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Les aventures de Tartarin de Tarasov

Par Alexandre Doskov
Les aventures de Tartarin de Tarasov

Les Russes ne plaisantent pas avec leur président, même quand il s'agit de lui montrer de l'amour. Dmitriy Tarasov l'a appris à ses dépens, la faute à un tee-shirt plein de bonnes intentions, mais sorti au mauvais endroit et au mauvais moment.

L’alinéa 7 de l’article 14 du règlement disciplinaire de l’UEFA est formel : « La propagande idéologique, politique et religieuse sous toutes ses formes est interdite. » Tant pis pour le FC Barcelone, condamné à 30 000 petits euros d’amende l’été dernier, pour avoir célébré sa victoire en Ligue des champions en agitant quelques drapeaux catalans de trop dans le stade olympique de Berlin. Mais le Barça s’en tire plutôt bien. Le gardien de Bastia, Jean-Louis Leca, avait carrément failli se faire lyncher la saison dernière par les supporters niçois pour avoir brandi un drapeau corse après la victoire des siens. Le milieu de terrain russe Dmitriy Tarasov pensait avoir compris la leçon. Les drapeaux, c’est les embrouilles assurées. Tarasov est plutôt tee-shirts à message, si possible avec le président Poutine dessus. Alors à la fin du match de Ligue Europa Fenerbahçe-Lokomotiv Moscou, le 16 février dernier, le milieu de terrain du Loko enlève son maillot pour exhiber cette merveille stylistique : un tee-shirt dont il avait coupé les manches au ciseau, avec au milieu un portrait de Vladimir Poutine en costume militaire, béret compris, et cette légende : « Le plus poli des présidents. » L’UEFA tique, engage une procédure, et lui colle une prune de 5000 euros. Son club enrage et annonce que Tarasov sera puni d’une amende beaucoup plus lourde de 300 000 euros. Députés, dirigeants de la Fédération, le Kremlin, tout le monde en Russie se met à commenter l’incident, tout ça pour un joueur qui n’avait pourtant jamais fait parler de lui.

Le Poutine Gate

Dmitriy Tarasov aura beau se défendre, annoncer à la chaîne de télé russe Life News qu’il ne voulait « offenser ni provoquer personne(…)C’est mon président, je le respecte et j’ai décidé de montrer que j’étais avec lui partout. Il n’y a rien de grave dans ce que j’ai fait, et je suis certain que les personnes intelligentes le comprennent très bien. Je pense vraiment ce qu’il y a écrit sur ce tee-shirt » , expliquer qu’il avait déjà porté ce tee-shirt à d’autres matchs, rien n’y fait. Igor Lebedev, député à la Douma et membre de la Fédération russe de football, réplique ironiquement : « On ne peut que le remercier pour ce geste si stupide. Je le respecte en tant que joueur, mais il est impardonnable. Le patriotisme ne se montre pas sur des tee-shirts ou des photos. Une victoire 3-0 contre Fenerbahçe aurait été la plus grande preuve de patriotisme, et Tarasov aurait été acclamé par les fans. » Il est vrai que les planètes n’étaient pas alignées pour ce genre de démonstration. Le Lokomotiv Moscou venait de perdre 2-0 à Istanbul, et les plaies de l’incident au sujet de l’avion russe abattu par les Turcs au-dessus de la frontière syrienne en novembre dernier étaient très loin d’être refermées. « La Turquie est complice des terroristes » avait lâché Poutine avec son sens de la diplomatie habituel. De plus, le terme « Le plus poli des présidents » fait écho à une formule utilisée lors de l’invasion de la Crimée, les populations locales ayant, d’après la légende, considéré que les soldats russes étaient « des hommes polis » . Tout pour créer un sac de nœuds, en somme.

Lâché par le Kremlin

Dans son communiqué officiel, le Lokomotiv sort l’artillerie lourde en balançant le terme « inacceptable » , ou en expliquant que Tarasov n’avait prévenu personne de son geste. Côté soutien, Tarasov peut compter sur le président honoraire de la Fédération russe, Vyacheslav Koloskov : « C’est le portrait de Poutine, et alors ? Ça pourrait être Obama, le pape, le chef de l’ONU, c’est l’affaire de Tarasov. Si, au match retour à Moscou, des joueurs portent un tee-shirt du président Erdoğan, où est le problème ? » Tarasov trouve aussi du réconfort dans les bras de sa belle, Olga Buzova, vaguement chanteuse, un peu modèle, beaucoup star de télé-réalité, qui s’est déclarée « fière de son homme » sur Instagram. Jusqu’alors, Tarasov n’était qu’un solide milieu défensif de 29 ans – 1m92 pour 85kg mine de rien – né à Moscou, avant d’écumer les clubs de la capitale : formation au Spartak, un intérim au FK, et le Lokomotiv depuis 2010, avec entre-temps un passage à Tomsk au fin fond de la Sibérie à regarder passer le Transsibérien. Appelé en équipe nationale par Guus Hiddink en 2009, il ne connaît sa première sélection qu’en 2012 et participe à deux matchs de qualification pour le Mondial 2014 avec Capello. Une rupture des croisés l’empêche d’aller au Brésil, mais il est depuis redevenu l’un des meilleurs du championnat russe à son poste, goûte à nouveau aux joies de la sélection, et sera mardi soir au Stade de France. En essayant de ne pas faire de vagues cette fois-ci, et de ne pas exhiber son président préféré. Dimitri Peskov, porte-parole du Kremlin, interrogé sur une éventuelle aide financière au joueur, avait froidement répondu : « Non, ce n’est pas prévu. Nous respectons aussi bien les émotions des athlètes que les règles des instances du football. » Si même Président Vlad’ en perd sa politesse…

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