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Mais qui es-tu, Kouban Krasnodar ?

par Yann Bouchez
Mais qui es-tu, Kouban Krasnodar ?

Un nom aussi dégueulasse que méconnu. Une première participation à l'Europa League en 2013. Et puis, surtout, une tripotée de joueurs aux parcours exotiques. Voilà où Djibril Cissé vient de poser ses crampons. Visite des lieux.

Pour préparer son arrivée à Krasnodar, capitale de la région du même nom aux confins de la Russie, non loin de la Géorgie et de l’Arménie, Djibril Cissé a peut-être appelé Charles Kaboré. Peut-être que le Burkinabé, qui fut son coéquipier deux saisons à Marseille (2007-2009), lui a raconté les spécificités de ce « kraï » – subdivision administrative – de 5 millions d’habitants bordé par la mer d’Azov et la mer Noire. Peut-être Charles lui a-t-il expliqué que là-bas, il y avait deux clubs et qu’il ne fallait surtout pas confondre le Kouban et le FK Krasnodar, propriété d’un richissime homme d’affaires russe. Peut-être même que l’ex-attaquant de l’équipe de France (41 sélections, 9 buts) a passé un coup de fil à son successeur à l’AJ Auxerre, Daniel Niculae, arrivé à Krasnodar à l’été 2012. Une certitude, au moins : les dirigeants du Kouban Krasnodar, après être allés chercher le Djib’ au Qatar, ne lui ont sûrement pas refilé le numéro de portable du Monténégrin Nikola Nikezić. Pourtant, Nikola est attaquant, comme Djibril, et connaît bien le Kouban pour y avoir joué. Pourtant, Nikola doit sûrement avoir des notions de français, après avoir évolué trois saisons au Havre. Mais la réticence des dirigeants du Kouban peut se comprendre. Car il n’est pas sûr que cet obscur attaquant des Balkans ait été la meilleure personne pour le convaincre de faire ses valises vers l’Est.

« Coups bas à Kouban »

Flash-back. En mars 2011, Nikola Nikezić, arrivé au Kouban à l’été 2010, a du mal à faire son trou. En une trentaine de matchs, il n’a planté que 4 fois, maigre statistique pour un attaquant. En même temps, on parle d’un mec qui a disputé moins de quarante rencontres au Havre, de 2007 à 2010, pour seulement 9 buts. Du coup, l’entraîneur de l’époque, Dan Petrescu, ne compte plus trop sur lui pour la suite de la saison. Et le lui fait savoir. Le joueur, qui ne peut même plus s’entraîner avec la réserve, veut se barrer. Une situation classique finalement, que tous les clubs connaissent régulièrement. Mais à la mi-mars, le syndicat international des footballeurs professionnels, la FIFPro, reçoit un courrier peu banal, signé de ce même Nikola Nikezić. « Le 5 mars, Nikolai Khilistunov, l’un des entraîneurs, a commencé par me demander de signer un document qui mettait fin à mon contrat, explique le joueur. Il m’a ensuite fait savoir que si je refusais, je ne pourrais pas quitter Krasnodar ou alors que je rentrerais handicapé au Monténégro. Quelques minutes après, deux hommes très musclés sont entrés dans la pièce et Khilistunov s’en est allé. L’un des deux mecs m’a mis ce document en face de moi et m’a demandé d’une manière très agressive de le signer. Quand je lui ai répondu que mon contrat finissait en 2011 et que les négociations ne se poursuivraient qu’en présence de mes agents, j’ai reçu un terrible coup au niveau du foie. Le deuxième homme a alors enlevé son manteau. J’ai vu qu’il avait deux pistolets. Ils m’ont demandé une nouvelle fois de signer ce papier. J’ai refusé et j’ai reçu un autre coup au même endroit. Après ils ont commencé à m’étrangler en me disant que j’allais devenir handicapé. Ils m’ont malmené pendant vingt minutes jusqu’à ce que je n’aie plus de forces et que je craigne pour ma vie. » Pas fou, le joueur finira par signer les documents qu’on lui tend. Même s’ils sont écrits en russe et qu’il n’y comprend rien. Quelques jours plus tard, il lance son cri d’alerte et accompagne son courrier de photos diffusées sur internet montrant son cou tuméfié. Dans la foulée, un ancien coéquipier viendra charger la barque du Kouban, affirmant lui aussi avoir été victime de menaces. Pour la première fois, le club russe fait parler de lui en dehors de ses frontières. Pas vraiment un bon coup de pub. Les jeux de mots faciles sont tout trouvés pour la presse : « Coups bas à Kouban » . Le club s’en tirera avec les réprimandes de Sepp Blatter et de la FIFPro et une amende de 180 000 euros.

Côté terrain, les résultats médiocres du Kouban ne lui valent pas l’attention des médias étrangers. Le club n’a jamais gagné une coupe nationale et opère une bascule régulière entre la première et la deuxième division russe. Pourtant, à Krasnodar, ville de 750 000 habitants, le foot plaît. Malgré la présence de plusieurs clubs, le Kouban a réussi à réunir, en moyenne, quelque 20 000 personnes par match à domicile lors de la saison 2012-2013, soit la meilleure affluence du championnat national.

Tour de Babel

Mieux, cet été, le Kouban a enfin fait parler de lui en positif. Pour la première fois de son histoire, débutée en 1928 sous le nom de Dynamo Krasnodar – il changera plusieurs fois de blaze jusqu’aux années 1960 -, le club s’est qualifié pour une compétition européenne. L’Europa League en l’occurrence, grâce à une cinquième place en championnat. De là à dire que le club n’a plus rien à voir avec celui d’il y a trois ans qui faisait l’ascenseur avec la deuxième division, il y a un pas… Certains dirigeants, à l’image du directeur sportif, Sergei Doronchenko, sont restés en place, malgré le scandale. Surtout, le club a gardé ses bonnes vieilles habitudes concernant sa politique de recrutement, avec un tropisme constant pour les joueurs aux profils improbables de globe-trotters.

Car Djibril Cissé n’a pas été la seule recrue en attaque. Le Kouban s’est aussi offert les services d’un certain Bi Goua Gohou. Cet Ivoirien, à seulement 24 ans, après avoir débuté sa carrière à Abidjan, a déjà connu le championnat du Maroc (Agadir) et celui de la Suisse (Neuchatel Xamax). Mais c’est avec Kayseri Erciyesspor qu’il a explosé… en D2 turque. Pas vraiment le genre à passer plus de deux ans dans le même club. Mais un gars qui ne craint pas le dépaysement, assurément. Fin juin, une revue des attaquants du Kouban permettait de confirmer ce goût prononcé pour la globalisation, version XXIe siècle de l’internationalisme : on y dénombrait un Nigérian, deux Roumains, un Arménien, un Brésilien naturalisé arménien, un Sénégalais et un Costaricien. En tout, l’effectif affiche plus d’une douzaine de nationalités. Comment dit-on Tour de Babel, en russe ?

Kouban éjectable

Pour diriger ce beau monde, l’entraîneur est toujours roumain. Il ne s’agit plus de Dan Petrescu, mais de Dorinel Munteanu. Et le nouveau coach, tout frais arrivant, aura fort à faire pour ne pas se faire virer avant la fin de l’année : depuis 2000, plus d’une vingtaine d’entraîneurs se sont succédé sur le banc du Kouban. S’il est une figure de stabilité dans cet environnement continuellement changeant, c’est bien M. le président. En l’occurrence, un certain Alexander Nikolayevich Tkachyov, le gouverneur de la région de Krasnodar, arrivé à la tête du club en 2001. Élu depuis 1995 à la Douma, ce baron local manie les paradoxes comme d’autres jonglent avec le ballon : réputé pour sa fermeté envers l’immigration illégale – un filon toujours porteur quand on dirige une région frontalière – et ses accents parfois racistes envers certains Géorgiens, son club ouvre ses portes à tous les étrangers qui souhaitent le rejoindre. Même si c’est pour parfois s’en séparer un peu brutalement. Nikola Nikezić peut en témoigner.

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