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Lampedusa, où le football refroidit l’enfer

Par Gabriel Cnudde
Lampedusa, où le football refroidit l’enfer

C'est un petit lopin de terre qui ne représente a priori pas grand-chose. Pour des milliers de personnes fuyant les dictatures et les horreurs de la guerre, il s'agit cependant d'une terre sainte, d'une étape dans un voyage souvent tragique. Là-bas, où ne règne pas que la désolation, le football fait tout ce qui est en son pouvoir pour aider ces populations démunies.

Loin au large des côtes de la Sicile, région autonome à laquelle elle appartient, l’île de Lampedusa est l’un des points les plus méridionaux de toute l’Europe. Plus proche de l’Afrique que de l’Italie, et d’une superficie de 20 kilomètres carrés, ses paysages de carte postale attirent chaque année quelques touristes. Les vagues azur de la mer Méditerranée lèchent doucement les langues sableuses de l’île. Seulement, ces vagues n’amènent pas sur ces plages que coquillages et crustacés. Souvent, elles portent sur elles des embarcations défoncées, surchargées de milliers de personnes fuyant la misère et la guerre, prêtes à tout pour atteindre ces côtes européennes. Après les printemps arabes, ces gens viennent découvrir l’automne insulaire, enfin, seulement les plus chanceux. Une fois sur place, certains peuvent poursuivre leur long voyage, vers l’Italie, la France, l’Allemagne ou le Royaume-Uni. Pour beaucoup, en revanche, l’attente est longue. Et sur l’île, pour que la désolation ne vienne pas s’ajouter à des centaines d’autres traumatismes, certaines personnes se servent du football pour adoucir des peines souvent trop grandes. Là-bas, les acteurs du ballon rond n’ont pas attendu la mort d’un enfant pour se soucier de la question des réfugiés.

L’œuvre de l’A.S.D Lampedusa

En 2011, les journaux télévisés n’en faisaient peut-être pas leur sujet principal, mais les réfugiés affluaient déjà sur les côtes de Lampedusa. C’est à ce moment-là que quatre personnes ont décidé de créer l’A.S.D Lampedusa, un club de football doté d’une académie et d’un but très précis. « Ce club a été créé avec une seule idée en tête : donner aux jeunes personnes de Lampedusa la possibilité de grandir et d’apprendre les valeurs morales essentielles sur un terrain de football, puis de les appliquer dans la vie quotidienne » , peut-on lire sur le site officiel de l’association. Là-bas se côtoient des jeunes italiens et d’autres apatrides, à la recherche d’une nationalité, mais surtout à la recherche d’une raison de vivre, quand toutes les autres ont disparu. Il n’est pas rare, malheureusement, qu’un jeune homme, une jeune fille, débarque à Lampedusa sans ses parents, morts en mer. Une réalité tragique à laquelle l’A.S.D tente de répondre. Ainsi, les mineurs non accompagnés de Lampedusa peuvent aujourd’hui être pris en charge par l’académie du club, qui offre logement et football. Certes, tous les jeunes ne peuvent en bénéficier, mais de plus en plus.

Aujourd’hui, les infrastructures permettent de changer la vie de 95 élèves, qui ont tous entre 5 ans et 12 ans, et de 25 joueurs plus âgés, entre 14 ans et 16 ans, qui constituent l’équipe première de l’A.S.D, le G.S.D Lampedusa. Chaque année, ces jeunes joueurs vont participer à des tournois organisés au nord, en Sicile, et en Italie. L’opportunité pour eux de quitter les centres de la petite île qu’ils connaissent parfois trop bien. En janvier, par exemple, le Torneo Costa Gaia permet aux jeunes de l’A.S.D de partir pour Alcamo, une ville sicilienne coincée entre Palerme et Trapani. Là-bas, des clubs siciliens, italiens et même américains s’affrontent pour un titre anecdotique, là où ne compte vraiment que la joie de taper dans un ballon. Un autre tournoi emmène aussi ces gens à Montefalco, au nord de Rome. Des expériences pour changer d’air, ne serait-ce qu’une ou deux journées.

Lettre au président

Malheureusement, les choses n’évoluent pas dans le bon sens pour l’A.S.D Lampedusa. Un manque de moyens et d’infrastructures empêche l’association de grandir comme elle le voudrait. Alors tous les moyens sont bons pour attirer l’attention. Christian Cucina, le capitaine de l’équipe première, n’a d’ailleurs pas hésité à écrire une lettre au président de la République italienne, Sergio Mattarella, en mars dernier. Pas grand-chose, sans doute, mais pas grand-chose, c’est déjà quelque chose. « Si je vous écris aujourd’hui, c’est parce qu’on parle de plus en plus de la G.S.D, alors même que nous sommes de plus en plus témoins d’incidents tragiques » , commence-t-il. « À plusieurs reprises, nous avons voulu crier nos problèmes, nous, les jeunes de Lampedusa, mais nous n’avons toujours pas réussi, car malgré le nombre toujours croissant de morts, nous et nos problèmes, nous restons invisibles » , déplore-t-il ensuite. Pas agressif ni suppliant, Christian demande ensuite au président de leur rendre visite.

« Aujourd’hui, je prend la parole, et laissez-moi parler au nom des centaines de garçons et de filles, des jeunes gens qui vivent dans l’urgence au quotidien, et qui veulent avoir la même vie que les amis que nous rencontrons lors de nos tournois » , explique-t-il. « Je suis dans cette école depuis dix ans, et j’y ai reçu de l’affection, des louanges, des réprimandes, j’ai pu partager mes problèmes. (…) Président, quand le pape nous a rendu visite, c’était merveilleux, nous en gardons tous un très bon souvenir. Nous vous invitons à nous rendre visite à votre tour, pour partager avec nous nos vies quotidiennes. Merci pour tout ce que vous pouvez faire et tout ce que vous ferez pour nous. Un jour, Giuseppe Garibaldi a dit :« Construis l’Italie ou meurs. »Nous ne voulons pas mourir, nous voulons jouer avec le sourire, avec les gens de couleur que les anciens appellent les Turcs » , conclut-il. Avec un peu de chance, la prise de conscience collective de ces dernières semaines permettra à l’association de Lampedusa de grandir un peu plus. Elle le mérite. Parce qu’elle, elle ne peut sans doute pas donner des millions d’euros, mais elle a fait tout ce qui était en son pouvoir depuis des années.

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Par Gabriel Cnudde

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