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Dans la tête du Mou

Par Thibaud Leplat, à Madrid
Dans la tête du Mou

Le Special One est le sujet de débat favori de l’Espagne depuis deux ans. Jamais un entraineur n’avait occupé à ce point le centre du viseur. Il paraît même que c’est fait exprès.

José Mourinho est un type normal : fils de Setubal – ville normale du centre du Portugal, né d’une famille normale – un père footballeur et un oncle dans la sardine, et footballeur normal – il n’a fait qu’effleurer le haut niveau. Sa vie quotidienne, elle aussi, est bouleversante de banalité. Au mois de janvier, accompagné de sa femme, on l’aperçoit dans Madrid faire les soldes. Il aime le Corte Ingles (les Galeries Lafayette locales) parce qu’on y trouve de tout : du sac à main pour Maman au Vélo pour José Junior. A peine sorti du grand magasin, il passe par le rayon librairie de la FNAC Callao (centre de Madrid) sous les yeux ahuris des clients. Comme eux il est venu guetter les prix verts sur les CD. Comme eux, il aime les bonnes affaires: « dans ma vie personnelle risque zéro. Je ne risque pas un seul euro. Je suis un homme discret. Je déteste la vie sociale » . C’est pourtant cet être normal qui génère toutes les tempêtes. En quelques années, Monsieur Normal est devenu un monstre médiatique. Il y a quelque chose de louche dans la tête de Mourinho.

C’est peut-être la frustration de n’avoir jamais été joueur qui le torture. Comme Gainsbourg aurait voulu être peintre et Nieztsche aurait aimé être Wagner, Mourinho rêvait d’être un grand joueur : « ce n’est pas un mensonge de dire que quand j’étais petit je voulais être joueur, pas entraineur » . C’est vrai après tout. Aucun gamin ne rêve d’être assis sur un banc humide toute sa vie. Le banc c’est pour les remplaçants, ceux qui n’ont pas été choisis, ceux qui attendent leur tour. On ne devient pas une légende en restant assis sur une banquette. Des années plus tard, pour conjurer l’angoisse d’antan, Mourinho a effacé la différence entre le terrain et les alentours: « Pour moi les conférences de presse ce sont aussi le match » . L’entraineur est un joueur comme un autre et Mourinho dit avec les gestes et avec les mots tout ce qu’il n’a jamais pu faire avec les pieds: « Avec mes potes j’étais peut-être un phénomène mais dans le championnat je n’étais qu’un parmi d’autres » . José Mourinho est devenu quelqu’un en s’asseyant sur un banc. C’est à dire sans jouer. Mais la gloire atteinte en tant qu’entraineur et la frustration alors comblée, il aurait pu se retirer et profiter de ses lauriers. Jacquet l’a fait. Pas lui.

La fin de l’histoire

Mourinho n’est pas Guardiola ni Sacchi. Aucun de ses schémas tactiques utilisés ne fait figure de chef d’œuvre. Le Mou n’a rien inventé. « Je ne suis pas un révolutionnaire, plutôt un évolutionniste » . Ce qui le singularise c’est son hétérogénéité tactique et non sa créativité. D’un Porto ouvertement imbibé du 4-4-2 et pressing de Sacchi, le Special One est passé par une phase stratégique fluide et offensive à Chelsea et une immense plasticité à l’Inter. Avec lui Samuel Etoo n’a pas hésité à se changer en arrière latéral (gauche) contre le Barça au Camp Nou puis contre le Bayern en finale de la Champions (à droite). Le Mou n’a pas réinventé le foot. D’ailleurs personne ne se souvient de la manière dont gagne Mourinho. Le Real se déculotte contre le Barça avec un 4-3-3 très frileux en finale de Coupe du Roi ? Qu’importe le flacon, le Real remporte son titre et les socios ont la mémoire courte. Non José Mourinho n’est pas un idéologue du foot, juste un technicien pragmatique et cultivé.

Ce qui fait de José Mourinho un animal digne d’étude c’est son obsession pour la narration. Son plan de carrière est une épopée dont il écrit et raconte lui-même les plus beaux exploits. Il écrit sa légende à mesure qu’il l’accomplit : remporter la Champions avec Porto, faire de Chelsea un champion d’Angleterre 50 ans plus tard ou résoudre le complexe européen de l’Inter 45 ans après. Plus le défi paraît impossible, plus Mourinho est indispensable. Au Real le défi est unique mais l’exploit est double : mettre fin à la sécheresse et faire un sort au plus grand Barça de l’histoire. Comme un romancier, le Mou agence ses personnages. A Madrid il y a le héros qui est aussi le narrateur (lui), ses alliés (Perez et Sanchez), son armée (les joueurs), les épreuves (les équipes adverses), l’ennemi (la presse, l’UEFA) et les traitres (Valdano). Mourinho est au centre d’une tragédie dont il est seul metteur en scène. L’affaire des fuites dans Marca et de la division du vestiaire n’est qu’une péripétie alimentant la mystique du héros. Peu importe son auteur, le crime a un double objectif: identifier les traitres (le clan des Espagnols) et sauver le soldat Pepe du lynchage. L’attention est détournée et les attaques peuvent se diriger vers le héros. Plus il est attaqué, plus il est héroïque. Plus il est héroïque, plus il resserre les siens. Mourinho est le seul recours au chaos qu’il a lui-même créé. Dans cette histoire les victoires sont les récompenses et les titres sont le dénouement. Vivement la fin.

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Par Thibaud Leplat, à Madrid

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