simon Kuper, journaliste et auteur de Témoignages et anecdotes des stars de la planète football ou de Football against the enemy, mais surtout co-fondateur de l’agence de consulting Soccernomics, abordent à travers 19 chapitres de nombreux aspects du ballon rond par le prisme de l’économie mais sans lourdeur, toujours avec le sens de la formule (on soulignera la qualité de la traduction de Bastien Drut) et souvent avec humour. Une véritable mine d’informations, parfois inquiétantes, la plupart du temps atypiques, tantôt délirantes, tantôt simplement amusantes.

Un chapitre entier sur « le secret de Claude Makelele »

En lisant ce livre, on a vite compris dans les premiers chapitres l’importance de quelques données fondamentales par rapport à l’utilisation des données chiffrées dans le monde du ballon rond, sur le terrain comme en dehors. Notamment que le football, à l’ère du big data, aurait beaucoup à gagner à utiliser les statistiques, comme le baseball dans les années 90 aux States, afin de « trouver de nouvelles et de meilleures manières d’évaluer les joueurs et les stratégies » . Car, dans le monde du ballon rond, l’adage « Soit tu t’y connais en football, soit tu n’y connais rien » se révèle finalement faux : « Quand vous testez ceux qui « savent », il est surprenant de voir qu’ils savent finalement très peu. Ils sont trompés par leur émotion du moment. » Rolland Courbis vs Pep Guardiola ? Les auteurs démontrent également, dès le troisième chapitre, que d’un point de vue économique, si le foot est le plus mauvais business du monde (n’est-ce pas Margarita ?) et que les clubs n’ont jamais été rentables… ils restent quand même plus sûrs que la Banque d’Angleterre ! Et qu’il y a donc moins de chances de voir un club de foot disparaître qu’une banque…

Mais dans cet ouvrage, on a surtout dévoré et aimé le très long chapitre Le secret de Claude Makelele : comment les « données de match » changent le jeu sur le terrain. Car les amateurs de statistiques, mais aussi les réfractaires au changement, ne pourront pas rester indifférents à la lecture de cette grosse trentaine de pages qui offrent les données sans doute les plus intéressantes pour décrypter le passé, mais aussi et surtout le futur, du football. On y apprend qu’Arsène Wenger utilisait, dès la fin des années 80, un programme Top score pour accompagner et améliorer son travail d’entraîneur. Avec quelques autres trop rares précurseurs, comme Lobanovski en Ukraine ou Olsen en Norvège, ils devinaient déjà ce que les chiffres pourraient apporter au jeu. Mais le véritable tournant apparu en 1996 lorsque « Opta Consulting a commencé à collecter les données de match » pour la Premier League. Pour le meilleur et pour le pire… Car comme le remarque justement le statisticien américain Nate Silver, « plus il y a de données disponibles, plus nous sommes susceptibles de les utiliser à mauvais escient lors de nos prises de décisions » . Vous voulez savoir pourquoi le roc hollandais Jaap Stam a été transféré, « à la surprise générale » , de Manchester United à la Lazio de Rome en 2001, et surtout si ce fut une erreur ou pas ? La réponse se trouve dans ce chapitre !

Les stats encore trop snobées dans les clubs

Si les statistiques n’offrent pas toujours des réponses tranchées aux problématiques footballistiques du terrain, elles sont parfois bonnes conseillères pour « éviter de nombreuses erreurs sur le marché des transferts. Par exemple, il est curieux que les salaires des gardiens et les indemnités de transfert les concernant soient plus faibles que pour les attaquants alors qu’ils ont des carrières plus longues. Autre erreur courante : les clubs recrutent souvent des joueurs de grande taille, mais ont tendance à les faire jouer moins souvent que les plus petits une fois réalisé qu’ils ont surestimé l’importance de la taille. Aujourd’hui encore, trop peu de clubs se posent des questions basiques du type : marquons-nous plus de points quand tel ou tel joueur est sur le terrain ? » Dans ce chapitre, vous apprendrez donc pourquoi les statistiques ont eu une place considérable dans la carrière de Gareth Bale, dans l’arrivée de Mathieu Flamini à Arsenal, dans le mode de fonctionnement du Hertha Berlin entre 2012 et 2015, ou encore dans les succès et les déboires de Damien Comolli, directeur sportif de Liverpool et homme-statisticien à l’origine des transferts de Fernando Torres, Luis Suárez et Andy Carroll chez les Reds.

Pourtant dans notre ère du big data, le toujours très mesuré Carlo Ancelotti remarque à juste titre que « les chiffres ne nous disent pas encore beaucoup de choses intéressantes sur ce qu’un footballeur fait pendant les 89 minutes pendant lesquelles il n’a pas le ballon » . Il existe donc des statistiques à inventer, et surtout un football à créer à partir des données existantes, à l’instar du club danois du FC Midtjylland, « un club révolutionnaire géré entièrement avec l’aide des statistiques » et peu connu du grand public jusqu’à sa victoire à domicile en Ligue Europa contre Manchester United (victoire 2-1 en 16e de finale aller, le 18 février 2016). Comment cela se traduit-il sur le terrain ? En utilisant certaines informations chiffrées : « Lors de la saison 2010-2011, les équipes de Premier League n’ont marqué en moyenne que sur un coup franc direct sur 35. Les coups francs sont pourtant des opportunités parfaites pour faire une passe. En effet, les adversaires doivent s’éloigner à 9,15 mètres et doivent placer au moins deux ou trois joueurs dans un mur dans l’hypothèse d’un tir. Cela crée de vastes espaces pour passer aux joueurs rapides dans la surface de réparation. Inévitablement, il arrivera une époque où toutes les équipes procéderont de cette manière. » Les tombeurs des Red Devils appliquent donc de nouveaux schémas sur cette phase de jeu arrêtée, si bien « qu’en mars 2015, le leader du championnat danois, le FC Midtjylland(…)(a) marqué un but sur coup franc par match en moyenne, le taux le plus élevé d’Europe » . Un autre football est donc possible…

Quant à Claude Makelele, seul joueur à apparaître dans le titre d’un chapitre du livre, son transfert du Real Madrid à Chelsea, à l’été 2003, reste le plus bel exemple de l’importance de la lecture des statistiques et de la relativité de l’intuition. Florentino Pérez confirmera. Après avoir lu cet ouvrage, Darren Tullett a reconnu avoir compris « pourquoi l’Angleterre ne gagne jamais » . Le chapitre Pourquoi l’Angleterre perd alors que les autres gagnent ? vous donnera les réponses en sept phases tragi-comiques. Phase 1 : avant le tournoi, c’est une évidence que l’Angleterre gagnera la Coupe du monde. Phase 2 : l’Angleterre rencontre un ancien ennemi de guerre pendant le tournoi. Phase 3 : les Anglais concluent que leur sort a basculé sur un coup de malchance ne pouvant arriver qu’à eux. Phase 4 : le pire est que les autres trichent. Phase 5 : l’Angleterre est éliminée bien avant la finale. Phase 6 : la vie de tous les jours reprend son cours après l’élimination. Phase 7 : un bouc émissaire est désigné.

« Les tournois de football semblent avoir sauvé plusieurs centaines d’Européens du suicide »

Mais derrière ces phases, à prendre au second degré, se cache une analyse en profondeur des maux anglais. Et cette analyse se veut sociétale, car le football est un objet d’étude comme les autres. Ce n’est pas un cas ex nihilo : « Les Romains ont bâti leur empire avec une armée issue de toutes les classes de la société. Ce n’est que lorsque l’armée est devenue une profession d’élite réservée à certaines familles que l’Empire romain a commencé à décliner. Se borner à faire la sélection dans un ensemble plus restreint revient à se priver de compétences. Plus le groupe de personnes de départ est large, plus il est vraisemblable que surgissent de nouvelles idées. C’est notamment pour cette raison que des réseaux étoffés comme la City de Londres et la Silicon Valley, qui drainent les talents de toute la planète, sont si créatifs. Il en va de même pour la Premier League. Le problème du football britannique est que les Anglais arrivant au plus haut niveau sont dans une écrasante majorité issus d’un seul groupe social déliquescent : la classe ouvrière. » On l’aura compris, les maux anglais ne sont donc pas que footballistiques.

Au fil des pages, on a souri en lisant les chapitres Les supporters sont-ils polygames ? ou Des fans sautent-ils vraiment par la fenêtre lorsque leur équipe perd ? Finalement, on pourra maintenant se moquer des supporters britanniques et de leurs relations « changeantes » avec leurs équipes de cœur. Et on sera finalement rassuré d’apprendre que la connexion sport-suicide est un mythe : « Très grossièrement, les tournois de football sur les périodes considérées semblent avoir sauvé plusieurs centaines d’Européens du suicide. » En 2016, l’été sera sans doute plus léger ! En parcourant les derniers chapitres de ce livre, on a repris conscience (si on l’avait oublié…) de l’injustice du monde à la lecture du chapitre Le fléau de la pauvreté ou Pourquoi les pays pauvres sont faibles en sport. Car dans le sport, tout n’est pas que travail et/ou talent : « Un autre critère permet d’expliquer la réussite sportive : le seuil des 15 000 dollars. C’est le revenu moyen par habitant minimum qu’un pays doit atteindre pour gagner des titres. Seul le Brésil peut se vanter d’avoir fait exception à la règle. » Triste réalité…

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