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Michel : « Les entraîneurs qui n’aiment pas les numéros 10 mentent »

Propos recueillis par Javier Prieto-Santos
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Après le Rayo, Getafe, Séville et l'Olympiakos, Michel, l'ancien meneur de jeu du Real Madrid à l'époque de la Quinta del Buitre, serait le favori pour prendre la succession de Marcelo Bielsa sur le banc de l'OM. Un homme qui croit beaucoup à l'importance du numéro 10, même s'il portait le 8.

Interview réalisée à l’été 2013

Que représente pour vous ce numéro 10 ?

L’importance du 10 dans l’histoire du football est fondamentale. Excepté Cruijff, tous les joueurs qui font que ce sport soit le plus populaire du monde portent ce numéro : Zidane, Platini, Maradona, Pelé… Si on aime ce jeu, c’est avant tout grâce à eux.

Qu’est-ce qui différencie le 10 des autres joueurs ?

Les 10 ont toujours été des footballeurs cérébraux. Ils ont le spectacle dans leur tête, ils amusent les stades et donnent vie à la circulation du ballon. Ce sont des références : c’est très rare de voir un joueur porter le 10 et avoir les pieds carrés. En Espagne, on dit souvent : « Dis-moi quel 10 tu as et je te dirai comment joue ton équipe. » Cela veut dire beaucoup de choses. Cela veut surtout dire que la victoire, seule, ne vaut rien, s’il n’y a pas la manière. Et ceux qui se chargent de la manière et de mettre le sceau « qualité » , ce sont les 10.

Pourquoi portiez-vous le 8 plutôt que le 10 ?

Lors de ma première année au Real, je portais le 10 avant d’avoir le 8 et c’était une vraie fierté. Après, c’est Gallego, Martín Vázquez ou Laudrup qui l’ont porté. Il était entre de bonnes mains. Aujourd’hui, les joueurs portent des numéros qui ne veulent rien dire, c’est aussi pour cela qu’on a l’impression que les 10 ont disparu. Aujourd’hui, il y a encore des joueurs techniques et spectaculaires qui donnent du sens au jeu. Toutes les équipes en Espagne ont des meneurs de jeu, des cerveaux, quels que soient les systèmes ou la tactique. Que tu sois une équipe défensive ou offensive, ça ne change rien, il faut un leader technique. Pourquoi ? Parce qu’avec eux, le chemin du but est moins long, les 90 minutes sont moins longues et le plaisir est plus grand. Pour tout le monde.

Pourtant certains entraîneurs n’aiment pas vraiment les meneurs de jeu…

Les entraîneurs qui n’aiment pas les numéros 10 mentent. Ceux qui disent qu’ils peuvent se passer d’eux pareil. Le 10 à l’ancienne a disparu, mais il existe toujours. C’est un numéro éternel qui traverse le temps. Aujourd’hui, on parle du neuf et demi, ou de footballeurs comme Xavi qui ne sont pas considérés comme des vrais 10 parce qu’ils jouent plus en retrait. Pour moi, les 9 et demi et les Xavi ce sont des 10, parce qu’ils ont le match dans leur tête et la qualité nécessaire pour faire des passes décisives et donner du sens au collectif. Pour moi, Xavi et Özil sont des 10 modernes. Ils sont partout, tout ce qu’ils font a un sens et beaucoup de classe. Les anciens 10 étaient des joueurs, peut-être plus fantasques, mais c’est tout… Le gros point commun de tous les grands 10, c’est qu’ils auraient pu jouer à n’importe quelle époque. Si Maradona, Pelé, Platini ou Zidane pouvaient jouer aujourd’hui, je pense qu’ils ne seraient pas ridicules. Au contraire. C’est pareil pour Xavi, Iniesta ou Özil. Ces joueurs-là auraient été bons, il y a 20, 30 ou 40 ans. On parle de types qui ont une intelligence de jeu hors du commun. Aujourd’hui, le football va de plus en plus vite, mais qui gagne des titres ? Ceux qui traitent bien le ballon, pas ceux qui sautent le plus haut ou qui court le plus vite.

En tant qu’entraîneur, quelle liberté accordez-vous à vos 10 ?

Moi qui ai été un 8 et un 10 dans mes premières années de pro, je me vois mal brider mes joueurs aujourd’hui. J’aime qu’ils me surprennent, parce que s’ils arrivent à me surprendre, ça veut dire qu’ils surprennent l’adversaire. J’aime la spontanéité et les prises de risques de mes joueurs. Au quotidien, je ne me bats pas pour qu’ils jouent bien au football, mais pour qu’ils comprennent le jeu. C’est ça qui rend meilleur tout un groupe et c’est pour ça que nous nous battons tous les jours.
L’Espagne, c’est un aquarium. On a beaucoup de gros poissons dans un petit bocal

Votre Real a souvent rencontré le Milan de Sacchi. Une équipe sans numéro 10…

Sacchi a été révolutionnaire. C’était un maître tacticien qui a fait du Milan une machine tactique. Mais il a aussi été sélectionneur, et même s’il n’aimait pas les n°10, il me semble que Baggio était un titulaire indiscutable… Pour Sacchi, l’organisation, c’était très important. Mais quand je vois l’Espagne jouer, je ne vois pas de désorganisation. Elle a une organisation basée autour du ballon. Celle de Sacchi était basée sur l’espace. Je ne sais pas pourquoi on associe le talent et la qualité au désordre. Je ne suis pas d’accord avec ça. Pour moi, quand il y a du talent et des joueurs avec des caractéristiques de 10, il y a de l’ordre. Le seul désordre qu’ils provoquent, c’est dans l’organisation de l’équipe adverse pas dans la leur. Oui, Milan était vraiment une équipe parfaitement organisée, mais si elle a autant gagné, c’est parce qu’il y avait aussi une part d’improvisation. Gullit, Donadoni, Van Basten, ils te foutaient le bordel. C’est ça qui était magnifique : ces grains de sables qui, au lieu d’enrayer la machine, te le faisaient avancer.

Quelle est la place du numéro 10 en équipe d’Espagne ?

Avant on se demandait : « Si tu fais jouer Xavi, Iniesta, Silva et Cesc ensemble, qui récupère le ballon ? » Maintenant, on pense à l’inverse. Si tu joues avec beaucoup de 10 ensemble, ou avec des footballeurs qui ont les caractéristiques des n°10, tu donnes la priorité à la possession de la balle, tu maîtrises le match. Beaucoup disent que l’Espagne est ennuyeuse à voir jouer parce que sa possession de balle est stérile. Mais la possession, c’est le moyen d’attaquer, mais aussi de se défendre. Si l’adversaire n’a pas le ballon, comment il va marquer ? Tout ça pour dire que l’Espagne a récupéré l’essence du football, l’héritage laissé par les 10. C’est-à-dire avoir le ballon et savoir quoi en faire en toutes circonstances et de manière efficace et intelligente. L’Espagne, c’est un aquarium. On a beaucoup de gros poissons dans un petit bocal. Regarde bien les poissons, même quand ils sont des milliers dans un mètre carré, ils ne se marchent pas dessus. Ils sont très mobiles. Comme nos 10.

En Allemagne et en Angleterre, on accorde moins d’importance au 10. Vous avez une explication à cela ?

Les Allemands et les Anglais ont longtemps été corsetés. Les latins jouent au football pour éviter les contacts et sont à la recherche d’espaces. Eux, en revanche, ils cherchent l’impact et ils mettaient des ballons dans la boîte. Je pense que c’est pour ça qu’il n’y a pas de grande culture du 10 chez eux. Il a fallu que des entraîneurs étrangers arrivent en Premier League pour qu’on arrête de voir des longs ballons vers les attaquants. En Angleterre, le jeu, les centres passaient avant tout par les ailiers. Les 10, eux, ils mourraient de faim. Je me rappelle Glenn Hoddle, un joueur merveilleux. Bah en Angleterre, il était perçu comme un extraterrestre. Tu l’aurais mis sur la lune, c’était pareil. Il a dû se sentir très seul parfois pendant les matchs…

En Espagne, il ne faisait pas bon être un 10 il y a encore quelques années.

Pendant longtemps, on s’est méfié du 10. On a toujours eu des doutes sur leur investissement. On leur reprochait de ne pas assez se défoncer, de ne pas assez courir. Des Xavi ou des Iniesta à mon époque, ils auraient été critiqués. J’ai souvent entendu dire : « Il est petit, il ne court pas vite, il ne saute pas haut. En vrai, il n’a que de la qualité technique et de la vision de jeu. » C’était bête. On a longtemps préféré le muscle à la malice. C’était du temps de cette bêtise énorme qu’était la Furia. Et regarde maintenant où on en est : on a fait du chemin.

Qu’est-ce qui explique qu’on forme moins de meneur de jeu aujourd’hui ?

Quand j’étais petit, je jouais dans les potrerosde mon quartier de Madrid. Je dribblais des troncs d’arbres et des vieilles dames avec leur caddy de courses. Il n’y avait pas de lignes, pas de buts, mais les possibilités étaient infinies. Aujourd’hui, tous les mômes jouent dans des gymnases, sur des terrains synthétiques. Tout est encadré ; aseptisé, c’est de plus en plus rare de les voir jouer dans la rue. Le football est tellement organisé qu’il tue la création et la prise d’initiatives. C’est aussi pour ça qu’on a moins de 10. Il faut de la fantaisie pour que ce type de joueur émerge et c’est quelque chose qui a beaucoup à voir avec tout ce qui t’entoure.
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Propos recueillis par Javier Prieto-Santos

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