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Le FN, ce parti qui n’aimait pas le foot

Par Nicolas Kssis-Martov
Le FN, ce parti qui n’aimait pas le foot

Le Front National a publié un petit communiqué de presse sur le PSG de la plume de son « conseiller au sport auprès de Marine Le Pen », Éric Domard. Un coup de comm' sur ce QSG qui fait tant parler. Un coup plutôt réussi pour si peu de phrases et autant d’approximations. Mais au-delà de ce qui était attendu, cette guillerette embardée vers la question du ballon rond nous apprend beaucoup sur la difficulté du parti à s‘emparer du phénomène sportif.

Le FN boit du petit lait politique en ce moment. Non seulement ses scores électoraux placent le parti comme troisième force politique (après avoir été enterré lors de la scission mégrétiste ou encore après le siphonnage sarkozyste), mais surtout ses thématiques sont devenues le point de repère (pour ou contre, il suffit d’avoir regardé le débat Fillon/Copé pour en être persuadé) de l’ensemble de la droite, voire même au-delà. D’où peut-être la volonté de désormais s’aventurer sur un terrain où il s’était révélé pour le moins discret à travers ce communiqué. Le cas du football illustre ainsi parfaitement cette volonté d’imposer sa grille d’analyse dans tous les champs de la société, quitte à tordre la réalité et surtout à revenir aux bons vieux fondamentaux. Ses vieux fondamentaux à papa, dont certains commentateurs nous expliquent à longueur d’antenne ou d’éditoriaux que le nouveau Front s’en serait débarrassé avec le début de l’ère Marine.

Trop bourgeois pour le KOB

Historiquement, le football s’avère un objet culturel hostile pour cette famille politique. Vichy lui a fait la guerre, méprisant un sport de « métèques » et d’ouvriers, quand Jean Borotra et Jep Pascot ne juraient que par les disciplines enracinées telles que la pelote basque et évidemment le rugby (provincial et rural, donc révélateur « corporel » des valeurs du « pays réel »). Louis Alliot, compagnon de Marine Le Pen et une des têtes pensantes très « nouvelle droite » de la stratégie du FN, a d’ailleurs tâté du ballon ovale dans sa jeunesse. Son père lui a transmis son désintérêt pour le sujet, mépris auquel il ne déroge que pour adresser deux ou trois piques contre les « mauvais Français » de l’EDF ou pour défendre du bout des lèvres les trublions du KOB (même si en l’occurrence il ne faut pas se tromper, on avait beau chanter « Jean-Marie » dans les travées de Boulogne, le FN demeurait trop bourgeois pour vraiment satisfaire la soif de provoc et de violence des hooligans du « Français d’abord »).

Mais voilà, le monde (et la France républicaine surtout) étant mal fait, c’est le foot qui cristallise encore les passions populaires dans la nation de Léon Blum et Mohamed Benzemma, et finalement aussi les restes d’élan patriotique dont veut s’arroger le monopole voire l’exclusivité le parti à la flamme tricolore. Or, quand on est passé d’un anticommunisme viscéral – et il n’y a plus que Jean-François Copé pour percevoir de ce coté-là un quelconque danger – à un populisme anti-immigrés à la hache, le foot offre quelques belles entrées pour diffuser son discours. Après avoir défendu dans sa « prime jeunesse » la participation des Bleus au Mondial de 78 en Argentine, Jean-Marie Le Pen s’en est pris en 2006 à Zidane, personnage préféré des Français selon les sondages. Aux yeux du fan club de Jean-Marie, l’épisode du coup de boule montre à quel point ces « gens » – qu’on parle d’un célèbre international ou de la petite « racaille » de cités – ne pourront jamais fuir leur nature profonde. Bref, les noirs et les arabes sont seront toujours des non-nationaux posant problème. C’est donc peu dire que le Front National jubila ensuite lors des débats sur l’affaire des quotas ou les DTN de la FFF cherchaient avec Laurent Blanc à séparer le bon grain « de souche » de l’ivraie des « binationaux », traitres potentiels.

Quand le Parc acclamait Dahleb et Susic

Mais le communiqué dont nous parlons ici tente de monter les enjeux à tout autre niveau. Fini les piques selon l’actualité, il s’agit de produire de la cohérence. Et d’entériner, y compris dans les stades, la bascule du communisme vers l’islam du rôle essentiel de grand ennemi omnipotent et occulte qui jette ses vilaines tentacules sur un pauvre Hexagone esseulé. Pour résumer, on nous décrit une sorte de grande nébuleuse idéologique – ou théologique désormais s’appuyant sur des États forts, disposant d’une cinquième colonne à l’intérieur du pays – du PCF aux « immigrés arabo-musulmans » – le tout avec la complaisance du pouvoir en place – des accords sur le gaz soviétique de Giscard à l’accueil des fonds qataris dans les banlieues. Ce n’est pas tant la dimension économique du foot qui est mise en cause, puisque l’extrême-droite conservatrice, réactionnaire ou « solidariste » s’accommode fort bien du capitalisme « dans un seul pays », ou même simplement « pro-occidental ». C’est bel et bien l’identité du propriétaire qui suscite l’inquiétude, et non pas, ce qui semble pourtant le principal des enseignements, sa puissance financière. A bien l’observer, le PSG n’est pas moins français qu’avant quand il appartenait à Colony, un fonds de pension américain. L’achat de joueurs arabes, effectivement envisagé, sûrement de manière un peu démago par Nasser Al-Khelaïfi, s’est concrétisé par l’arrivé de Zlatan Ibrahimović ou Thiago Silva, dont il n’est pas invraisemblable d’affirmer qu’ils ne fêtent pas l’Aïd aujourd’hui !

Par contre, par le passé, quand le PSG s’inscrivait apparemment si merveilleusement dans le « patrimoine sportif de la ville à laquelle il est rattaché » (selon les bons mots d’Eric Domard, réalisant un clin d’œil sûrement involontaire aux ultras en révolte en ce moment contre le foot moderne), il comptait bien davantage de héros « musulmans », de l’Algérien Mustapha Dahleb, ou bien sur le Bosnien Safet Susic, sans oublier, pour faire bonne mesure et équilibrer le propos, au tout début, l’international israélien Mordechaï Spiegler. Pour les Qataris, le vert constitue d’abord la couleur du dollar. Et ils se convertiront à tout ce qui leur permettra d’en gagner le plus possible (y compris avec de beaux joueurs italiens catholiques se signant avant d’entrer sur le terrain). La vaine tentative de retourner l’accusation de discrimination et de « quotas », vaguement sous-entendu dans le texte, se heurte par exemple à la réalité essentielle du foot capitaliste de libre marché depuis l’adoption de l’arrêt Bosman. A moins de considérer alors que certains noms vous limitent au statut de français de papier. N’est-ce pas ce que voulait avant tout soulever le FN ? Sinon ce dernier a peut-être des contacts à la secte Moon pour investir dans le club et le rendre aux « vrais Parisiens » ?

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Par Nicolas Kssis-Martov

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