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La France va perdre son triple A

Par Rico Rizzitelli
La France va perdre son triple A

Deux qualifications miraculeuses en Champions la semaine dernière ne sauraient masquer la cruelle réalité : le football de club hexagonal connaît un déclin lent et inexorable. Au point de perdre sa cinquième place européenne au profit du Portugal. En attendant pire...

L’invraisemblable élimination du PSG dans la phase de poules de la ligue Europa en est l’expression la plus probante. Le football français de club connaît un déclin lent et inexorable. Comme la sélection ne va guère mieux depuis 2006, et on espère qu’elle fera ravaler les langues sceptiques à l’Euro Polono-ukrainien de juin prochain, on se retrouve presque au même niveau que lors de la pire période hexagonale, entre 1960 et 75. Dans le gouffre abyssal qui séparait le grand Reims de Batteux de l’avènement des Verts d’Herbin. Dans le néant intersidéral qui partait de la troisième place des Bleus de 1958 pour arriver à l’émergence de la génération Platini (1975/86). Depuis lors, selon un mouvement pendulaire presque alchimique, quand les clubs n’éclaboussaient pas à l’échelle du continent (80/88 ; 98/2006), l’équipe de France prenait le relais et inversement. Trente années durant, il y avait toujours un motif de satisfaction. Ce n’est plus le cas, même si les qualifications miraculeuses des deux Olympique de la semaine dernière cachent encore un peu la forêt…

Tout le monde l’a oublié mais la France occupait la deuxième place au ranking européen (derrière l’Italie) au crépuscule de la déflagration Bosman. Entre 1990 et 1997, les clubs français ont compilé six places de demi-finalistes et autant de finalistes (pour deux victoires). Depuis, en quinze saisons donc, le total se limite à trois finales (l’OM en C3 en 1999 et 2004 et Monaco en 2004 également) et à deux demi-finales (Lens en C3 2001 et Lyon en C1, 2010). L’arrêt Bosman aura finalement appris que les grands joueurs vont dans les grands clubs et que ceux-ci ne sont pas français. Affaire de culture, de tradition et de cette capacité qu’ont les Français à être dépendants d’un homme : Germain à Reims, Rocher à Saint-E, Leclerc et Tapie à Marseille…

La France bientôt derrière la Russie et l’Ukraine?

L’arrêt Bosman aura également engendré une certaine forme d’uniformisation du jeu en regroupant en Europe la quasi totalité de l’élite mondiale. Néanmoins, les quatre grands pays européens ont réussi à conserver ce supplément d’âme propre aux pays où le foot est quasi une religion. Les équipes anglaises, espagnoles, italiennes ou allemandes développent souvent un style bien identifiable même si elles alignent un maximum d’étrangers. La force de l’habitude, des coutumes, le poids de l’histoire. Dans ce classement, la France appartient au deuxième chapeau : fort parmi les faibles, faible parmi les forts. Et même arrimés à une cinquième place du classement UEFA, les clubs hexagonaux sont en train de perdre leur confortable statut dans le sub-top continental. Le Portugal (3 demi-finalistes en ligue Europa, l’an dernier, 3 autres qualifiés pour les 16èmes de finale de cette année plus Benfica en Champions) va passer devant la France. La Russie et l’Ukraine (bien que le Shakthar et le Dynamo Kiev soient décevants cette saison mais il reste le Metalist Kharkov qui a explosé Sochaux lors du tour préliminaire) risquent de faire de même. Sans compter les Pays-Bas. La dynamique va dans ce sens. Au contraire de leurs homologues du « deuxième chapeau » , les clubs d’ici ferraillent toute l’année pour jouer la ligue Europa avant de la délaisser la saison d’après. Les exemples récents sont édifiants : Lille et Paris au début 2011, Rennes et Paris encore ces jours-ci. « Tous les clubs du pays rêvent de jouer en Europe. Après, on n »a pas toujours les effectifs pour jouer toutes les compétitions. Quand on arrive aux tours à élimination directe, on est dans le dernier rush en championnat et les entraîneurs français choisissent souvent la compétition domestique » justifie Pierre Dréossi, le directeur sportif rennais. Sauf que le Zénit Saint-Pétersbourg, le CSKA Moscou, le Sporting du Portugal, le Shakthar Donetsk, Fulham ou Braga sont allés en finale de la petite coupe d’Europe et ces clubs n’apparaissent pas inaccessibles à leur concurrents français.

Comme ailleurs, la France est en train de perdre son triple A à cause de son absence de stratégie, de son incapacité à se remettre en cause, de la perte de son identité de jeu. Partout ailleurs où on soupe de la domination des six, sept mêmes clubs en Europe, on travaille dur. A Donetsk, à Dortmund, à Porto on réinvente le scouting puisqu’on ne peut pas lutter sur le plan financier. Ailleurs, à Arsenal ou à Naples, on cherche des solutions par le jeu. On essaie de ne pas insulter l’avenir . Ici, on a l’impression de naviguer à vue. Même le sélectionneur affirme que « la philosophie de jeu, on s’en branle » (cf. So Foot n°92)… Un homme biberonné à « la culture de la gagne » ne peut s’intéresser au style, à la façon de gagner. Dréossi à la barre : « Aujourd’hui, en club comme en sélection, le temps joue contre les coachs. Le résultat prime sur tout. Les identités de jeu se sont diluées dans les innombrables mouvements de joueurs. En France, on a longtemps joué pour ne pas perdre mais depuis deux ans, c’est en train de changer. »

Prendre exemple sur l’Allemagne

Comme ailleurs, la France pourrait être l’arc-en-ciel de l’Europe, le carrefour de toutes les influences. Au lieu de quoi, ce pays renvoie la triste image d’un empire colonial grisonnant, invariablement tourné vers le passé. Au contraire de l’Allemagne qui a su se remettre en cause après l’échec de la coupe du monde 1998 (quart de finale tout de même) où la DFB a dépêché des émissaires partout sur la planète -et notamment en France- pour repenser sa formation. La loi du sol votée en 2000 lui a également permis d’intégrer de jeunes allemands nés de parents étrangers et aujourd’hui, la Nationalmannschaft propose le jeu le plus cosmopolite du continent. La sélection mixe ainsi les forces traditionnelles du pays (jeu collectif, mental, impact) avec des subtilités techniques moins courantes sous ces latitudes. Le football de club n’est pas en reste puisque l’Allemagne vient de prendre la troisième place à l’Italie et tous les clignotants sont au vert. On ne serait pas surpris que la Grande Teutonie domine l’Europe toute entière d’ici cinq ans, en club comme en sélection…comme ailleurs.

En sport, la France n’est jamais aussi brillante que lorsqu’elle tombe bien bas ou lorsqu’elle est humiliée. On n’en est pas encore là mais le bouillon d’eau tiède qui entoure les clubs d’ici ne présage rien de bon. En dehors du pays, la Ligue 1 n’intéresse personne ou presque. L’achat du PSG par les Qataris, celui programmé de Monaco par Rybolovlev va peut-être précipiter le championnat dans une autre dimension. Au pays des songes et des multinationales, un émir du Koweït pourrait acquérir l’OM, un mogul ukrainien l’OL, un fonds de pension américain Dijon et la N’drangheta l’AC Ajaccio. Ce serait peut-être, finalement, la solution idéale, l’option « Thiriez au pays des merveilles » , celle qui éviterait de se poser des questions qui fâchent et des remises en cause douloureuses. Faire des rêves pour une France qui dort d’un sommeil profond et léthargique : c’est l’équation royale en quelque sorte, le début de la fin.

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Par Rico Rizzitelli

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