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Dans l’intimité du Tout Puissant Mazembe

Par Christophe Gleizes, à Lubumbashi
Dans l’intimité du Tout Puissant Mazembe

Le Tout Puissant Mazembe s'est qualifié dimanche dernier pour les demi-finales de la Ligue des champions de la CAF. Du lundi, premier jour de préparation, au match du week-end, caméra embarquée dans les coulisses d'un des meilleurs clubs du continent.

Depuis quelques jours, on ne parle plus que du match dans les artères poussiéreuses mais colorées de Lubumbashi. Avec la venue du club soudanais d’Al-Hilal, c’est toute une ville qui retient son souffle avant l’explosion. Dans son taxi défoncé, Papa José annonce la couleur : « Tu vas voir, dimanche, tout le monde sera en noir et blanc pour soutenir les Badiangwena, ça va être la folie ! » Fierté nationale, l’équipe du Tout Puissant Mazembe est une référence en République démocratique du Congo. Quadruple champion en titre, vainqueur des Ligues des champions 2009 et 2010, le club présidé par le gouverneur et milliardaire Moïse Katumbi a décomplexé toute l’Afrique noire avec ses victoires répétées. Son plus beau fait d’armes ? Une finale perdue de Coupe du monde des clubs contre l’Inter de Milan d’Eto’o et Benítez. Plus poussif ces dernières années, le TP n’attend qu’un signe du destin pour redorer son lustre pas si lointain. Une victoire ce dimanche, et les demi-finales de la Ligue des champions africaine seront assurées.

Une attaque enrhumée

Tranquillement installé à la terrasse d’un café, Patrice Carteron, l’entraîneur de l’équipe, accepte de présenter plus en détail la confrontation à venir. « Pour nous, l’objectif de dimanche est très simple, trois points nous permettront d’être qualifiés pour les demi-finales à un match de la fin du mini-championnat. Le mieux, ce serait de prendre la première place pour pouvoir recevoir au retour, étant donné que les prestations à domicile sont notre point fort et celles à l’extérieur notre point faible. » Défait 1-0 au match aller, l’ancien entraîneur de Dijon et du Mali se méfie des Soudanais : « On va affronter une équipe qui, pour moi, va jouer défensivement. Al Hilal ne peut pas jouer autrement, c’est son style de jeu avec des joueurs grands, athlétiques et peu mobiles, qui aiment bien subir le jeu et procéder par contres. »

Toute la semaine, les entraînements se multiplient sur la pelouse synthétique du stade, à l’abri des regards indiscrets. Les attaquants, en particulier, ont droit à des séances spécialisées devant le but, afin de remédier à leur récente inefficacité. Il faut dire que sans Trésor Mputu, l’ancienne star de l’équipe, partie jouer en Angola, les buts se font désirer, et les critiques des médias locaux commencent à pleuvoir. « L’ombre de Trésor plane toujours, on le voit dans le manque de confiance que peuvent avoir certains joueurs, confirme le coach dans un soupir. Il portait tellement de responsabilités sur ses épaules qu’il en enlevait aux autres attaquants. Du coup, cette saison, on sent qu’on a des joueurs offensifs qui ont du mal à s’affirmer. Ils se créent beaucoup d’occasions, mais ont du mal à concrétiser. »

Entre doutes et revanche

Point d’orgue de la préparation, le match amical contre Nkana, redoutable équipe zambienne, prévu le mardi après-midi. Les tribunes sont clairsemées, mais la ferveur des quelques milliers de fanatiques déjà présents laisse augurer l’ambiance des matchs officiels. Sur la pelouse, la formation lushoise domine son sujet et se procure les meilleures opportunités. Elle se fait pourtant surprendre en seconde mi-temps, sur la seule occasion des visiteurs. La défaite entérinée, Tahar Messaoud, le médecin de l’équipe, grimace sur le banc : « On n’a pas très bien joué, c’est un gros avertissement. » Le lendemain, Patrice Carteron se veut néanmoins rassurant : « Ce genre de rencontre est un cadeau du ciel. Perdre un match amical contre un adversaire qui est également en course en Coupe de la CAF, je préfère ça cent fois plutôt qu’être confiant toute la semaine et ne pas voir le danger quelque part. »

Les jours défilent et l’attente du public, immense, ne cesse de croître. « On a une revanche à prendre, pas contre Al Hilal, mais contre nous, parce qu’on a été l’ombre de nous-mêmes au match aller, témoigne le boss en conférence de presse. On s’était laissés endormir par cette équipe, j’espère que ce dimanche, les joueurs vont arriver à faire le match qu’il faut pour qu’on soit heureux tous ensemble après la rencontre. » Le soir, des débats enflammés sur le niveau de l’équipe passent en boucle à la radio. Plutôt acerbes, les critiques sont dirigées vers l’entraîneur français, pourtant vainqueur de deux titres nationaux, mais accusé d’avoir une mentalité trop défensive. « Il ne faut pas les écouter eux, ce sont des supporters de Lupopo, le club rival » , estime José, visiblement pas persuadé de l’objectivité journalistique des professionnels concernés.

Prière collective

Vendredi matin, J-2 avant le grand match. Afin de souder l’équipe, direction l’église de Kafubu, pour une prière collective. C’est une habitude, ici, en Afrique, où presque tous les joueurs sont des croyants passionnés. « La connotation religieuse est très importante ici. Joueurs, staff et dirigeants, nous allons à la messe avant tous les matchs. Cela génère un esprit de famille » , sourit Patrice Carteron, déjà plus tendu, mais toujours prêt pour un bon mot : « Ça n’a rien d’étonnant, étant donné que le club c’est le Tout-Puissant et que notre président s’appelle Moïse. » Dans les travées de la chapelle, jeunes supporters et vieux fans en profitent pour s’asseoir près de leurs joueurs préférés. L’atmosphère est détendue mais concentrée, les chants de la chorale bercent mélodieusement le recueillement de certains. L’évêque, lui, ne cache pas son petit côté partisan : « Prions Dieu afin qu’il nous accorde la victoire ce dimanche. »

Dernières mises en place tactique le samedi, et le grand jour arrive enfin. Dès 10h du matin, les joueurs sont conviés au local du club, pour une dernière petite causerie en vidéo. Le repas de midi vite englouti, c’est la sieste, avec départ à 12h50, pour arriver en avance au stade, où le match est programmé à 15h. Dehors, déjà, les supporters ont commencé à s’amasser devant les grilles, où la police les contient sans ménagement. Quelques sifflements d’admiration s’échappent de la foule quand les cabriolets des joueurs non retenus s’échappent du centre de formation. Quelques minutes après, les héros du jour grimpent dans le bus, siglé d’un crocodile qui mange un ballon. « Tu ne peux pas t’asseoir là, c’est la place de coach Carteron » , prévient gentiment Jonathan Bolingi, l’attaquant remplaçant, tout heureux d’apprendre que Samir Nasri et Thierry Henry ont un jour eu une altercation à ce sujet.

Ferveur populaire

Le trajet entamé, le spectacle est moins à l’intérieur du car, où casques d’iPods et visages fermés sont de rigueur, que sur le bord de la route goudronnée. Chaque tournant révèle un nouveau supporter pouce en l’air, tout heureux d’apercevoir ses idoles. On sort du restaurant ou de sa maison pour venir saluer le passage de l’équipe ; on saute de joie en agitant des drapeaux. « Là encore ce n’est rien, attends un peu de voir à l’entrée du stade » , rigole à l’avance Tahar Messaoud, en vérifiant sa trousse médicale. En effet : à 200 mètres de l’arrivée, les fans, tous grimés aux couleurs du club, ne forment plus qu’une masse uniforme et compacte, à peine gênée par le camion de police qui ouvre le passage en fendant la foule. Les cris de joie montent de tous les côtés pour former un concert assourdissant, qui achève de faire sentir la pression de tout un peuple. De quoi avoir la chair de poule.

Dans le vestiaire, dernières consignes et encouragements. De l’autre côté du mur, on entend déjà les clameurs qui s’échappent des tribunes pleines à craquer. « À domicile, beaucoup de joueurs se savent en danger » , analyse Patrice Carteron, très touché par la ferveur populaire. « Dans notre stade, on est vraiment dans le Colisée, c’est une enceinte de 20 000 places, mais l’ambiance est absolument incroyable. Devant leur public, les joueurs jouent leur tête, ils ne peuvent pas se permettre d’être moyens, cela les transcende. » Ce seront les dernières paroles du coach, maintenant concentré sur l’échauffement de ses gladiateurs. Il faut donc se tourner vers Donny Kabongo, le sympathique secrétaire général, très beau en costume et chapeau, pour un pronostic enflammé : « Je dirais 3-0, comme France-Brésil. »

Cap sur les demi-finales

Le coup d’envoi est enfin sifflé, sous un soleil de plomb. L’atmosphère fiévreuse et passionnée augmente encore en début de match, à mesure que les Badiangwena se procurent rapidement les meilleures occasions. Il faudra pourtant attendre la 26e minute pour l’ouverture du score : sur un coup franc bien tiré, Rainford Kabala surgit au second poteau pour marquer du gauche. Explosion. Vuvuzelas au maximum. Danses de joie. Les tribunes ne forment plus qu’un ensemble flou et mouvant de bras tendus et de visages souriants. Portés par leur public en transe et une attaque retrouvée, les locaux ajouteront finalement deux autres buts en seconde période, grâce à un joli lob de Solomon Asante et une réalisation d’Adama Traoré. Les distingués « Éliminés ! Éliminés ! » ou les encore plus polis « la bite dans le cul » finiront d’accompagner le calvaire de Soudanais dépassés, finalement récompensés par un but pour l’honneur dans les arrêts de jeu.

Éclatante, la victoire du Tout Puissant Mazembe a permis de mettre les choses au clair et de replacer le club en tant que favori. Le président Katumbi, qui ne raterait un match de son équipe « pour rien au monde » malgré un agenda chargé, descend des tribunes pour saluer un public ravi. Patrice Carteron, lui, dresse le bilan en conférence de presse, devant des journalistes amadoués : « On savait qu’on n’était pas assez efficaces offensivement, mais je n’ai jamais douté. À force de travail, la réussite est venue aujourd’hui. » Reste maintenant à aller chercher le titre avec quatre matchs couperets. Ce sera difficile, mais tout le monde y croit, ici, à Lubumbashi. Après tout, comme l’a si bien rappelé l’évêque de Kafubu, « impossible n’est pas Mazembe ! »

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Par Christophe Gleizes, à Lubumbashi

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