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Comme si le ballon parlait espagnol

Par Markus Kaufmann
Comme si le ballon parlait espagnol

On y a vu les premiers bons signes, les premières combinaisons, les premiers buts et le premier titre de celle qui est devenue, peut-être, cinq ans et trois titres plus tard, la meilleure équipe de l'histoire. On ne s'y attendait pas vraiment. Même la presse espagnole avait ses doutes. Mais c'est bien là que tout a commencé, en Autriche et en Suisse, ironiquement les pays européens les plus culturellement éloignés de l'Espagne. En ce mois de juin 2008, l'Espagne devient championne d'Europe, goûte à la victoire et décide de dominer le monde du rectangle vert. Comme si le ballon s'était mis à ne parler qu'espagnol.

« Elle a commencé tout en bas » , dirait Drake. « Et maintenant elle est là. » On se souvient tous de la période pré-Mondial 1998 en France, la merveilleuse campagne de L’Équipe contre Aimé Jacquet et la photo finale de Deschamps. Nos voisins ibériques n’ont pas été plus indulgents avec les leurs. En 2006, trois mois après la foudroyante défaite face aux Blancs de Zizou et Vieira, les hommes de Luis s’inclinent successivement contre la Suède et l’Irlande du Nord en qualifications. Tout le royaume s’inquiète. Puis, vient l’affaire Raúl. « Il a été le meilleur joueur de ce pays, et il l’est peut-être toujours » , affirme le sélectionneur. Mais malgré une énorme saison 07/08 (23 buts), Aragonés dit non : « Je ne baisserai pas mon pantalon devant les médias. » Pas de Raúl, donc, mais Dani Güiza et Sergio Garcia. À chaque épopée ses héros. Ce ne sera pas celle de Raúl, ni celle de Guti. David Villa prend le 7 du Capitán et la Roja part dans les Alpes sous pression.

Le tiki-taka made by Aragonés

Pour ces cinq années de succès du tiki-taka rouge et jaune, beaucoup de crédit a été accordé à la formation du Barça. En quelques dizaines de mois seulement, on s’est déjà permis de réécrire l’histoire : le tiki-taka espagnol version XXIe siècle a bien été lancé par ce mal-aimé de Luis Aragonés. C’est chronologique : Guardiola n’avait pas encore dirigé un seul match de Liga en juin 2008, et mathématique : seuls trois joueurs du Barça faisaient partie du voyage. Mal aimé ? À l’étranger, personne n’a oublié les commentaires du vieux Luisito dans l’affaire Henry-Reyes. En Espagne, Aragonés sera toujours un simple héros colchonero. Sans le support des deux grandes familles merengue et blaugrana, vous n’êtes pas grand-chose dans la cour du royaume.

Et sa sélection de 2008 avait des airs d’escadron de combat censé représenter l’union nationale espagnole : onze clubs différents représentés ! Il y a du Getafe (De la Red), du Saragosse (Sergio Garcia), du Bétis (Juanito)… D’où certains héros oubliés sur la route : Senna, Marchena et Capdevila étaient tous titulaires, même s’ils ne sont pas directement associés à l’épopée de la Selección aujourd’hui. Pas encore d’armada guardiolesque : pas de Piqué, de Busquets, ni de Pedro. Non, les clubs les plus représentés sont le FC Valence et Liverpool. On en reviendrait presque à remercier Benítez.

Rouge mécanique

Avec un 4-4-2 ! San Iker, Ramos et Capdevila, Marchena-Puyol, Senna devant la défense, Xavi avec le ballon, derrière les artistes Iniesta et Silva. Et devant, la paire Villa-Torres. Au milieu, Xabi Alonso, Fàbregas et Cazorla contribuent au chef-d’œuvre. Raúl écarté, la Roja devient une équipe jeune, où personne ne sort vraiment du lot, et Aragonés réussit son pari. Six matchs, et cinq hommes du match différents. Xavi est finalement désigné meilleur joueur du tournoi, alors qu’il n’a pas été élu homme du match une seule fois. Plutôt significatif. À vrai dire, on ne savait pas qui choisir. Villa finit meilleur buteur, mais ne marque pas de toute la phase finale. Torres est décisif contre l’Allemagne, mais marque moins que Villa, absent en finale sur blessure. Iniesta est impérial contre la Russie, mais moins brillant que Silva en poules.

L’élément déclencheur intervient contre l’Italie de Buffon. C’en est fini de cette Roja fougueuse, historiquement douée en bas, dans les orteils, et faible en haut, vers les sourcils. Casillas mange Buffon droit dans les yeux, et l’Espagne s’envole vers le titre : 3-0 contre la Russie d’Archavine, avant ce crime de Torres sur Lahm à Vienne. Avant la compétition, seuls Casillas et Puyol étaient déjà de très grands champions. Xavi et Iniesta étaient aussi bons avant, mais ils n’étaient pas encore aussi grands. Parfois, il faut que cela pète. Comme quand certains artistes voient leur réputation changer du jour au lendemain après une excellente critique. En revenant de Vienne, ils enchaînent avec le fameux sextuplé, et même un peu plus…

Une renaissance pour un football qui part du milieu et finit au milieu

Aujourd’hui, on analyse l’Espagne (et toutes ses copies) avec lassitude : la possession de balle est devenue un indicateur dégoûtant. On a vu passer de telles statistiques… On pense avoir tout vu, et le monde demande du changement. C’est naturel, le nouveau semble toujours mieux. Du coup, depuis 2008, le monde s’est mis à chercher des qualités à toutes les autres sélections pour les trouver plus séduisantes que la Roja. Il y a eu l’Allemagne de Löw, l’Uruguay de Forlán, l’Italie de Pirlo… Et, plus récemment, le « Brésil de Neymar » . Mais non, il n’y a toujours pas mieux. À l’époque, en 2008, on découvre. On est les témoins d’une naissance. On essaye de situer dans le temps l’impact de ce football qui a l’odeur d’un cadeau de Noël. Cette équipe n’est ni plus ni moins qu’un groupe d’onze hommes qui joue vachement bien au football.

Si l’Espagne n’encaisse déjà aucun but en match à élimination directe, on retiendra surtout une révolution : une équipe qui gagne sans mettre le but au centre de sa philosophie. À l’heure de se rappeler cette Roja, on pense à la domination de son milieu de terrain, à ses jolis enchaînements, voire au leadership extraordinaire de Casillas et Puyol. Les plus sensibles pensent à Antonio Puerta, le grand absent. Mais pas un seul but marquant. Quatre ans après la Grèce, Aragonés offre au monde un nouveau football. Le point de départ d’une sorte de renaissance, dont le point culminant pourrait bien être le départ de Guardiola et ses outils au Bayern.

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Par Markus Kaufmann

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