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Jean-Christophe Hembert : « J’ai vu plus d’incivilités au théâtre qu’au stade »

Propos recueillis par Aymeric Le Gall
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Connu du grand public grâce au rôle de Karadoc, ce gros bêta attachant et accroc à la bouffe, dans la série Kaamelott, Jean-Christophe Hembert est avant-tout un homme de planches. Metteur en scène au théâtre, celui-ci est également un amoureux fou du ballon rond et de l'OL. Entretien passionné.

Comment t’est venu cet amour pour le foot et pour l’OL ?

J’ai commencé a aimer le foot en regardant la Coupe du monde 86. Je me rappelle très clairement d’un but de Fernandez sur une passe de Giresse contre la Russie en match de poule et j’ai couru partout dans l’appartement ! Et ça a enchaîné une semaine plus tard par France-Brésil, le plus beau match qu’il n’y ait jamais eu. Tout de suite après je me suis intéressé à l’OL, j’ai connu ce club en D2 quand il prenait des branlées donc tout ce qui se passe maintenant à Lyon ce n’est plus que du bonus pour moi. J’ai connu le pire de l’OL donc même quand ça va moins bien, ça restera toujours 100 fois mieux que là d’où l’on vient.

Donc tu n’as pas de regrets que la fin du règne lyonnais sur la Ligue 1 ait sonnée depuis quelques années maintenant ?

Non car même aujourd’hui l’histoire est belle avec tous ces petits jeunes, il y a une vraie identité dans cette équipe. Comme dans toute belle histoire on a ensuite connu un certain déclin mais on sort de nouveau la tête de l’eau, et c’est aussi ça qui donne de la valeur aux choses.

T’es un habitué de Gerland ?

Oui bien sûr mais pas que. Je fais aussi les déplacements en Coupe d’Europe. Je suis déjà allé à Liverpool, à Madrid, à Milan, à Barcelone, à Turin… Enfin dès qu’il y a de beaux stades j’y vais. Je suis aussi allé à San Mamés à Bilbao.

On sent qu’on a affaire à un vrai passionné des stades, des ambiances. Quel est ton rapport aux stades, à la manière de supporter ton équipe ?

Bizarrement je vis ça de manière assez solitaire en fait. Même si je vais au stade avec mes enfants ou avec des amis, ça reste une expérience assez intime. Pour moi c’est assez paradoxal puisqu’on représente toujours les supporters comme des gros bourrins en groupe grégaire, alors que pour moi ça a plus à voir avec quelque chose de l’ordre du religieux. Dès lors oui, c’est vraiment quelque chose de très intime.

Quels matchs t’ont vraiment marqué à Gerland ?

Il y a les deux matchs contre le Real. Une année on met 3-0 (saison 2005-2006, ndlr), une année on met 2-0 (saison 2006-2007, ndlr). Et cette année-là, quand on gagne 2-0, je pense qu’on peut encore en rajouter 4 de plus à la mi-temps tellement on a surnagé. C’était vraiment impressionnant de puissance et de confiance. Sinon plus récemment, j’ai bien aimé notre match contre Marseille (victoire 1-0, ndlr). On a eu très chaud et il y a finalement le but de Gourcuff qui libère tout le stade. C’était vachement bien. De toute façon il se passe toujours quelque chose à Gerland, on ne se fait jamais chier. Je me souviens aussi d’un match en tour préliminaire de Ligue des champions contre Anderlecht. C’était le premier match de Lisandro. C’était en août et le stade était en feu, il faisait 40°. Licha avait claqué un triplé, c’était de la pure folie. Après à l’inverse, il y a eu aussi des grosses déceptions comme en demi-finale retour de Ligue des champions contre le Bayern en 2010 (défaite 3-0 à Gerland, ndlr). Jusqu’à l’hymne c’était beau et dès les trente premières secondes du match on a compris qu’on allait se manger une taule et ça n’a pas loupé !

C’est bientôt la fin de l’époque Gerland pour l’OL. Tu n’es pas trop nostalgique de quitter ce stade ?

Il y a différentes manières de voir ça. Intellectuellement c’est bien de changer de stade, ça va avec l’évolution normale de la vie: on change d’école, d’appart’, de copine, on avance quoi. Après effectivement c’est un peu dur parce que j’y vais depuis que je suis gamin. Il y a un truc à Gerland, c’est que je m’y suis toujours senti en sécurité. On dit qu’il y a des bagarres et tout ça mais ça ne représente à peine 1% de la population de ce stade et encore ça n’arrive pas tout le temps. Et puis il y a des trucs étonnant là-bas aussi. Par exemple, il y à 40000 personnes qui sortent de là pour arriver tous ensemble dans une deux fois 4 voies… Aujourd’hui, n’importe quel plan d’urbanisme bannirait ça, normalement il devrait y avoir 6 morts par match ! Mais au final tout le monde connaît ce truc là et ça fonctionne très bien. C’est de l’éducation et de l’auto-régulation. Et pour revenir à la violence, on dit souvent que les stades sont des endroits d’écervelés alors que moi, personnellement, j’ai vu beaucoup plus de comportements incivils et putassiers dans des avants-premières de cinéma ou dans des premières au théâtre avec des gens que l’ont dits plus raffinés que dans des stades de foot. Alors qu’un stade de foot comme celui de Gerland, t’as quand même 40000 personnes et tout se passe bien. C’est quelque chose qui m’émeut cette forme d’éducation de ceux qui se rendent au stade. Alors bien sûr t’auras parfois 100 mecs qui veulent se battre mais pour le reste c’est quand même très beau.

Qu’est-ce que tu penses de l’image dont pâtissent parfois l’ensemble des supporters de foot en France ?

Je pense qu’il y a un gros malentendu. Les gens ne voient que les quelques tarés qui se cognent et occultent tout le reste. Encore une fois, pour les personnes lambdas, les supporters c’est une foule, c’est un mouvement grégaire qui ne fait que gueuler… Alors que pour moi, mon club c’est ma religion, c’est une approche complètement intime avec un rapport personnel très fort à ses couleurs. Allumer tous les supporters c’est comme dire que la foule qui va à la Mecque ou sur le parvis du Vatican, ce sont des débiles. Mais non ! C’est juste un chemin personnel. Du coup si on va un peu plus loin, tout mouvement humain de masse peut être résumé par le prisme des 100 connards qui ont envie d’évacuer leurs frustrations. Je trouve que c’est dommage de voir les choses de cette manière. C’est occulter en quelque sorte tout le reste de personnes tranquilles, de l’ouvrier au banquier en passant par l’étudiant, qui ont aussi en eux une part du club. Ça représente la majorité des supporters. Mais bon ça on ne le regarde jamais…

On sent vraiment le passionné, voire le fidèle, qui parle !

Oui. Au foot j’ai mon planning. Je sais quand joue Lyon tous les week-ends. Ça m’est arrivé de raccourcir un peu une pièce de théâtre pour aller voir un match de Ligue des champions. Le spectacle commence à 19h30 et il devait donc faire 55 minutes pile pour que j’aie le temps d’aller au bistrot d’en face pour entendre l’hymne de la Champions League ! Le meilleur film qui parle de ça, de cette passion, ce n’est pas un film sur le foot mais sur le football américain. C’est l’œuvre d’Oliver Stone, L’enfer du dimanche. En Anglais le titre est encore plus parlant, c’est Any given sunday, qui est une formule religieuse. Ça veut bien dire ce que ça veut dire: tous les dimanches on va à la messe. Et bien là c’est pareil, le stade c’est un rendez-vous sacré. Toute l’énergie de la semaine tend vers cet instant. Et ce qui est très beau dans ce film c’est qu’il est fait par un amoureux de sport. Il est sans complaisance, il parle du dopage, des primes, de la dope, il parle de tout. Mais il parle aussi de la passion des gens pour le jeu. Pourquoi d’un coup quand il y a une finale de Coupe du monde t’as deux milliards de personnes sur terre qui sont devant leur écran ? C’est un truc magique. Après, tout est critiquable évidemment parce que ça amène aussi plein d’enjeux financiers, immoraux et tout ça, mais il y a quand même un truc fascinant dans le foot.

Tu nous tend la perche en parlant de foot et de cinéma. Il y a des films sur le foot qui t’ont marqué ?

Il y a évidemment Coup de tête qui est bien mais sinon pour moi tout le reste c’est de la merde. Toutes les espèces de comédie comme 3-Zéro c’est tout simplement ridicule. En plus il y aurait un superbe truc à faire sur le foot, surtout en ce moment, parce qu’en plus du match en lui-même et de ses petites histoires t’as de tout: de la géopolitique par exemple avec les Qatariens à Paris, la guerre entre beIn et Canal, etc etc. Il y a moyen de faire un truc passionnant là-dessus… une série par exemple. Mais il ne faudrait pas prendre ça par le petit bout de la lorgnette en se disant : « ouais c’est du foot, on va mettre des mecs qui gueulent avec des perruques rouges dans les tribunes » . Je pense vraiment qu’il y aurait moyen de faire un truc hyper classe.

Tu penses que le foot se prête plus au drame qu’à la comédie ?

Oui je pense. Enfin rien n’empêche de mélanger les deux, comme l’a fait Oliver Stone. Dans son film il y a des trucs drôles, notamment les rapports avec les journalistes, mais au final le sport est plutôt le support pour écrire un drame. Justement le problème c’est que quand c’est la comédie française qui s’en empare c’est… (il réfléchit, ndlr). Comment s’appelle l’autre comédie sur le foot avec Gad Elmaleh et compagnie ? Ah oui, Les seigneurs ! Oh la la… Quand on compare à l’émotion que peut amener le sport, c’est insultant de faire des machins comme ça. Ce sont des trucs qui sont fait par des gens qui n’ont jamais ressenti l’émotion que peut procurer le sport et qui est unique.

Sinon, ce n’est pas trop dur d’être fan de foot dans un milieu du théâtre que l’on imagine à des années-lumière du ballon rond ?

Ça l’était mais je pense que ça l’est moins aujourd’hui. Et puis au final je m’en branle ! J’ai souvent organisé des répet’ selon les horaires des matchs. Même quand je n’étais qu’assistant-mise en scène j’arrivais à trouver des subterfuges pour pouvoir me libérer les plages de matchs.

Des subterfuges du style ?

Je sais pas, je disais : « Je pense que ça serait bien de faire une pause histoire de laisser infuser ce qui vient de se passer en répet’ » (rires) !
C’est fait : Johan Cruyff à Barcelone !

Propos recueillis par Aymeric Le Gall

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