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Ils sont si forts que ça, ces Belges ?

Par Christophe Gleizes
Ils sont si forts que ça, ces Belges ?

Toute récente 6e au classement FIFA et largement en tête de son groupe de qualification, la Belgique peut assurer son billet pour le Brésil et la Coupe du monde dès ce vendredi contre la Croatie. Tandis que l'engouement est palpable, entretien avec quelques spécialistes pour mieux saisir le niveau réel de nos voisins.

Un match nul vierge de buts contre l’équipe de France, une victoire en Écosse (0-2), cinq points d’avance dans son groupe de qualifications et un engouement incomparable. Telle est l’équation du problème belge. Séduisante mais encore trop tendre face aux grosses équipes, la Belgique propose un spectacle plaisant dont la qualité réelle reste difficile à mesurer. Journaliste à Sport Foot magazine depuis plus de trente ans, Pierre Bilic a vu défiler de nombreuses sélections sous ses yeux avisés. Il jette sur la génération de Hazard et Fellaini un regard passionné : « Elle est différente par rapport aux deux grandes équipes belges de l’histoire : celle de 1982, qui a battu l’Argentine lors du mondial, et celle de 1986, qui a terminé quatrième de la Coupe du monde au Mexique. Honnêtement, la génération actuelle a quelque chose en plus, elle dégouline de talent. Elle doit cependant progresser en terme de régularité dans la performance. J’attends de voir son attitude après un premier revers ou face à une grande nation. Selon moi, nous sommes plein de potentiel, mais nous ne sommes pas encore au niveau de sélections confirmées comme l’Espagne, l’Italie ou l’Allemagne. »

Ancien international belge (67 sélections) reconverti entraîneur de Lille dans les années 80, le recruteur Georges Heylens participe du même constat : « En voyant encore le match contre l’Écosse, je trouve que nous sommes dans une phase de progression fulgurante. Depuis deux ans, on dispose d’un effectif qui peut joueur le haut du tableau, catalogué parmi les six meilleures nations du monde. Le sélectionneur a mis en place un football attractif, conçu vers l’avant, qui me plaît, à moi, personnellement. » Victorieux 2-0 à Glasgow, grâce à des buts de Defour et Mirallas, les Diables rouges sont aujourd’hui en tête de leur groupe de qualifications et peuvent légitimement viser un bon résultat lors de la Coupe du monde au Brésil. « Attendez, il ne faut pas non plus mettre la charrette avant les bœufs, nous sommes quand même dans une série qui n’est pas incroyable non plus. Certes, nous avons devancé la Croatie et une Serbie en pleine reconstruction, mais notre poule n’était pas terriblement relevée, tempère le technicien René Taelman. Ce qui est appréciable, c’est seulement qu’on gagne ces matchs maintenant, alors qu’avant, on les perdait. Personnellement, pour avoir suivi la sélection de près depuis 40 ans, je ne pense pas qu’on puisse dire que c’est la meilleure équipe de l’histoire belge. Sans sous-estimer la performance de nos joueurs, la Belgique au haut niveau, ce n’est pas nouveau, même si on a connu une traversée du désert dans les dix dernières années. Quand on me dit que celle-ci est plus forte que l’équipe de Mexico, avec Georges Grün, Éric Gerets, Jean-Marie Pfaff ou Enzo Scifo, je n’en suis pas persuadé. »

Points forts en pagaille

L’ancien entraîneur de clubs exotiques, au premier rang desquels l’Olympic Casablanca, Africa Sport et Al-Arabi, reconnaît pourtant volontiers être séduit par cette nouvelle vague : « C’est vrai que nous assistons à l’avènement d’une génération presque spontanée et très talentueuse. Tous ces joueurs ont poussé en même temps dans la même catégorie d’âge. Cette équipe n’a pas encore de joueurs de classe mondiale, mais en revanche, elle a de bons éléments à tous les postes. C’est un ensemble de bons joueurs, un collectif dans lequel il y a plusieurs individualités qui peuvent marquer des goals. » Justement, quelles sont les caractéristiques de la sélection ? « La qualité principale de cette équipe n’est pas de faire le jeu, on l’a d’ailleurs vu contre la France, que j’ai trouvée supérieure en terme d’organisation. Même si je suis pas vraiment fan de ce style de jeu, la Belgique excelle aujourd’hui en contre-attaque. On ne joue pas un football de possession comme Barcelone, mais notre force, c’est que l’équipe va très vite, avec un côté offensif qui est direct et plein de talent, notamment grâce à nos ailiers interchangeables. Sur le plan tactique, cela fait longtemps qu’on n’a pas eu une équipe capable d’aller aussi vite de l’arrière vers l’avant. » Une analyse partagée par Pierre Bilic : « Cette équipe a appris à être patiente durant sa campagne de qualification. Elle sait désormais être efficace, comme un boxeur qui attend que la garde adverse s’abaisse avant de frapper. »

S’il rechigne à identifier des joueurs clés, René Taelman met davantage en avant la profondeur de banc d’un groupe d’une vingtaine de joueurs de haut niveau, « qui peuvent se remplacer l’un l’autre » . Les points forts de la sélection sont pourtant nombreux et bien connus, selon Georges Heylens : « D’abord, avec Courtois, la Belgique dispose d’un gardien de but adulé par l’Europe entière actuellement. Derrière, on a des garçons qui sont des valeurs sûres, regroupés autour de Vincent Kompany qui est un élément hors du commun. C’est un leader charismatique, on ne devient pas capitaine de Manchester City par hasard. Au milieu, Hazard et De Bruyne se révèlent très talentueux techniquement dans leur rôle d’ailiers et sont des éléments porteurs et perforateurs au plus haut niveau, en plus d’être relativement habiles à la finition. Enfin, devant, Benteke joue bien son rôle dos au but et arrive à se montrer efficace. » Une fois ce constat fait, l’ancien international ne trouve aucun point faible évident : « Le gros avantage de cette équipe, c’est qu’à chaque poste, il y a doublon. C’est une équipe qui propose un football positif et pas attentiste. Je les ai vus jouer contre l’Écosse et j’ai reconnu quelque chose du Barça, surtout dans cette mentalité de faire voyager le ballon. Le secteur défensif fait toujours en sorte de ne pas perdre le cuir, soutenu par un milieu de terrain capable de le maîtriser. » Autant de qualités qui ravissent Pierre Bilic : « Nous disposons de plusieurs atouts intéressants. Mais pour moi, le joueur le plus important, c’est Witsel. Son intelligence dans le placement et sa facilité dans le jeu de distribution en font pour moi la pierre angulaire de l’équipe et la véritable pièce maîtresse de la sélection. »

L’effet Wilmots

Le journaliste l’assure, « la sélection n’a pas de problèmes, seulement de petites faiblesses. Au niveau des latéraux par exemple, où nos remplaçants sont plus faiblards que les titulaires. Pareil en pointe, où Romelu Lukaku ne peut pas encore faire le travail dos au but de Benteke. Il est trop limité techniquement, il lui manque encore un ou deux ans de progression. » Il faut donc se tourner vers René Taelman pour trouver quelques raisons de ne pas s’enflammer : « L’équipe fonctionne bien, mais il y a un manque évident de mobilité en défense, avec 4 stoppeurs aux 4 postes d’arrière. Vermaelen ou Kompany, c’est du solide, c’est de la très grande taille, mais ce n’est pas très agile. On risque d’encaisser des goals quand on aura contre nous des équipes plus vives. Notre système défensif est très efficace dans le domaine aérien, notamment sur corner, mais on risque de connaître des difficultés devant des joueurs vifs et rapides comme Suárez, Neymar, Jesús Navas ou Ribéry. Prenez un Espagne/Belgique, si on met Jesús Navas contre Vertonghen à gauche, clairement, notre défenseur, il va pas toucher le ballon » , explique-t-il dans un sourire. L’entraîneur belge regrette en outre l’absence d’un vrai leader : « On n’a pas un avant-centre de génie, ni d’organisateur du jeu au milieu, comme pouvait l’être Enzo Scifo. Contrairement à Hazard, Scifo était un meneur de jeu plutôt dans le style de Pirlo ou Zidane, il faisait voyager le ballon. Pour moi, Eden Hazard, c’est plus un numéro 10 comme Degryze, dans le sens où c’est un joueur virevoltant et mobile, très bon derrière l’avant-centre, qui sait tirer profit de ses terribles accélérations dans la phase finale d’une action. » Ce jugement, aussi juste soit-il, n’a pas forcément lieu d’être selon George Heylens : « C’est vrai qu’on n’a pas vraiment de leader capable de prendre l’équipe en main sur le terrain, à part peut-être Hazard ou Van Buyten. Mais je pense que c’est un problème compensé par la personnalité de Wilmots. C’est quelqu’un qui reste toujours positif dans l’action et la détermination, une personnalité hors du commun qui me rappelle un peu d’une certaine façon Raymond Goethals. »

Officiellement nommé sélectionneur de la Belgique en juin 2012 après le départ de Georges Leekens, l’ancien joueur de Bordeaux et de Shalke 04 a réussi à mettre tout le monde d’accord au pays, en apportant « une rigueur germanique et des méthodes de travail personnalisées qui faisaient défaut » . « C’est un atout formidable, estime Pierre Bilic. Il y a une communion totale entre Marc Wilmots et le groupe. Après 2002, nous avons connu une longue traversée du désert qui a duré 10 ans. Et puis soudainement, quelque chose s’est mis en place ; et le déclencheur de tout cela, c’est Marc Wilmots. Il a réalisé un travail exceptionnel, a tout mis en place et a tout planifié. » Avant de poursuivre : « Robert Waseige faisait jouer l’équipe dans un 4-4-2 à plat. Wilmots, lui, a des joueurs tellement doués qu’il peut jouer en 4-3-3 afin de donner énormément de profondeur dans le jeu. Concrètement, comme on dit en Belgique, on joue en V, ce qui fait que le porteur du ballon a toujours une solution. » Pour une fois, René Taelman est d’accord avec ses deux acolytes : « Georges Leekens a vraiment bâti le socle, Wilmots a seulement ajouté quelques joueurs, mais il a surtout insufflé un esprit d’équipe à ces individualités. Il est plus rassembleur que son prédécesseur. » Loin d’être un magicien, Wilmots peut aussi s’appuyer sur une formation de haut niveau, le championnat belge étant en reconstruction permanente avec les départs successifs et précoces des jeunes talents à l’étranger.

Engouement populaire

Ainsi, avec des joueurs de qualité, une campagne de matchs qualificatifs réussis et un sélectionneur avisé, l’équation se fait tout de suite moins obscure. Et surtout, elle devient beaucoup plus sexy. « Il y a un véritable engouement de tout le pays pour cette équipe. Les gens se précipitent pour les voir au stade, car c’est le seul moment de l’année où ils peuvent voir les grandes vedettes belges qui sont parties de notre championnat. Il y a un emballement formidable que je partage, étant moi-même résolument optimiste » , constate Pierre Bilic. René Taelman ne dit pas autre chose : « En ce moment, les gens sont déchaînés. Pour le dernier match à domicile contre le Pays de Galles, il n’y avait plus une place disponible. Nos clubs ne marchent pas bien, le niveau en division 1 n’est pas très fort, voire faible comparé aux autres pays, donc les espoirs se rabattent automatiquement sur la sélection. »

De là à imaginer les Diables rouges champions du monde, il n’y a qu’un pas… que le technicien se refuse encore à franchir : « Selon moi, contre les grands pays, qui vont nous dominer dans le jeu par leur qualité tactique, on ne pourra pas rivaliser. On a une bonne génération qui peut faire de bonnes choses, mais à mon avis, on n’a pas une équipe pour dépasser les quarts de finale. » Plus confiant, Pierre Bilic espère une belle surprise, voire une révélation : « L’ancien sélectionneur Robert Waseige est parti au mondial 2002 avec une équipe qui n’avait que le tiers des capacités de celle-ci niveau talent. Et pourtant, grâce à une très bonne discipline tactique, nous avons su poser d’énormes problèmes au Brésil. Moi, je les vois bien quarts de finalistes de la Coupe du monde. Un miracle est toujours possible, mais il faut garder les pieds sur terre, ça serait déjà pas mal… Vous imaginez déjà, quart de finale ? Quel réveil ça serait ! » Georges Heylens a, lui, carrément la frite : « Il y a du talent à profusion. Je pense qu’on peut espérer être dans le dernier carré, on a la qualité, le fonds de jeu et la mentalité. » Réponse à partir du 12 juin prochain. En attendant, les Belges peuvent continuer à rêver. Et les Français se consoler d’un triste 0-0, peut-être pas si dégueulasse tout compte fait.

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Par Christophe Gleizes

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