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Lyon, où sont les fafs ?

Par Anthony Cerveaux
Lyon, où sont les fafs ?

Pointés du doigt pour des actes racistes en tribune et en dehors, les supporters lyonnais sont dans le collimateur des pouvoirs publics. Mais derrière l’effet d’annonce, la réalité est plus nuancée dans les virages selon ceux qui la vivent chaque week-end.

« Le retour du racisme en tribune » , c’était le point d’orgue de la conférence de presse donnée par Antoine Boutonnet, chef de la division nationale de lutte contre le hooliganisme (DNLH), le lundi 20 février au ministère de l’Intérieur. Dans la liste des groupes de supporters surveillés (Bordeaux, Lyon, Montpellier, Nice, Saint-Etienne), seuls les gones le sont effectivement pour des faits en liens avec du racisme. Corroborant la réputation historique de certaines tribunes lyonnaises, quelques supporters lyonnais, à coups de « White power, une seule couleur » contre Montpellier et de tags nazis à Saint-Etienne, ont redonné une coloration brune à un virage du stade Gerland en particulier, le virage sud. « Dans cette tribune, beaucoup d’amalgames sont faits avec la politique. Pour des gens extérieurs, c’est compliqué de faire la différence mais il n’y a pas qu’une seule entité dans le virage » , contre-attaque d’emblée Christophe, porte-parole de Lyon 1950, le seul groupe officiel de la tribune. Un avis partagé par l’Olympique Lyonnais pour qui « le virage sud est très complexe » . Oui mais voilà, aujourd’hui, certains dans ces travées y ont la parole radicale plus facile.

« Dès qu’il y a un débordement dans le virage, le seul élément identifiable c’est Lyon 1950 »

Il y a encore quelques années, pourtant, le sud ne se faisait pas autant remarquer par ses prises de positions politiques. Les Nucleo Ultras (2000- 2007) formaient un groupe résolument ultra, se positionnant ouvertement contre le foot business. Les Lugdunum’s Lyon (1993-2007), le principal groupe du virage, n’était, comme les Nucleo, pas spécialement tourné vers la politique au stade, même si individuellement, certains des membres de ses deux entités pouvaient afficher leur nationalisme. Globalement, même s’il est clair que les virages lyonnais ont toujours penché à droite, les « fafs » étaient moins visibles au milieu des années 2000 dans le virage sud qu’au virage nord dans les années 1990, à la grande époque nationaliste des Bad Gones. Même parmi les « indépendants » , cette frange de supporters lyonnais essentiellement regroupés dans le virage sud, dont le nombre est difficilement identifiable, et qui sont souvent à l’origine des « fights » avec d’autres groupes dans la rue, tous n’étaient pas nationalistes. Si l’on en croit Julien (le prénom a été changé), un habitué du virage depuis une dizaine d’année, il y avait chez les « indépendants » des gens de gauche, d’extrême droite et d’autres complétement apolitiques. « Chez eux, quelques-uns faisaient même la chasse aux jeunes qui essayaient de politiser la tribune et disaient à ceux qui voulaient jouer les fafs que la politique n’était pas la bienvenue dans le virage » , se souvient Julien. C’était davantage le coup de poing qui servait de dénominateur commun.

En 2007, Nucleo Ultras et Lugdunum’s ont fusionné pour fonder la Cosa Nostra Lyon (CNL). Objectif : avoir un groupe qui pèse dans le virage. Mais, dans les anciens groupes, certains supporters, pas forcément emballés par le rapprochement, s’éloignent. Rapidement, pourtant, forte de plus de 500 membres, la CNL se fait entendre et entre dans des relations houleuses avec Jean-Michel Aulas. Accusé de débordements violents, le groupe a été dissous, en avril 2010, par décret du ministère de l’intérieur, alors qu’il n’est plus reconnu officiellement par le club. « Les difficultés avec le club relevaient essentiellement de problématiques ultras (fumigènes, nom du groupe, violences) et n’étaient pas du tout liées à la politique » , explique une source proche de l’OL. Lors de la dissolution de la CNL, Christophe et quelques autres ne veulent pas que le virage sud s’assoit : « On s’est dit qu’il fallait faire repartir quelque chose, monter un nouveau groupe pour faire revivre la tribune. » A 37 ans, dont plus de dix passées au sud, Christophe a une certaine légitimité pour soutenir le projet. Rejoints par certains jeunes du Virage Nord désireux de s’impliquer davantage, le groupe vire ultra et les rangs du noyau grossissent rapidement. Après un an de balbutiements, Lyon 1950 est reconnu par l’Olympique Lyonnais à l’été 2010.

Mais les difficultés ne manquent pas… « C’est pas évident d’être un groupe officiel au virage sud, c’était d’ailleurs aussi le cas pour la Cosa Nostra Lyon avant nous, car dès qu’il y a un débordement dans le virage, le seul élément identifiable c’est le groupe » , déplore Christophe. En d’autres termes, une source proche du club analyse : « Avec la présence des « indépendants » , ce n’est pas possible pour un groupe d’avoir la mainmise sur le virage sud et de contrôler tout ce qui s’y passe comme dans le virage nord où les Bad Gones sont la seule entité. » Et justement, comme ça déborde plus ouvertement qu’avant et que les pouvoirs publics cherchent des responsables, c’est le nom de Lyon 1950 qui se murmure. Selon Julien, pourtant, la réalité est complexe : « Quand tu viens au sud soit tu adhères à un groupe et tu es cadré, soit tu viens à côté et dans ce cas tu es libre de faire un peu ce que tu veux. Chez les Indeps, les anciens qui canalisaient autrefois les débordements politiques ont pris du recul, du coup ça a libéré certains jeunes, plus engagés en matière de politique qui ne rencontre plus les mêmes barrières qu’avant. »

« La violence fait partie des choses qui attirent dans la tribune »

Si certains croient pouvoir se lâcher plus facilement qu’auparavant, c’est aussi parce que le virage sud traîne une réputation de nature à drainer les jeunes nationalistes en recherche de sensations fortes. « A Lyon, c’est le virage sud qui regroupe la plupart des mecs qui bougent dans la rue. On ne peut pas nier que la violence fait partie des choses qui attirent dans la tribune et qui attirent une certaine catégorie de personnes » , explique Julien. Mais qui dit violence ne dit pas forcément tendance nationaliste. En tout cas, chez les anciens. Chez les plus jeunes, en revanche, qui semblent surfer sur la radicalisation de l’extrême droite dans la cité du Rhône, c’est une autre histoire. « Les trois, quatre têtes pensantes, actifs politiquement et qui vont au stade, sont au virage sud. La ville de Lyon devient un laboratoire de l’extrême droite en France, donc forcément ça contamine les tribunes » , signale un connaisseur de l’extrême droite locale. Selon Rebellyon, un média alternatif et anti-autoritaire lyonnais, auteur d’un article très détaillé sur la question, l’extrême droite radicale drague depuis quelques années la frange des supporters indépendants. Tour à tour, les jeunesses identitaires et la mouvance néo-nazie tentent d’attirer des hooligans lyonnais dans leur giron et dans leurs actions. Et de fait, autour du Bunker Korps, l’ancien local de Lyon Dissident ouvert en avril 2010 et fermé depuis, diffusant notamment les matchs de l’OL, supporters et militants nationalistes se côtoyaient.

De son côté, Christophe l’assure, Lyon 1950 ne fait pas de politique : « Les retours que la LICRA a fait de notre rencontre ne décrivent pas la réalité. Il y a un vrai travail pour laisser la politique en dehors du groupe. Après on n’est pas à l’abri d’un raté mais on saura faire le nécessaire pour pas que ça se reproduise. Il faut qu’on essaie de faire comprendre aux gens à l’extérieur que Lyon 1950 ne peut pas être utilisé à des fins politiques. » Ce qui n’est pas le cas de Mezza Lyon, une fime d’une quinzaine de personnes, créé il y a quatre ans, et qui s’affiche ouvertement nationaliste. Ce sont six de ses membres qui ont été interpellé à Saint-Etienne pour des tags nazis à proximité du local des Magic Fans. De nombreux supporters indépendants se laissent de plus en plus aller à l’expression de leurs convictions nationalistes, comme à Montpellier en janvier dernier. Le bloc de béton à gauche de la tribune Jaurès n’est donc pas si homogène qu’on veut bien le laisser croire. Différentes tendances cohabitent (fans, ultra, violente, raciste) et le retour d’idées d’extrême droite semble davantage être le fait d’une minorité influente et visible que personne ne contredit. Un peu comme dans un certain Kop à Paris il fut un temps.

David Pereira da Costa, le dix de cœur du RC Lens

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