Des espèces de lunettes de pessimisme qui, comme dans Men in Black, feraient oublier à certains que la dernière fois que le Paris Saint-Germain a été atteint du syndrome de Stockholm et a acheté un joueur qui lui a fait du mal en Ligue des champions, c’était en 2005, et que cet attaquant s’appelait Sergueï Semak. C’était bien. C’était un autre foot. C’était un autre PSG, où les Brésiliens qui arrivaient en grande pompe s’appelaient Everton et Souza. Ça avait certainement plus de « cachet » , comme dirait Stéphane Plaza. Mais si la pilule financière est difficile à avaler, vient désormais le moment de se prendre un peu de recul. D’arrêter le « c’est mieux avant » à outrance et d’accepter le « ça sera différent demain » , même si le changement choque et qu’il est nécessaire de résister avant que le sport paradoxalement appelé le plus « populaire » ne le soit vraiment plus. Juste parce que le football reste du plaisir pour les yeux. Juste parce que dans une Ligue 1 dont on ne cesse de dire qu’elle n’a peut-être jamais été aussi sexy, l’arrivée potentielle de Neymar est encore un plus. À tous points de vue.
L’âge de raison
La première division française a connu des stars, c’est un fait. Ronaldinho, Hazard, Drogba, Ibrahimović, Benzema et bien d’autres avant eux. Mais il y a toujours eu un « mais » . Paris a été un tremplin pour le jeune Ronnie qui débarquait du Brésil, Marseille une brève et belle étape pour Drogba le Guingampais vers la Premier League, Lille a formé Eden Hazard et ses crochets dévastateurs, idem pour Lyon avec Benzema, tandis qu’Ibrahimović est arrivé alors qu’il était – quoique toujours aussi excellent – plus sur la fin qu’au top de sa carrière. À 25 ans et après quatre saisons passées en Catalogne, Neymar Jr arriverait à Paris au meilleur moment possible dans sa carrière. Il n’est plus « un joueur en devenir » . Il n’est pas sur la pente descendante. Son jeu, évidemment toujours perfectible, a progressé et mûri.
Il s’est européanisé tout en restant brésilien dans l’âme. Et s’il y a à redire quant à sa capacité à être présent lors des grands matchs – excepté justement contre le PSG –, Neymar, 132 buts et 75 passes décisives avec le Barça en 223 matchs, arrive pour donner à Paris le meilleur de sa carrière, entre talent et maturité, fougue et expérience. Surtout, il quitterait le Barça pour être « la star de son équipe » , ce qui lui vaut quelques critiques. Quel mal à ça ? À son âge, avec son talent, il veut être le leader d’une équipe qui en a parfois manqué la saison passée. Sportivement, tous les feux sont au vert pour Paris et pour Neymar. Mais évidemment, Paris a d’autres raisons pour faire venir Neymar.
Le plus beau meuble de Conforama
Car l’opération marketing n’est pas belle. Elle serait exceptionnelle. Club Nike, Paris signerait le joueur numéro un de Nike, n’en déplaise à Cristiano Ronaldo. En effet, la marque à la virgule a compris depuis quelque temps déjà que Neymar était la coqueluche des jeunes. Elle a ainsi multiplié les campagnes avec le Brésilien, qui a également passé son été à se faire plaisir avec un autre sponsor : Red Bull. À 25 ans, Neymar est plus bankable que jamais. Son Picsou de père l’a compris, la branche marketing du PSG aussi. Les ventes de maillot vont pleuvoir, des gens qui n'en avaient que faire du PSG avant vont s’y intéresser, plaçant ainsi si besoin, un peu plus le PSG sur l’échiquier européen et mondial du football. Bénéfique pour Paris, mais pas seulement. En effet, la Ligue 1 Conforama tire là son plus beau meuble.
Alors qu’on lui promet de partout qu’elle sera plus scrutée cette saison – même présente dans les choix potentiels de Hunter dans FIFA –, elle gagnerait en visibilité avec l’arrivée de Neymar. Mieux, le PSG prouverait ainsi qu’il est capable de faire venir un joueur d’un top club mondial au top de sa forme, montrant ainsi que le challenge sportif de la L1 ne rebuterait pas tant que ça les joueurs. En somme, si on a le droit de détester le transfert de Neymar parce qu’on vomit le football business, parce qu’on déteste le PSG, ou parce qu’on n’aime rien, on a aussi le droit de dresser ce constat : Neymar en Ligue 1 et à Paris, c’est une vraie folie pour le football français.
Par Swann Borsellino
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