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Ballon rond et accords de paix rares

Par Eric Carpentier
Ballon rond et accords de paix rares

Il avait signé les premiers accords de paix entre Israël et Palestine. En football, vingt ans après l'assassinat d'Yitzhak Rabin, le terrain est encore miné. Jusqu'aux plus hauts niveaux institutionnels.

Ce n’était probablement pas sa préoccupation première. En signant la Déclaration de principes, le 13 septembre 1993 à Washington, Ytzhak Rabin a ouvert la voie à la reconnaissance d’une équipe de football palestinienne. Cinq ans plus tard, la Fédération palestinienne de football (PFA) est reconnue par la FIFA. Mais, cette reconnaissance, le prix Nobel de la paix 1994 n’aura pas le loisir de la connaître, assassiné le 4 novembre 1995 de trois balles dans le dos par Ygal Amir, extrémiste israélien. Yasser Arafat, cosignataire et co-lauréat du Nobel de la paix 1994 (avec encore Shimon Peres), aura, lui, vu son équipe terminer bonne dernière d’un groupe composé par ailleurs de la Jordanie et de l’Irak à l’occasion du 3e championnat d’Asie de l’Ouest en 2004. Reste une victoire symbolique pour l’homme au keffieh : la représentation de l’entité palestinienne dans des compétitions opposant des nations. Mais, comme sur le terrain, les choses ne sont pas simples en coulisses entre Palestine et Israël.

Joueurs chiliens et Coupe d’Europe

« Le sport est désormais une arme majeure en politique » , déclarait Mahmoud Abbas en janvier 2015, quelques jours avant que l’hymne palestinien ne résonne pour la première fois dans une enceinte sportive, en prélude d’un match de la Coupe d’Asie des nations contre le Japon, en Australie (défaite 4-0). Si le président de l’État au statut d’observateur à l’ONU a bien révisé ses cours de soft power, il omet de préciser que l’inverse est tout aussi vrai : le sport est une victime permanente de la politique. Il devrait le savoir, lui dont le pays a mis dix ans à jouer son premier match à domicile, un amical contre la Jordanie le 26 octobre 2008 au stade Fayçal Husseini d’Al-Ram, dans la banlieue de Jérusalem. « Pour les qualifications au Mondial 2006, l’équipe s’entraînait à Ismaïlia, en Égypte, et jouait ses matchs « à domicile » dans le stade de Doha, au Qatar, expliquait le sélectionneur Izzat Hamzeh à l’approche de la rencontre. Afin de pallier l’absence de certains joueurs, interdits de sortie, on a même sélectionné des joueurs chiliens d’origine palestinienne. » Une rencontre aussi permise par la rénovation du stade sous l’égide de la FIFA, la Palestine n’ayant pas, jusqu’ici, d’infrastructures aux normes internationales.

Un coup d’œil à la situation de son voisin aurait aussi pu faire remarquer à Mahmoud Abbas la situation de dépendance du sport à l’endroit de la situation géopolitique. S’il ne regardera peut-être pas le Maccabi Tel Aviv recevoir le FC Porto ce mercredi soir, il se souvient que pendant deux décennies, entre 1974 et 1994, la Fédération israélienne de football (IFA) s’est retrouvée sans confédération d’accueil, clubs privés de compétitions internationales, sélection ballotée entre les zones de la FIFA. Une conséquence directe des tensions parcourant la région et réglée par l’intégration de l’UEFA en 1994. La fin d’une incongruité pour une équipe officiellement formée en 1948. Avant ? Une équipe de la PFA durant le mandat britannique en Palestine, pour cinq matchs officiels disputés entre 1934 et 1940 et comptabilisés dans leurs archives nationales tant par la Fédération israélienne que par son homologue palestinienne.

Du carton rouge à Nelson Mandela

Mais, depuis ces souvenirs communs, le temps a viré aux déchirures entre Israéliens et Palestiniens. Ces dernières années, deux demandes palestiniennes ont illustré les difficultés qui peuvent régner au quotidien sur les terrains. Par deux fois, en 2013 et en 2015, la PFA a demandé l’exclusion de la IFA de l’instance mondiale du football. En août 2013, Jibril Rajoub, homme fort de la PFA depuis 2008 et ancien dirigeant des forces de sécurité de l’Autorité palestinienne sous Yasser Arafat, demandait « le carton rouge, parce que le jaune a été montré depuis si longtemps. Nous tenons au carton rouge pour dénoncer la légitimité de l’occupation d’Israël et nous n’accepterons aucun compromis. » En cause, le refus d’accorder l’accès aux territoires palestiniens à plusieurs équipes arabes, notamment trois entraîneurs de la Jordanie, deux représentants des Émirats arabes unis, treize entraîneurs et des joueurs d’Irak. Une position apparemment forte qui aboutira à la simple création d’une task force patronnée par la FIFA destinée à améliorer la situation du footbal sur le terrain.

Bis repetita en 2015. En plus des limitations de déplacements et du contrôle des équipements sportifs, est en cause l’établissement de « cinq clubs dans des colonies implantées sur les terres occupées depuis 1967, clubs qui participent aux championnats nationaux israéliens en violation du droit international » , selon le communiqué de la PFA le 31 mars. Par l’intermédiaire de son président Ofer Einir, l’IFA s’empresse de s’opposer à une « demande qui mixe sport et politique d’une manière contraire aux principes de l’organisation et aux règles du jeu » , et Sepp Blatter et la FIFA de botter en touche : « La suspension d’une Fédération, quelle que soit la raison, est toujours nuisible à l’organisation dans son ensemble. » Un Blatter qui se fend de deux rencontres les 19 et 20 mai avec, respectivement, Benjamin Netanyahou à Jérusalem et Mahmoud Abbas à Ramallah. Et qui se félicite de voir « comment la Palestine a agi avec un grand cœur » au lendemain de l’annonce du retrait de la demande d’exclusion par Jibril Rajoub le 29 mai, à l’occasion du 65e congrès de la FIFA. En échange, une nouvelle commission chargée d’observer les restrictions de liberté des joueurs palestiniens, le racisme dans le football israélien et de trancher la question du statut des cinq clubs établis en Judée-Samarie. Une commission présidée par Tokyo Sexwale, ancien compagnon de cellule de Nelson Mandela et récent candidat à la présidence de la FIFA.

Sport simple, arme politique

Et demain ? Jeudi, l’Arabie saoudite aurait dû disputer un match de qualification pour la Coupe du monde 2018 à Ramallah. Elle ne le fera pas, invoquant un « cas de force majeure empêchant son équipe de se rendre dans les territoires palestiniens. » À savoir des contrôles d’entrée en Cisjordanie par Israël, un État avec lequel le royaume wahhabite n’entretient pas de relations diplomatiques. Et surtout, un refus d’acceptation de la situation actuelle. Sauf que la Fédération palestinienne s’insurge face à cette position, arguant qu’elle « ne peut pas céder sur ce droit légitime et historique » que constitue « le droit de jouer sur son territoire, devant son public » . Et Jibril Rajoub d’ajouter : « Nous redisons à ceux qui s’opposent et pensent que visiter la Palestine constitue une forme de normalisation avec la partie israélienne, que visiter un détenu en prison ne signifie pas reconnaître la légitimité du geôlier, mais constitue au contraire un acte de solidarité et de soutien au peuple palestinien et à sa juste cause. » Une punchline revendicatrice et partiale, sans doute. Bill Shankly, lui, disait du football qu’il est « un sport simple, rendu compliqué par les gens qui n’y connaissent rien » . Ou par ceux qui tiennent absolument à en faire une arme politique, peut-être.

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