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  • Shanghai SIPG-Changchun Yatai (5-1)

« J’aimerais bien que des Chinois marquent des buts »

Par Antoine Védeilhé, à Shanghai
«<span style="font-size:50%">&nbsp;</span>J’aimerais bien que des Chinois marquent des buts<span style="font-size:50%">&nbsp;</span>»

Après avoir affolé les compteurs et dépensé plus de 380 millions d’euros lors du mercato hivernal, les clubs chinois ouvraient le bal de la nouvelle saison de la Chinese Super League ce week-end. À Shanghai, les nouveaux riches du SIPG, emmenés par Hulk et Oscar, n’ont pas fait dans la dentelle face au Changchun Yatai (5-1). Pour le plus grand bonheur des 26 000 supporters du Shanghai Stadium, qui viennent tout juste de se piquer au foot. On y était.

Hu Min est un homme comblé. C’est la reprise du championnat à Shanghai et son petit stand dressé à la hâte à l’entrée du Shanghai Stadium ne désemplit pas. Ses maillots « replica » vendus à un peu plus de 5 euros s’arrachent comme des petits pains. « Les affaires marchent très bien ! L’arrivée des stars étrangères, c’est bon pour mon business » , s’esclaffe Hu Min, casquette rouge du SIPG vissée jusqu’aux oreilles. Oscar, Hulk, Ricardo Carvalho… Les maillots floqués aux noms des stars étrangères qui ont rejoint Shanghai récemment passent de main en main. Wenbo, 7 ans, a choisi le numéro 8 d’Oscar : « Oscar, c’est le meilleur joueur de l’équipe et du championnat. Je voulais absolument avoir son maillot pour aller au stade ! » « Tu as bien choisivpose en expert Hu Min. Oscar, c’est une star internationale ! Il vient tout juste d’arriver et il va faire une grande saison. » Le coup d’envoi est dans plus d’une heure, mais déjà, son étal frôle la rupture de stock.

Arraché à Chelsea pour plus de 60 millions d’euros – un record en Asie – Oscar, vingt-cinq ans, est le denier caprice du Shanghai SIPG. Le club, détenu par le Shanghai International Port Group (SIPG), une compagnie publique qui gère le port de Shanghai, le deuxième plus important au monde, s’est taillé une équipe au fort accent lusophone pour espérer jouer les premiers rôles en Chinese Super League. Après avoir attiré Hulk l’an dernier pour plus de 55 millions d’euros, les Red Eagles ont dû ressortir le carnet de chèques pour convaincre son compère brésilien de mettre le cap à l’est. Avec un salaire estimé à 25 millions d’euros par saison, Oscar est désormais l’un des joueurs les mieux payés au monde. Les supporters le savent, et ils l’attendent au tournant : « On espère qu’il est venu pour jouer au foot, lâchent, sceptiques, deux Chinois bedonnants. Là on parle de beaucoup d’argent. Il faut vraiment qu’il soit le meilleur joueur du championnat, et qu’il nous fasse gagner le titre. »

Soda, clope et Grande Muraille

Il est 19 heures 30 à Shanghai. La nuit a fini d’envelopper les gratte-ciel qui encombrent le décor, l’air est frais et l’indice de pollution n’est pas encore dans le rouge : c’est un soir parfait pour jouer au football. Les derniers à entrer dans le stade, verre de soda à la main et clope au bec, ont à peine le temps de trouver leur place qu’il faut déjà se relever pour la Marche des Volontaires, l’hymne national chinois. « Debout ! Les gens qui ne veulent plus être des esclaves ! C’est avec notre chair que nous bâtirons notre nouvelle Grande muraille. » Comme en écho à ce couplet patriotique, les défenseurs du Changchun Yatai, l’adversaire du soir, donnent de leur personne et taclent à tout-va pour tenter de contrer l’attaque 100 % brésilienne du SIPG. Mais tout va trop vite. Cinquième minute de jeu à peine, la première salve est lancée. Long ballon de Hulk. Remise en une touche d’Oscar pour Wu Lei, la jeune pépite locale. Plat du pied : but. Le stade est en liesse. Des « Wu Lei ! Wu Lei ! » à vous percer les tympans descendent des tribunes, mais la joie est de courte durée. L’arbitre siffle un hors-jeu flagrant, annulant l’ouverture du score et se mettant ainsi à dos tous ceux pour qui l’alignement des défenseurs est un concept abstrait. C’est-à-dire beaucoup de monde. En connaisseur, Marcel, un chétif allemand de vingt-huit ans et supporter du VfB Stuttgart, se marre : « Franchement, ils mettent de l’ambiance ! Le problème, c’est qu’il n’y a personne dans le stade et parmi ceux qui sont là, la moitié n’y connaît strictement rien. »

L’euphorie est de courte durée. À la 25e minute, Fan Xiaodong, milieu de terrain du Changchun Yatai, profite d’un ballon mal dégagé par la défense du SIPG pour aller nettoyer la lucarne d’une merveille de demi-volée (0-1). Les cinquante supporters qui ont avalé les 2000 kilomètres qui séparent Shanghai de Changchun, dans le nord du pays, exultent. Leur équipe, modeste 12e du championnat l’an dernier, tient la dragée haute aux joueurs locaux. « C’est bien pour eux, glisse, fair-play, une supportrice du SIPG. Ils doivent être contents de marquer parce que dans leur région du Dongbei, les types n’ont que de la neige et du riz. » Pour rivaliser avec les grosses cylindrées de la Chinese Super League, le groupe Yatai, qui pèse dans le monde du ciment, du charbon et des produits pharmaceutiques, n’a pas hésité lui non plus à puiser dans ses immenses réserves de yuans. L’attaquant nigérian de Watford, Odion Ighalo, a accepté de rejoindre la région la plus froide de Chine contre 200 000 euros par semaine. Une somme que ses coéquipiers veulent le voir justifier, à en juger par le nombre ahurissant de ballons qu’ils tentent de lui transmettre. Mais à force d’abuser de longues passes vers l’avant, les visiteurs se font contrer. Huerke sur penalty – « Hulk » en version originale –, puis Elkeson, à la conclusion d’un jeu en triangle 100% brésilien, remettent le SIPG à l’endroit juste avant la mi-temps. Mais le vrai temps fort de ces 45 premières minutes est l’œuvre du Special Two, André Villas-Boas.

Villas-Boas, l’anti-système

On joue la 30e minute au Shanghai Stadium, lorsque AVB se retourne vers son banc de touche et fait appel à son traducteur. Quelques mots glissés à l’oreille, puis un signe en direction du quatrième arbitre : changement. Le remplacement pourrait paraître anodin si le joueur appelé à quitter la pelouse après seulement une demi-heure de jeu n’avait pas été Zhang Huachen, un gamin de dix-neuf ans. Mi-janvier, la CFA, la Fédération chinoise de football, annonçait dans un communiqué que pour favoriser l’émergence de jeunes joueurs chinois et limiter la dépendance aux stars étrangères, chaque équipe devrait aligner au coup d’envoi un joueur local de moins de vingt-trois ans. L’entraîneur portugais du SIPG a donc respecté la règle, mais en sortant son milieu de terrain avant même la fin du premier acte, il a envoyé un message fort aux instances dirigeantes chinoises. En conférence de presse d’avant-match déjà, le Portugais n’avait pas eu la langue dans sa poche au moment de commenter la mesure : « C’est une mauvaise décision. Ça met beaucoup de pression sur les jeunes joueurs. Ce n’est pas le bon moyen pour former un jeune joueur, ils ont besoin de temps. Il faut leur donner un délai, ils ne doivent pas commencer dès le coup d’envoi. On va devoir se battre avec cette situation pendant la saison. Il faudra qu’on s’adapte. » La veille, Ma Lin, l’entraîneur du Liaoning Whowin, avait usé de la même méthode pour exprimer son opposition à cette mesure largement critiquée par les entraîneurs dans l’Empire du milieu.

Au retour des vestiaires, le SIPG déroule. Pendant qu’Ighalo se démène tout seul sur le front de l’attaque du Changchun Yatai, les Brésiliens du SIPG se régalent de combinaisons à une touche. Oscar joue en marchant, Hulk court partout, mais oublie de lâcher le ballon et Elkeson est à la conclusion des actions pour s’offrir un triplé. Comme à l’entraînement. Dans la tribune de face, les Loups du Ciel – les ultras à la sauce chinoise – donnent de la voix : « SIPG, SIPG, vous êtes imbattables. SIPG, SIPG, la légende continue. » Finalement, seul Lei Min, un supporter de la première heure, n’a pas vraiment le sourire. « Là, il y a 4-1, quatre buts de joueurs étrangers. C’est normal qu’ils mettent des buts, ils sont au-dessus techniquement. Mais bon ici, on est en Chine, c’est le championnat chinois, alors j’aimerais bien que des joueurs de chez nous marquent aussi des buts » , regrette-t-il, les yeux scotchés sur l’écran géant qui annonce l’entrée dans le temps additionnel.

Oscar : « C’est sûr, ce n’est pas la Premier League »

Le message est reçu fort et clair par Wu Lei, l’international chinois et chouchou du public shanghaïen. Profitant d’un ballon qui traîne dans la surface adverse, il ouvre son pied, clôturant la marque et la partie. Comme dans un concert de chanteuse pop devant un public d’adolescents, plusieurs milliers d’écrans de téléphones portables s’allument et s’agitent dans les tribunes. Aux cris des « Wu Lei ! Wu Lei ! » , les joueurs du SIPG s’offrent un tour d’honneur mérité. Après deux victoires en Ligue des champions asiatique, ils viennent parfaitement de lancer leur saison sur la scène nationale.

Au sortir des vestiaires, Oscar fait le boulot et s’arrête une petite minute en zone mixte avant de monter dans le bus. Pendant qu’une poignée de supporters hurle son nom, il assure dans un demi-sourire et un anglais hésitant : « Oui, je suis heureux ici, je me sens bien ! Bien sûr ce n’est pas la Premier League parce qu’en Angleterre ou même en Allemagne, il y a une très grosse ambiance. Mais nos supporters ont été bons aujourd’hui. J’ai trouvé le stade vraiment sympa. » Derrière son stand de produits contrefaits, Hu Min doit avoir le sourire. Et attendre avec impatience le prochain mercato.

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