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Éric Assadourian : « Grimonprez-Jooris, c’était mon jardin »

Propos recueillis par Antoine Donnarieix
Éric Assadourian : «<span style="font-size:50%">&nbsp;</span>Grimonprez-Jooris, c&rsquo;était mon jardin<span style="font-size:50%">&nbsp;</span>»

Avec 278 matchs de Division 1 et 38 buts inscrits entre 1986 et 1997, Éric Assadourian est l'un des étendards de la relation franco-arménienne dans les années 1990. Aujourd'hui employé au sein du Stade brestois, l'ancien Lillois et Lyonnais fait le point avant ce France-Arménie. Entretien nostalgie.

Comment ça va Éric ?

Tout va bien ! Je suis au Stade brestois depuis maintenant deux ans, avec le projet de mettre en place une identité dans le centre de formation. Je suis à la fois directeur du centre de formation au club et entraîneur des U19 nationaux. Je viens de finir l’entraînement là, et je suis chez moi.

Tu es un joueur emblématique de la Ligue 1 des années 90 et un des premiers grands joueurs franco-arménien à avoir joué en France… Comment est-ce que tu te situes par rapport à ces deux pays ?

En ce qui me concerne, les choses ont été très claires et simples depuis le début. Je suis français, avec des origines arméniennes. J’ai été élevé comme un Français, né en France, comme mon père. Pour moi, il n’y a pas d’équivoque. Mes sélections avec l’Arménie, c’était lié à un projet avec Michel Der Zakarian, afin de faire grandir l’équipe nationale. Mais je ne pouvais pas devenir un Arménien fervent. Déjà, je ne parle pas un mot, sauf quelques mots relatifs à mes grands-parents. Mais pour le reste, je ne maîtrise absolument pas l’arménien. Mon grand-père est parti d’Arménie à un an, c’est dire ! Mon approche avec l’Arménie, elle s’est faite sur le tas.

Comment s’est passée ta jeunesse dans le Val-de-Marne ?

J’étais basé à Alfortville, où il y avait une très forte communauté arménienne. Via mon père, j’ai connu l’UJA d’Alfortville, l’équipe locale à tendance arménienne, en DH. Dans mon école, j’étais au contact aussi avec la jeunesse arménienne, avec des jeunes issus soit de mariages reconstitués, ou d’autres de mariages purement arménien. Mais je crois que pour notre génération, on s’est toujours considérés comme français d’origine arménienne. Notre intégration était totale.

Et comment as-tu décidé de t’orienter à fond dans le football ?

Un peu plus de capacités j’imagine… Mon père avait détecté chez moi beaucoup plus de talent footballistique que chez la moyenne des jeunes. En matière de scolarité, je me cherchais un peu, j’avais pris des formations par défaut. Quand l’opportunité de me former à l’INF de Vichy est arrivée après avoir passé le concours, j’ai voulu m’y engager pleinement.
Jean-Michel Aulas recherchait les meilleurs éléments pour chaque poste, et pour le mien, la référence française, c’était Christophe Cocard.

Tu joues d’abord tes premiers matchs en Ligue 1 à Toulouse, tu gardes quel souvenir ?

Je venais de sortir de l’INF, j’avais signé tout récemment avec Toulouse. D’autant qu’en 86-87, on avait joué le Naples de Diego Maradona en Coupe de l’UEFA. J’étais tout jeune, donc j’étais encore sur le banc, mais c’était déjà une grande satisfaction de voir jouer Maradona depuis ma place de remplaçant. J’ai passé quatre ans à Toulouse, ça m’a permis de beaucoup apprendre.

Ensuite, tu t’engages à Lille. C’était véritablement ton club de cœur ?

Absolument. C’est celui où j’ai pu le plus m’exprimer, trouver une identité forte qui me correspondait. En tant que footballeur dans ce moment-là, on dit souvent qu’on est dans son jardin. Grimonprez-Jooris, c’était mon jardin. J’avais même eu droit à une sélection en équipe de France Espoirs, quand l’entraîneur était encore Aimé Jacquet.

Assadourian, c’est évidemment cette confrontation aller/retour contre la Lazio de Rome en Coupe de l’UEFA. Ton plus beau souvenir de footballeur ?

Je n’irai pas jusqu’au plus beau souvenir. En revanche, c’est pour cette raison-là que j’ai voulu partir de Lille. Depuis quelques années, on ne jouait que le maintien, et moi, j’avais 27 ans, je souhaitais vivre autre chose. Mon envie au départ, c’était de rester à Lille, mais le président avait été honnête avec moi en me disant qu’il ne pouvait pas suivre financièrement. Je suis parti à Lyon pour jouer l’Europe, et ce match contre la Lazio était un bon moment, mais pas le plus fort. Pour moi, mon époque lilloise reste la plus belle.

En parallèle, tu es aussi un des autocollants de l’album Foot ’96 le plus répandu. Tu étais au courant ?

(Rires) Non, sincèrement, ce n’est pas trop le genre de choses sur lesquelles je m’attarde. J’essaie de faire mon métier avec de l’humilité, de la discrétion, ça me correspond très bien.

Pourquoi l’aventure lyonnaise ne s’est pas prolongée selon toi ? Tu en veux un peu à Jean-Michel Aulas ?

Il faut savoir qu’en 1996, on est déjà dans la préparation du grand Lyon. Jean-Michel Aulas recherchait les meilleurs éléments pour chaque poste, et pour le mien, la référence française, c’était Christophe Cocard. L’envie du président, c’était de le faire venir, et cela s’est présenté un an plus tard. L’aventure lyonnaise s’est arrêtée pour moi. Je le regrette, parce que j’avais joué le jeu, j’avais donné le maximum et il me fallait un temps d’adaptation après Lille. Après, je n’ai jamais été rancunier envers l’OL : Aulas avait été très clair en me disant que cela causait un doublon. Il n’y a eu aucune animosité dans cette discussion, je comprends cette démarche. Il fallait laisser la place, donc j’ai dû partir.
Souren Barseghian, ancien sélectionneur de l’Arménie disait : « Moi, je suis dans le football depuis plus longtemps que Platini, donc je connais mieux le foot que lui. » Un truc de fou…

C’est à ce moment-là, en 1998, que tu décides de t’engager pour l’équipe nationale d’Arménie. Un changement de niveau par rapport aux Espoirs en équipe de France, j’imagine…

Tu sais, à 28 ans et sans sélection nationale, tu n’attends déjà plus grand-chose de l’équipe de France. Donc je suis entré en contact avec des gens sur Aix-en-Provence, qui se donnaient à fond dans l’équipe nationale arménienne, pour aider l’Arménie via le sport. Pour moi, c’était tout de suite oui. Je voyais cela comme une aventure humaine, pour honorer à ma façon mes origines. Le projet était louable, parce qu’il permettait aux joueurs locaux d’Arménie de côtoyer des footballeurs professionnels, connaître notre hygiène de vie, notre façon de penser le football, transmettre notre savoir pour hisser le niveau de jeu du pays. Certains ont fini par jouer en Suisse, en Russie… C’était en bonne voie.

Malheureusement, le changement de sélectionneur et ta non-participation contre les Bleus pour les qualifications de l’Euro 2000 te font arrêter la sélection. Quelles étaient les raisons de cette décision brutale ?

À la fin des éliminatoires de 1998, Michel Der Zakarian décide d’arrêter sa carrière internationale, et je lui emboîte le pas. Là, je reçois un appel de Jean Djorkaeff, qui m’explique qu’il est en passe de reprendre la sélection nationale. Il voudrait me garder un moment avec lui, pour lui faire connaître l’effectif, faire un passage de témoin. Vis-à-vis de Jean, j’ai accepté. Entre-temps, il y a eu un changement politique. Le ministre des Sports a donc changé, et il a nommé un nouveau président de la Fédération arménienne de football, qui nomme un sélectionneur arméno-libanais (Souren Barseghian, ndlr) et oublie Jean. Ce sélectionneur me rappelle pour me convaincre de venir avec lui en sélection, mais pour être franc, je ne sentais pas du tout sa sérénade. Le type au téléphone commençait à faire le forcing : « Tu sais, on peut aussi t’obliger à venir jouer pour nous ! » Il voulait me faire peur pour une suspension auprès de l’UEFA. Bref, j’y vais et là, tout ce que je sentais au téléphone se décuple par dix. Le mec ne connaissait rien au foot, il ne s’intéressait qu’à l’aspect pécuniaire. Son discours, c’était : « Moi, je suis dans le football depuis plus longtemps que Platini, donc je connais mieux le foot que lui. » Un truc de fou… Pour le match contre la France, il me promet d’être titulaire au Stade de France, même si j’étais remplaçant contre la Russie pour le premier match. J’arrive en France, toute ma famille, mes amis font le déplacement le jour même, et trois heures avant, le coach me dit : « Éric, tu es remplaçant. » Là, je lui ai dit qu’à 33 ans, je n’avais rien à faire sur un banc, et qu’il devait prendre un jeune. J’ai arrêté là, je ne suis pas allé au stade. J’ai appelé tout le monde en leur disant de profiter du match, et je suis resté à l’hôtel. Ma femme est passée me récupérer juste après la rencontre. C’est dommage que ça se finisse comme cela, mais je préfère retenir le meilleur.

C’est-à-dire ?

J’ai vécu de très, très bons moments pour les éliminatoires de 1998. Dans notre groupe, on avait l’Allemagne, le Portugal, l’Ukraine, l’Irlande de Nord et l’Albanie. Au classement final, on termine quatrième de la poule, avec de très bons résultats : match nul contre le Portugal à domicile, victoire et match nul contre l’Irlande du Nord… C’était une belle aventure humaine, et d’un point de vue familial, mon père et mon grand-père ont pu venir en Arménie pour la première fois, découvrir le pays. C’était quelque chose d’important.

Aujourd’hui, l’Arménie est devenue une équipe dangereuse pour n’importe quelle équipe… Comment tu vois leurs performances ?

Elle est capable sur certains matchs d’être performante, de faire douter l’adversaire. Elle possède un joueur de très haut niveau avec Henrik Mkhitaryan et a pu grandir avec des hommes d’expérience, comme l’ancien gardien Roman Berezovsky. Après, l’effectif est encore trop faible pour en faire une nation forte en Europe. Pour cela, il faudrait peut-être naturaliser des joueurs, mais ce sera peut-être des personnes peu enclines à s’engager à fond dans la sélection… À notre époque, on s’investissait pour le bien des autres joueurs. Aujourd’hui, dans ce milieu-là, on ne le retrouve plus. Pour l’Arménie, il faut faire au mieux, avec ce qu’ils ont.

Ton pronostic pour ce match ?

Ce sera la France. À l’approche de l’Euro, elle ne va plus rien laisser au hasard. L’équipe a connu une période délicate liée à la fatigue, au turn-over, mais aujourd’hui, elle est remobilisée, reconcentrée sur l’objectif de 2016. Je vois une victoire large des Bleus, avec trois buts d’écart.
Le jour de Bourigeaud

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